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À Hendaye, le bruit des avions devient insoutenable en 2025 et les habitants se rebellent

À la frontière entre la France et l’Espagne, là où les vagues de l’Atlantique viennent s’échouer sur la plage d’Hendaye, un autre bruit couvre désormais celui de la mer : le grondement incessant des réacteurs. Depuis des décennies, les avions de l’aéroport de Saint-Sébastien survolent la ville française à basse altitude, traçant des sillons invisibles dans le ciel et des sillons de colère dans les esprits. Ce n’est plus seulement une nuisance sonore, c’est une question de santé, d’environnement, de souveraineté locale et de justice. Une pétition lancée en juillet 2025 par Paco Durandeau a relancé un débat longtemps étouffé, réveillant une colère sourde et mobilisant des habitants aux profils variés, unis par une même exigence : vivre sans avion au-dessus de leur tête.

Quels impacts concrets subissent les habitants d’Hendaye ?

Le quotidien de Paco Durandeau, retraité de la fonction publique, a basculé depuis qu’il a commencé à compter les passages d’avions. Sur son balcon, face à la mer, il note chaque survol. « À la belle saison, on en a jusqu’à vingt-quatre par jour, parfois en rafales, avec des intervalles de trois minutes à peine », confie-t-il. « Ces avions ne passent pas dans le ciel, ils frôlent les toits. On sent les vibrations dans les murs. » Son voisin, Jean-Marc Idrac, un ancien ingénieur en acoustique, a constaté autre chose : une pollution visible. « Sur les terrasses, les toitures, le linge étendu… tout noircit. Ce ne sont pas des poussières ordinaires. C’est du kérozène, des particules ultrafines, des métaux lourds. On vit sous une pluie invisible. »

Le quartier d’Hendaye Plage, directement aligné avec la trajectoire d’atterrissage, est le plus touché. Mirentxu Irigoyen, ancienne enseignante à l’école primaire locale, témoigne : « J’ai enseigné pendant trente-deux ans. Depuis vingt ans, les enfants ont du mal à se concentrer quand un avion passe. Certains sursautent. D’autres ont des troubles du sommeil. » Elle a installé un carnet de bord sur sa terrasse, où elle consigne chaque passage, y compris ceux en infraction. « Le 26 juin 2025, j’ai noté deux vols après 22 heures. Le décret franco-espagnol de 1992 interdit pourtant les survols entre 22 h et 7 h 30. Mais qui vérifie ? Qui sanctionne ? »

Patrick Ferret, chargé d’innovation dans le domaine de l’économie circulaire, a poussé l’analyse plus loin. À l’aide d’outils de cartographie aérienne comme AviaPlanner, il a modélisé les trajectoires. « Ces avions, pour des raisons techniques ou de gestion du trafic, effectuent une boucle au-dessus du territoire français. Cette manœuvre ajoute environ quarante kilomètres par vol. Sur un trajet Fontarabie-Madrid de 350 km, c’est 10 % de distance supplémentaire. Autrement dit, de la pollution inutile, du carburant gaspillé, des émissions évitables. »

Quelles sont les règles en vigueur et pourquoi ne sont-elles pas respectées ?

Le cadre réglementaire existe, mais il semble poreux. Le décret franco-espagnol du 2 décembre 1992, censé protéger les populations frontalières, impose une interdiction des survols entre 22 heures et 7 h 30. Il fixe également une altitude minimale de 300 mètres au-dessus du territoire français. Pourtant, les témoignages et les relevés montrent que ces règles sont régulièrement ignorées.

