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Assises nationales de l’IA : participez à l’événement inédit organisé par Ouest-France

Alors que l’intelligence artificielle s’immisce progressivement dans tous les aspects de notre société, des questions fondamentales se posent : comment concilier innovation et éthique ? Quels impacts sur l’emploi, l’environnement, et notre modèle démocratique ? Pour répondre à ces enjeux cruciaux, Ouest-France et la Région Normandie ont organisé les premières Assises nationales de l’Intelligence artificielle à l’Université de Caen Normandie. Un événement inédit, réunissant près de 600 décideurs, chercheurs, élus et citoyens, qui a mis en lumière les tensions, les espoirs et les responsabilités liées à cette révolution technologique. À travers les témoignages croisés de scientifiques, dirigeants d’entreprise et penseurs, ce rendez-vous a dessiné les contours d’une IA au service de l’humain, mais dont le développement exige vigilance, régulation et inclusion.

Quelle place pour l’IA dans la science d’aujourd’hui ?

Une accélération sans précédent de la recherche

À Caen, les débats scientifiques ont mis en lumière une réalité désormais incontournable : l’IA transforme profondément la manière dont les chercheurs abordent leurs problèmes. Pour Élodie Lambert, chercheuse en biologie computationnelle à l’Inserm, cette technologie est devenue un allié indispensable. « Il y a dix ans, analyser un génome prenait des mois. Aujourd’hui, grâce à des modèles d’apprentissage profond, nous obtenons des résultats en quelques heures. L’IA ne remplace pas le chercheur, mais elle lui permet de se concentrer sur l’interprétation, pas sur la collecte de données. »

Cette accélération touche tous les domaines. En astrophysique, des algorithmes détectent des exoplanètes dans des masses de données satellitaires. En chimie, des IA prédisent les propriétés de nouvelles molécules, réduisant les essais en laboratoire. Cédric Villani, mathématicien et ancien député, a souligné cette transformation lors de son intervention. « L’IA n’est pas une simple boîte noire. Elle repose sur des fondations mathématiques rigoureuses. Notre défi, aujourd’hui, est de former une nouvelle génération de scientifiques capables de comprendre ces outils, pas seulement de les utiliser. »

Les limites éthiques de l’expérimentation automatisée

Mais cette puissance soulève des questions. Julien Moreau, philosophe des sciences, interroge le risque de « délégation aveugle » à la machine. « Si nous laissons l’IA décider quels axes de recherche sont prioritaires, ne risquons-nous pas de marginaliser des domaines moins rentables mais essentiels, comme la santé publique ou la biodiversité ? » Ce débat a trouvé un écho concret dans les témoignages d’universitaires venus de petites structures, qui peinent à accéder aux ressources nécessaires pour intégrer l’IA dans leurs travaux.

L’IA, une opportunité ou une menace pour l’économie ?

Transformation des métiers et nouvelles compétences

Dans les entreprises, l’IA ne se contente plus de rationaliser les processus : elle redéfinit les métiers. Sophie Renard, directrice des ressources humaines d’un groupe agroalimentaire normand, raconte comment l’introduction de systèmes prédictifs a changé le quotidien de ses équipes. « Nos techniciens de maintenance ne réparent plus après une panne, ils anticipent les risques. Cela demande une formation continue, mais aussi un accompagnement psychologique. Beaucoup avaient peur d’être remplacés. En réalité, leur rôle s’est enrichi. »

Thierry Breton, ancien commissaire européen au Marché intérieur, a insisté sur la nécessité d’une stratégie industrielle européenne. « Nous ne devons pas subir la disruption, nous devons la diriger. Cela passe par des investissements massifs dans la formation, mais aussi par un cadre réglementaire clair. » Il a cité l’exemple des usines intelligentes, où l’IA optimise la chaîne de production tout en maintenant des emplois qualifiés.

Des inégalités territoriales en matière d’adoption

Pourtant, l’accès à ces bénéfices reste inégal. Yann Le Goff, maire d’une petite commune rurale du Calvados, déplore le manque d’accompagnement des TPE. « Les grandes entreprises ont les moyens de recruter des data scientists. Nous, on a du mal à connecter nos artisans au numérique. L’IA risque d’élargir l’écart entre zones urbaines dynamiques et territoires en retrait. » Ce constat a été repris par plusieurs intervenants, plaidant pour une politique volontariste de décentralisation technologique.

Comment réguler une technologie en constante évolution ?

Un cadre légal en construction

Le défi de la régulation était au cœur des discussions. Anne Bouverot, commissaire générale du Sommet mondial de l’IA, a rappelé l’urgence d’instaurer des garde-fous. « L’IA peut être utilisée pour détecter des fraudes fiscales, mais aussi pour profiler des citoyens sans leur consentement. La technologie n’est pas neutre : elle reflète les biais de ceux qui la conçoivent. »

Plusieurs propositions ont émergé : certification des algorithmes, audits d’impact éthique, et création d’une autorité de contrôle indépendante. « Il ne s’agit pas de freiner l’innovation, mais de l’encadrer », a insisté David Dieudonné, coordinateur de l’événement. Un consensus s’est dégagé autour de la nécessité d’un « passeport algorithmique » permettant de tracer l’origine, les objectifs et les données d’entraînement des modèles.

