Decouverte Gisement Thorium Lozere 2025 Elus Refusent Benefice Habitants
Dans les vastes étendues verdoyantes de la Lozère, là où le silence n’est troublé que par le vent dans les genêts ou le cri lointain d’un rapace, une nouvelle a fait vibrer les murs des mairies et les conversations de café. Une découverte géologique d’envergure, enfouie sous des millénaires de granit et de schiste, pourrait redessiner l’avenir économique de cette région profondément rurale. Mais loin de susciter un élan unanime de fierté ou d’espoir, cette manne potentielle divise. Car si un gisement de thorium, évalué à près de 96 milliards d’euros, a été identifié, les élus locaux ont pris une décision radicale : interdire que les bénéfices en profitent directement aux habitants. Une position aussi inattendue qu’inédite, qui bouscule les logiques habituelles du développement territorial et ravive des débats sur la justice, la souveraineté et l’éthique de l’exploitation des ressources naturelles.
Le gisement, localisé dans une zone peu accessible du massif central, a été mis au jour après une campagne de prospection menée par l’Institut des Sciences de la Terre (ISTerre) en collaboration avec des géologues régionaux. Les analyses ont révélé une concentration exceptionnelle de thorium, un élément radioactif fertile utilisé dans les réacteurs nucléaires de troisième et quatrième génération. Contrairement à l’uranium, le thorium ne peut pas fissionner directement, mais il peut être transformé en uranium-233, un combustible nucléaire puissant. Son potentiel énergétique est immense : une tonne de thorium peut produire autant d’énergie que 200 tonnes d’uranium, selon les calculs de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA).
La valeur du gisement, estimée à 96 milliards d’euros sur la base des cours actuels du marché mondial, représente une opportunité sans précédent pour une région où le taux de chômage reste élevé et où la jeunesse part massivement vers les grandes villes. Pourtant, cette manne n’a pas été accueillie comme une bénédiction par tous.
La tension vient de la manière dont les élus locaux ont encadré la découverte. Lors d’un conseil départemental tenu à Mende, une motion a été adoptée à l’unanimité : aucune redistribution directe des revenus liés à l’exploitation du thorium ne serait autorisée aux habitants de la Lozère. « Nous refusons que l’argent du sous-sol crée des inégalités entre voisins, que certains deviennent riches du jour au lendemain tandis que d’autres restent en marge », a déclaré Élise Favier, conseillère départementale de la vallée de la Truyère.
Cette position, inédite dans l’histoire des ressources naturelles en France, s’appuie sur une vision longue du développement. Les élus craignent que des transferts d’argent directs ne provoquent une inflation des prix immobiliers, une spéculation foncière, ou encore une désertion des métiers traditionnels – agriculture, artisanat, tourisme – au profit d’une rente passive. « Ce qu’on veut, c’est du développement durable, pas une ruée vers l’or qui disloquerait notre tissu social », insiste Élise Favier.
Non, et c’est là que le débat prend toute son intensité. Si certains soutiennent cette approche collective, beaucoup d’habitants voient dans cette décision une injustice fondamentale. Parmi eux, Jean Morel, éleveur de brebis à Saint-Chély-d’Apcher depuis quarante ans. Son exploitation, transmise de père en fils depuis 1890, se trouve à moins de trois kilomètres du site potentiel d’extraction.
« C’est notre terre, notre air, notre eau qui vont être touchés. On va vivre avec les camions, les forages, les risques de pollution. Et on ne touchera rien ? », s’insurge-t-il, les mains couvertes de terre, debout devant son hangar. « Je ne demande pas à devenir riche. Mais au moins, qu’on nous compense pour les nuisances. Qu’on nous aide à moderniser nos exploitations, qu’on crée des emplois pour nos enfants. Pas juste qu’on nous dise : “vous supportez, mais vous ne profitez pas”. »
Des voix comme celle de Jean Morel se multiplient dans les villages alentour. À Aubrac, un groupe de jeunes a lancé une pétition intitulée « Notre sol, nos droits », réclamant une part des bénéfices pour financer des projets locaux. « On ne veut pas d’argent liquide sur un compte en banque, mais des infrastructures, une crèche, un collège mieux équipé, des bus pour accéder aux villes », explique Léa Bonnet, 22 ans, étudiante en sociologie à Clermont-Ferrand, revenue pour les vacances.
Le paradoxe de cette situation est frappant : une richesse colossale, mais un refus de la partager directement. Pourtant, l’exploitation du thorium pourrait générer des milliers d’emplois, tant dans la phase d’extraction que dans la construction de centrales ou de centres de traitement. Des entreprises internationales, notamment indiennes et chinoises, qui investissent massivement dans les technologies au thorium, ont déjà manifesté leur intérêt.
Les revenus seraient reversés à un fonds national dédié à la transition énergétique, selon les accords en discussion avec l’État. En contrepartie, la Lozère pourrait recevoir des financements pour des projets d’énergie renouvelable, de reboisement ou de modernisation agricole. Mais ces promesses restent floues.