Le problème, selon Kotte Ecenarro, maire d’Hendaye, réside dans la gouvernance de l’aéroport. « Ce site est géré par l’AENA, l’agence espagnole des aéroports. Les décisions stratégiques sont prises à Madrid et à Paris, sans consultation réelle des élus locaux. Nous sommes sur la trajectoire, mais hors du processus. »

Le maire rappelle que, malgré les promesses, la Commission des Pyrénées, censée coordonner les enjeux transfrontaliers, n’a pas siégé depuis juin 2025. « On nous parle de dialogue, mais il n’y a que du vide. »

Les exceptions au décret sont nombreuses. Jets privés, vols gouvernementaux, opérations d’urgence : tous peuvent échapper au contrôle. « On nous dit que c’est exceptionnel, mais ces exceptions deviennent la règle », souligne Mirentxu Irigoyen. « Et pendant ce temps, les enfants ne dorment pas, les seniors stressent, les oiseaux fuient. »

Quelle est la situation écologique autour de la baie de Txingudi ?

La baie de Txingudi, située à moins de cent mètres de la piste, est un écosystème fragile. Classée site Natura 2000, elle abrite près de 250 espèces animales et végétales, dont certaines sont menacées. Le bruit constant des avions, les vibrations, la pollution atmosphérique et les perturbations lumineuses ont un effet délétère sur la faune locale.

Patrick Ferret a mené une étude de terrain avec des naturalistes locaux. « Nous avons constaté une raréfaction notable des oiseaux nicheurs, notamment des limicoles. Les passages à basse altitude provoquent des fuites massives. Les zones humides, pourtant protégées, deviennent des espaces de stress plutôt que de refuge. »

Un ornithologue local, Iñaki Zaldua, confirme : « Avant, on entendait les chants le matin. Aujourd’hui, c’est le rugissement des réacteurs. Les oiseaux migrateurs hésitent à s’arrêter ici. La biodiversité recule. »

Quelles solutions les habitants réclament-ils ?

Le collectif citoyen, né autour de la pétition de Paco Durandeau, a défini des objectifs clairs. Premièrement, que les avions empruntent exclusivement la voie espagnole, sans survol du territoire français. Deuxièmement, que les règles existantes soient strictement appliquées, avec un système de surveillance indépendant. Troisièmement, que les autorités mettent en place une étude d’impact sanitaire et environnemental, menée par des experts neutres.

« Nous ne sommes pas contre l’aéroport, mais contre son empreinte sur notre vie », précise Jean-Marc Idrac. « Nous demandons simplement que l’on respecte les lois, qu’on protège la santé publique, et qu’on prenne en compte l’environnement. »

Le collectif a déposé une demande de médiation auprès du gouvernement français et espagnol. Il a également sollicité des soutiens en Espagne, notamment à Saint-Sébastien, où certains élus locaux commencent à s’interroger sur la pérennité du site. « Il y a une prise de conscience, même là-bas », note Paco Durandeau. « On nous dit qu’on gêne le tourisme, mais les vacanciers applaudissent les atterrissages. C’est un spectacle, pas une nécessité. »

À ce jour, la pétition a récolté 472 signatures. Deux membres du collectif Hendaia Biltzen ont réussi à faire inscrire dans un document de prospective communal une exigence de limitation de la pollution sonore et atmosphérique d’ici 2026. « C’est un début », reconnaît Mirentxu Irigoyen. « Mais il faut aller plus loin. »

Quelle est la position de l’AENA et des autorités espagnoles ?

L’AENA, gestionnaire de l’aéroport de Saint-Sébastien, affirme que les opérations aériennes respectent les normes européennes en matière de sécurité et d’environnement. « La piste répond aux spécifications techniques », déclare un porte-parole. « Les trajectoires sont optimisées en fonction des conditions météorologiques et de la circulation aérienne. »

L’organisme rappelle également que l’aéroport dessert une zone transfrontalière et qu’il est utilisé par des résidents du sud de la France pour des déplacements professionnels ou touristiques. « En 2024, nous avons accueilli 500 000 passagers. Ce n’est pas Bilbao, mais c’est un service public utile. »

Pour autant, l’AENA reconnaît que les survols d’Hendaye sont un sujet sensible. « Nous sommes ouverts au dialogue, mais les solutions techniques ne sont pas simples. Modifier les procédures d’approche nécessite des études complexes et des accords avec Eurocontrol. »

Quel avenir pour l’aéroport de Saint-Sébastien ?