La souveraineté numérique, enjeu stratégique

La question de la souveraineté a également été abordée. Avec la dépendance européenne aux géants américains et chinois de la tech, plusieurs intervenants ont appelé à un « réarmement numérique ». « Nous devons développer des infrastructures de calcul souveraines, des centres de données en France, et des normes éthiques qui nous soient propres », a affirmé un ingénieur de l’Inria, dont les travaux portent sur l’IA verte.

IA et environnement : une relation ambivalente

Un coût énergétique souvent sous-estimé

Derrière l’efficacité des modèles d’IA se cache un bilan carbone parfois alarmant. Entraîner un grand modèle linguistique peut émettre autant de CO₂ qu’une dizaine de voitures sur toute leur durée de vie. « On parle d’intelligence artificielle, mais on oublie trop souvent qu’elle consomme énormément d’énergie », a souligné Camille Dubois, climatologue et membre d’un collectif de recherche sur les technologies durables.

Certains chercheurs ont présenté des alternatives : algorithmes plus légers, entraînement sur énergie renouvelable, ou encore réutilisation de modèles existants plutôt que de tout réinventer. À Caen, un projet pilote a été lancé pour mesurer en temps réel la consommation énergétique des serveurs universitaires dédiés à l’IA.

Des applications prometteuses pour la planète

Pour autant, l’IA peut aussi être un levier pour la transition écologique. Dans les ports normands, des systèmes prédictifs optimisent les rotations des navires, réduisant les temps d’attente et donc les émissions. En agriculture, des drones équipés d’IA surveillent la santé des cultures, permettant une utilisation ciblée des traitements. « L’IA n’est pas l’ennemi de l’environnement, mais elle doit être conçue dans cette perspective », a plaidé un entrepreneur du secteur agritech.

Comment rendre l’IA inclusive et accessible à tous ?

Éviter la fracture numérique

Le risque d’exclusion sociale a été largement évoqué. Léa Troadec, enseignante en collège dans un quartier prioritaire, témoigne des inégalités face aux outils numériques. « Certains élèves utilisent des correcteurs orthographiques IA à la maison. D’autres n’ont même pas accès à un ordinateur. Si on ne fait rien, l’IA creusera les écarts d’apprentissage. »

Plusieurs initiatives ont été présentées pour contrer cette tendance : ateliers de découverte de l’IA dans les lycées, formations gratuites pour les seniors, ou encore plateformes ouvertes aux associations. La Région Normandie a annoncé un appel à projets pour financer des expérimentations locales d’IA citoyenne.

Représenter la diversité dans les données

Un autre enjeu majeur est la diversité des données d’entraînement. « Si les algorithmes sont nourris uniquement par des données occidentales, jeunes et urbaines, ils ne comprendront pas le reste du monde », a alerté Aïcha Ndiaye, chercheuse en sociologie numérique. Elle a cité l’exemple de logiciels de reconnaissance faciale moins performants sur les peaux foncées, ou de chatbots incapables de comprendre des accents régionaux.

Conclusion : vers une intelligence artificielle au service de l’humain

Les Assises nationales de l’IA à Caen ont marqué un tournant. Elles ont montré qu’il est possible de penser une IA non pas comme une force incontrôlable, mais comme un outil à maîtriser collectivement. Les témoignages des acteurs du terrain – chercheurs, entrepreneurs, enseignants, élus – ont rappelé que la technologie n’a de sens que si elle sert l’intérêt général. Les défis restent immenses : régulation, formation, sobriété énergétique, inclusion. Mais ce rendez-vous a posé les bases d’un dialogue nécessaire, entre innovation et responsabilité. Comme l’a conclu Luc Ferry en clôture : « L’intelligence artificielle ne nous remplacera pas. Mais elle nous oblige à redéfinir ce que signifie être humain dans le monde de demain. »

A retenir

Quels sont les principaux enjeux abordés lors des Assises ?

Les Assises nationales de l’IA ont structuré leurs débats autour de quatre axes majeurs : les avancées scientifiques permises par l’IA, ses impacts économiques et sur l’emploi, les questions de régulation et de contrôle, ainsi que ses effets sur l’environnement et l’inclusion sociale.

Qui étaient les intervenants notables ?

Le mathématicien Cédric Villani, la dirigeante Anne Bouverot, l’ex-commissaire européen Thierry Breton et le philosophe Luc Ferry ont été parmi les personnalités marquantes de l’événement, chacun apportant une perspective différente sur les enjeux de l’IA.

Comment l’IA transforme-t-elle les métiers ?

L’IA redéfinit les compétences requises, en passant d’une logique réactive à une logique prédictive. Elle n’élimine pas nécessairement les emplois, mais elle exige une adaptation des formations et un accompagnement des travailleurs dans cette transition.

Quelle est la place de la Normandie dans l’écosystème de l’IA ?

La région s’impose comme un laboratoire d’innovation, notamment grâce à ses universités, ses pôles de recherche et son engagement dans des projets concrets d’IA appliquée à l’industrie, à l’agriculture et à la transition écologique.

Comment éviter les biais dans les algorithmes ?

Il est essentiel de diversifier les données d’entraînement, de garantir la transparence des modèles, et de mettre en place des audits éthiques. Former des équipes pluridisciplinaires, incluant des sociologues, des philosophes et des représentants de la société civile, est également crucial.

Anita

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