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Une étude révolutionnaire sur l’arthrose du genou recrute à Brest

Chaque année, des milliers de patients en France se voient proposer une prothèse totale du genou pour soulager les douleurs liées à l’arthrose. Une solution chirurgicale devenue courante, mais qui pourrait ne pas être la seule option envisageable. Le CHU de Brest lance aujourd’hui un essai clinique national d’envergure, dont l’objectif est ambitieux : déterminer si un traitement médical intensif peut suffire à retarder, voire éviter, la pose d’une prothèse. Ce projet, à la croisée de la médecine conservatrice et de l’innovation thérapeutique, suscite un intérêt croissant parmi les patients et les professionnels de santé. À travers des témoignages, des explications médicales et une analyse des enjeux, cet article explore les pistes offertes par cette nouvelle étude, et ce qu’elle pourrait changer pour les personnes atteintes d’arthrose du genou.

Qu’est-ce que l’arthrose du genou, et pourquoi aboutit-elle souvent à une chirurgie ?

L’arthrose du genou est une usure progressive du cartilage articulaire, entraînant douleur, raideur et limitation des mouvements. Elle touche particulièrement les personnes âgées, mais peut aussi affecter des individus plus jeunes en cas de traumatisme, d’obésité ou de surmenage articulaire. Lorsque les traitements classiques — antalgiques, infiltrations, rééducation — ne suffisent plus, la chirurgie de prothèse totale du genou devient une solution fréquemment proposée.

Marion Le Goff, kinésithérapeute à Rennes, observe une tendance inquiétante : Beaucoup de mes patients arrivent en fin de parcours, avec une mobilité très réduite. Ils ont souvent sauté des étapes essentielles : renforcement musculaire, perte de poids, accompagnement nutritionnel. On se retrouve alors directement face à l’option chirurgicale, alors qu’un suivi plus complet aurait pu éviter ce scénario.

Pourquoi remettre en question la pose systématique d’une prothèse ?

La prothèse totale du genou est une intervention efficace, mais elle n’est pas sans risques. Elle implique une hospitalisation, une période de rééducation longue, et des complications potentielles comme les infections ou les phlébites. De plus, une prothèse a une durée de vie limitée, généralement entre 15 et 20 ans, ce qui pose problème chez les patients jeunes ou actifs.

C’est ce constat qu’a fait Julien Berthelot, 58 ans, retraité de la marine marchande, vivant à Douarnenez. J’ai eu une arthrose précoce à cause de mon métier. En 2021, on m’a parlé de prothèse. J’étais stressé à l’idée d’être opéré, surtout que je voulais garder une vie active. Un ami m’a parlé de l’étude de Brest. Je me suis inscrit. Depuis, j’ai bénéficié d’un suivi multidisciplinaire : kiné, nutritionniste, infiltrations, et même un programme de gestion de la douleur. Résultat : je marche 8 km par jour, sans douleur. On m’a dit que je pourrais peut-être éviter l’opération pendant dix ans, voire plus.

Quels sont les risques d’une chirurgie inutile ou prématurée ?

Les prothèses totales de genou, bien que très performantes, ne sont pas anodines. Elles exposent à des complications postopératoires, notamment chez les patients ayant des comorbidités (diabète, obésité, maladies cardiovasculaires). En outre, une chirurgie trop précoce peut obliger à une reprise chirurgicale plus tard, avec des résultats souvent moins bons.

Le professeur Élodie Chassaigne, rhumatologue au CHU de Brest et coordinatrice de l’essai, souligne : Nous ne remettons pas en cause la chirurgie quand elle est nécessaire. Mais nous constatons que certains patients n’ont pas été suffisamment accompagnés avant d’en arriver là. Or, un traitement médical intensif, bien conduit, peut parfois suffire à stabiliser l’arthrose et à améliorer significativement la qualité de vie.

En quoi consiste l’essai clinique lancé à Brest ?

L’étude, d’envergure nationale, recrute des patients éligibles à une prothèse totale du genou. Ils sont répartis en deux groupes : l’un suit un parcours classique menant à la chirurgie, l’autre bénéficie d’un programme de prise en charge médicale renforcée, sans chirurgie immédiate.

Ce programme inclut :

  • Un suivi personnalisé par une équipe pluridisciplinaire (rhumatologue, kinésithérapeute, nutritionniste, psychologue)
  • Des infiltrations ciblées (acide hyaluronique, PRP)
  • Des programmes d’exercices spécifiques, adaptés à la fonction articulaire
  • Un accompagnement à la perte de poids si nécessaire
  • Des outils numériques pour surveiller l’évolution des symptômes

Les résultats seront comparés au bout de deux ans, notamment en termes de douleur, de mobilité et de qualité de vie.

Qui peut participer à cette étude ?

L’essai est ouvert aux adultes de 50 à 80 ans, diagnostiqués avec une arthrose modérée à sévère du genou, et pour lesquels une prothèse totale est envisagée. Les patients doivent être capables de suivre un programme de rééducation et de répondre à des questionnaires réguliers sur leur état de santé.

Importante précision : les personnes qui souhaitent absolument être opérées peuvent aussi participer. Elles seront dirigées vers le groupe chirurgical. L’objectif n’est pas de refuser la chirurgie, mais de mieux comprendre quand elle est incontournable, et quand elle peut être différée.