La question de la fermeture du site revient régulièrement dans les discussions. Pour certains, comme Paco Durandeau, c’est la seule réponse durable. « Tant que cet aéroport fonctionnera avec ces trajectoires, il y aura de la souffrance. Et tant qu’il y aura de la souffrance, il y aura de la résistance. »

Le débat n’est pas nouveau. En 2009, des habitants de Mendelu avaient déjà bloqué un projet d’allongement de la piste, jugé insuffisant et trop intrusif. En 2012, une nouvelle tentative avait échoué face à la mobilisation citoyenne. Depuis, le statu quo s’est installé, mais la pression monte à nouveau.

Le maire Kotte Ecenarro appelle à une révision globale du schéma d’exploitation. « Il faut un cap clair, partagé, et vérifiable. Soit on change les procédures, soit on ferme. Mais on ne peut plus vivre dans cette ambiguïté. »

Les autorités françaises et espagnoles sont désormais sous pression. La Commission des Pyrénées, promise depuis des mois, doit enfin se réunir. Des experts en santé publique, des écologistes, des élus et des représentants des usagers sont invités à y participer. « Ce n’est pas une réunion de plus, c’est une épreuve de vérité », lance Jean-Marc Idrac.

A retenir

Pourquoi les habitants d’Hendaye protestent-ils contre l’aéroport de Saint-Sébastien ?

Les riverains dénoncent des survols à très basse altitude, souvent en infraction avec le décret franco-espagnol de 1992. Ils subissent une pollution sonore chronique, une dégradation de la qualité de l’air, et des impacts sur leur santé et leur bien-être. La trajectoire des avions frôle les toits, traverse des zones résidentielles et perturbe un écosystème protégé.

Existe-t-il des règles pour limiter les nuisances ?

Oui. Un décret de 1992 interdit les survols entre 22 h et 7 h 30 et impose une altitude minimale de 300 mètres au-dessus du territoire français. Cependant, ces règles ne sont pas toujours respectées, notamment par les jets privés et les vols officiels. L’absence de contrôle indépendant et de sanctions affaiblit l’application du cadre réglementaire.

Quelles sont les conséquences environnementales ?

La baie de Txingudi, zone humide protégée, subit une pression croissante. Le bruit, la pollution atmosphérique et les vibrations perturbent la faune, notamment les oiseaux migrateurs. Des études citoyennes montrent une raréfaction des espèces et une altération de l’écosystème, malgré le statut Natura 2000.

Quelles solutions sont envisagées ?

Le collectif demande que les avions empruntent uniquement la voie espagnole, sans survol du territoire français. Il exige le respect strict des règles existantes, la mise en place d’un système de surveillance indépendant, et une étude d’impact sanitaire et environnemental. À terme, la fermeture de l’aéroport est envisagée par certains, faute de solution durable.

Quel est le rôle des élus et des institutions ?

Le maire d’Hendaye, Kotte Ecenarro, soutient la mobilisation citoyenne et appelle à une révision du schéma d’exploitation. Les gouvernements français et espagnol sont mis en cause pour leur absence de coordination. La Commission des Pyrénées, censée traiter ces enjeux transfrontaliers, tarde à se réunir, alimentant la frustration locale.

L’aéroport de Saint-Sébastien est-il indispensable ?

Il accueille environ 500 000 passagers par an, essentiellement pour des liaisons régionales et touristiques. Bien moins fréquenté que Bilbao (7 millions), il répond à une demande réelle, mais limitée. Son utilité est reconnue, mais elle doit être pesée contre les impacts subis par les populations voisines. Le débat porte désormais sur l’équilibre entre service public et droit à la tranquillité.

Anita

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