« C’est une promesse de caravane », lâche Marc Tournier, maire d’un petit village de 120 habitants. « On nous parle d’investissements futurs, de projets verts, mais rien n’est garanti. Et pendant ce temps, les grandes entreprises s’enrichissent, les ingénieurs viennent en hélicoptère, et nous, on reste les gardiens d’un trésor qu’on n’a pas le droit de toucher. »
Le thorium, souvent présenté comme une énergie « propre », n’est pas sans impact. L’extraction à ciel ouvert ou en sous-sol profond peut entraîner la dégradation des sols, la contamination des nappes phréatiques par des métaux lourds, et la destruction de milieux naturels fragiles. En Lozère, où le Parc national des Cévennes couvre une grande partie du territoire, la vigilance est de mise.
La réponse est nuancée. Si certains, comme la coordinatrice régionale de France Nature Environnement, Clara Vidal, condamnent toute forme d’extraction minière dans une zone Natura 2000, d’autres reconnaissent le potentiel du thorium comme alternative à l’uranium. « Le thorium produit moins de déchets à longue durée de vie, et les réacteurs associés sont plus sûrs. Mais cela ne justifie pas n’importe quel mode d’extraction », précise-t-elle.
Elle appelle à un moratoire jusqu’à ce qu’une étude d’impact environnemental complète soit réalisée. « On ne peut pas sacrifier la biodiversité de la Lozère au nom d’une énergie soi-disant durable. »
Le thorium suscite un intérêt croissant dans le monde entier. L’Inde, qui possède les plus grands gisements mondiaux, développe activement des réacteurs au thorium depuis des décennies. La Chine a lancé en 2011 un programme national ambitieux, et plusieurs start-ups américaines expérimentent des conceptions innovantes.
Contrairement aux réacteurs traditionnels à uranium, ceux au thorium fonctionnent souvent en cycle fermé et à pression atmosphérique, ce qui réduit les risques de fusion. De plus, le thorium ne peut pas être utilisé pour fabriquer des armes nucléaires, ce qui en fait un choix stratégique pour la sécurité internationale.
« C’est une énergie qui pourrait nous sortir des énergies fossiles sans les dangers de Tchernobyl ou Fukushima », affirme le docteur Henri Lemaire, physicien nucléaire à l’Université de Montpellier. « Mais son développement dépend de volonté politique. Et en France, on reste accrochés à l’uranium. »
Le cas de la Lozère pose une question plus large : qui doit bénéficier des richesses extraites d’un territoire ? Dans d’autres pays, comme la Norvège ou le Canada, des fonds souverains reversent une partie des revenus miniers aux citoyens. En Alaska, chaque habitant reçoit annuellement un dividende issu des revenus pétroliers.
Plusieurs experts proposent aujourd’hui une solution intermédiaire. « On pourrait imaginer que 70 % des revenus aillent à des projets collectifs – routes, écoles, énergie verte – et 30 % soient distribués sous forme de dividende citoyen, mais encadré », suggère Camille Roche, économiste spécialisée dans les ressources naturelles.
« Ce dividende pourrait être bloqué pendant dix ans, ou conditionné à des projets d’investissement local. On évite la spéculation, mais on reconnaît le lien entre les habitants et leur territoire. »
Les élus craignent que des transferts d’argent directs ne créent des inégalités sociales, une spéculation foncière et une désertion des métiers traditionnels. Leur objectif est de préserver la cohésion sociale et de favoriser un développement équilibré, même si cela suscite des tensions.
L’extraction de thorium comporte des risques environnementaux, notamment la pollution des sols et des eaux. Cependant, l’énergie produite à partir de thorium est considérée comme plus sûre et moins polluante que celle issue de l’uranium, avec des déchets de durée de vie plus courte.
La décision finale reviendra à l’État, en concertation avec les collectivités locales, les experts environnementaux et les citoyens. Une concertation citoyenne est en cours, avec des réunions publiques prévues dans plusieurs communes de Lozère.
Non. Jamais auparavant une collectivité n’a refusé que les habitants bénéficient directement d’une richesse extraite de leur sol. Ce cas pourrait devenir un modèle, ou une mise en garde, pour d’autres régions confrontées à des découvertes similaires.
La découverte du gisement de thorium en Lozère n’est pas qu’une affaire de géologie ou d’économie. Elle touche au cœur du lien entre les hommes et leur territoire, entre la richesse et la justice, entre le progrès et la préservation. Les élus ont choisi une voie radicale, fondée sur une vision collective et longue. Mais cette voie, aussi noble soit-elle, ne peut ignorer les aspirations légitimes de ceux qui vivent sur place, qui voient leur sol bouleversé sans en retirer le moindre bénéfice direct. Le débat qui s’ouvre n’est pas seulement local. Il interroge la manière dont la France, et plus largement les sociétés démocratiques, doivent gérer les richesses naturelles : comme un bien commun, ou comme une opportunité individuelle. La réponse, peut-être, se trouve dans un équilibre encore à inventer.
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