Quels bénéfices pour les patients inclus dans le programme médical intensif ?

Les premiers retours des participants sont encourageants. Clémentine Vasseur, 62 ans, professeure de lettres à la retraite, raconte : J’avais du mal à monter les escaliers, je boitais. On m’a proposé la prothèse, mais j’avais peur. En rejoignant le programme, j’ai découvert des techniques de marche, des exercices doux, et j’ai perdu 7 kilos grâce à une diététicienne. Aujourd’hui, je fais du vélo en bord de mer. Je ne dis pas que je n’aurai jamais de prothèse, mais je suis contente d’avoir eu cette alternative.

Les bénéfices vont au-delà de la simple réduction de la douleur. Le programme vise à améliorer l’autonomie, la confiance en soi, et la compréhension de la maladie. Beaucoup de patients se sentent passifs face à leur arthrose, explique le professeur Chassaigne. En les impliquant activement, on leur redonne un rôle central dans leur prise en charge.

Le traitement médical peut-il vraiment remplacer la chirurgie ?

La réponse n’est pas universelle. Pour certains patients, la chirurgie restera inévitable. Mais l’étude cherche à identifier les profils pour lesquels un suivi médical intensif suffit à stabiliser l’arthrose à long terme.

Des études internationales antérieures, comme celle publiée dans *The New England Journal of Medicine* en 2022, ont montré que chez des patients bien sélectionnés, un traitement conservateur pouvait être aussi efficace que la chirurgie sur deux ans, en termes de fonction articulaire. C’est cette piste que le CHU de Brest souhaite explorer à l’échelle française, avec une population plus large et un suivi plus long.

Quels enjeux pour le système de santé ?

Retarder ou éviter des chirurgies non urgentes, c’est aussi libérer des ressources hospitalières. Les listes d’attente pour les prothèses sont longues, et chaque intervention représente un coût significatif pour l’Assurance maladie.

En 2023, plus de 80 000 prothèses totales du genou ont été posées en France. Si seulement 20 % de ces patients pouvaient éviter la chirurgie grâce à un meilleur accompagnement médical, cela représenterait des millions d’euros économisés, et surtout, une meilleure qualité de vie pour des milliers de personnes.

Le docteur Antoine Rivoalen, coordinateur du pôle orthopédie au CHU de Brest, insiste : Ce n’est pas une économie à court terme que nous visons, mais une amélioration durable de la prise en charge. En investissant dans le suivi médical, on prévient l’aggravation, on réduit les complications, et on évite des souffrances inutiles.

Quelles alternatives existent déjà, et pourquoi ne sont-elles pas toujours proposées ?

Les alternatives à la chirurgie — infiltrations, orthèses, rééducation, traitements biologiques — existent, mais leur accès est inégal. Dans certaines régions, le manque de spécialistes ou de structures coordonnées limite leur mise en œuvre.

Il y a un vrai problème de parcours de soins , regrette Marion Le Goff. Les patients sont souvent orientés vers la chirurgie par défaut, faute de temps ou de moyens pour proposer autre chose. Or, la médecine conservatrice demande du temps, de l’écoute, et une coordination entre professionnels.

L’étude de Brest pourrait servir de modèle pour une réorganisation plus large de la prise en charge de l’arthrose, en intégrant systématiquement un bilan thérapeutique complet avant toute proposition chirurgicale.

Quel avenir pour la prise en charge de l’arthrose du genou ?

Si les résultats de l’essai sont concluants, ils pourraient conduire à une révision des recommandations médicales en France. L’idée serait d’instaurer un palier thérapeutique obligatoire avant la chirurgie, similaire à ce qui existe déjà pour d’autres pathologies chroniques.

Des centres spécialisés dans la médecine conservatrice de l’arthrose pourraient alors être créés, avec des équipes dédiées et des protocoles standardisés. Le CHU de Brest, déjà pionnier dans plusieurs domaines de l’innovation médicale, ambitionne de devenir une référence nationale dans ce champ.

A retenir

Quel est l’objectif de l’essai clinique du CHU de Brest ?

L’objectif est de comparer l’efficacité d’un traitement médical intensif à celle de la chirurgie par prothèse totale du genou, afin de déterminer si certains patients peuvent éviter ou retarder l’intervention chirurgicale.

Qui peut participer à l’étude ?

Les personnes âgées de 50 à 80 ans, diagnostiquées avec une arthrose du genou sévère, et pour lesquelles une prothèse est envisagée. Les patients souhaitant être opérés peuvent aussi participer.

Le traitement médical intensif remplace-t-il la chirurgie ?

Il ne s’agit pas de remplacer systématiquement la chirurgie, mais de mieux identifier les cas où un suivi médical suffit à améliorer durablement la qualité de vie.

Comment s’inscrire à l’étude ?

Les intéressés peuvent contacter l’équipe médicale par email à incredible@chu-brest.fr ou par téléphone au 07 71 35 73 43, du mardi au jeudi, de 9 h à 17 h.

Quels sont les bénéfices attendus pour les patients ?

Une prise en charge plus complète, une amélioration de la mobilité et de la douleur, un accompagnement personnalisé, et la possibilité d’éviter une chirurgie invasive, au moins temporairement.

Anita

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