Les Fourres Framboise Disparaissent En 2025
Une onde de tristesse parcourt les rayons des supermarchés et les mémoires gustatives de toute une génération : les Fourrés Framboise, ces biscuits cultes au cœur acidulé et à la texture si particulière, s’apprêtent à disparaître. Ce n’est pas une rumeur, mais une décision officielle de Deliceo, l’entreprise à l’origine de cette douceur emblématique. Pour beaucoup, il ne s’agit pas simplement de la fin d’un produit, mais de la fin d’un rituel, d’un souvenir, d’une part de leur enfance ou de leur adolescence. Entre nostalgie, révolte et quête de substituts, l’adieu aux Fourrés Framboise résonne bien au-delà du simple marché des snacks sucrés.
La décision de Deliceo de cesser la production des Fourrés Framboise n’est pas le fruit d’un caprice, mais d’une analyse froide du marché. Depuis près de cinq ans, les ventes du produit ont chuté de manière continue, malgré une base de consommateurs fidèles. L’entreprise, confrontée à des pressions croissantes en matière de rentabilité, a dû revoir son portefeuille de produits. Les Fourrés Framboise, bien que porteurs d’émotion, ne répondaient plus aux critères économiques nécessaires pour rester en production.
Le monde du biscuit évolue rapidement. Les consommateurs sont de plus en plus attentifs à la composition des aliments, à la présence d’additifs, au sucre ajouté et à l’origine des matières premières. Les Fourrés Framboise, avec leur formulation classique, n’ont pas su s’adapter à cette mutation. Des marques émergentes, proposant des biscuits bio, sans gluten ou à faible indice glycémique, ont progressivement grignoté des parts de marché. Même les grandes enseignes traditionnelles ont dû réinventer leurs gammes pour suivre le rythme.
Ironie du sort : les Fourrés Framboise étaient encore cités en exemple lors de séminaires marketing, il y a quelques années, pour leur capacité à créer une forte identification émotionnelle. Mais la notoriété ne suffit pas à garantir la pérennité d’un produit. Deliceo a constaté que la demande stagnait, voire régressait, surtout chez les jeunes consommateurs. Les nouveaux formats, les snacks protéinés, les barres énergétiques ou les alternatives végétales ont détourné l’attention.
La fermeture de la ligne de production des Fourrés Framboise ne touche pas seulement les amateurs de douceurs. Elle a des répercussions concrètes sur l’économie locale. L’usine de production, située à Saint-Clément-de-Vers, dans l’Ain, employait une trentaine de personnes directement dédiées à ce seul produit. Avec la suppression de cette gamme, des postes sont menacés, même si Deliceo assure que des reclassements sont en cours.
En aval, les fournisseurs de matières premières sont également touchés. Le sirop de framboise utilisé dans la garniture provenait d’un petit producteur ardéchois, Étienne Rouvière, qui cultive des framboises depuis trois générations. « On nous a prévenus il y a deux mois, explique-t-il. On perd 15 % de notre chiffre d’affaires du jour au lendemain. Ce n’est pas énorme à l’échelle nationale, mais pour nous, c’est un coup dur. »
Le réseau de distribution a lui aussi été affecté. Certains grossistes spécialisés dans les produits de niche ont vu leur catalogue s’appauvrir. Pour certains, les Fourrés Framboise représentaient un produit phare, capable d’attirer des clients dans des épiceries fines ou des magasins bio. Le vide laissé par leur disparition n’est pas facile à combler.
Pour Jonathan Maillard, enseignant en philosophie à Lyon, l’annonce a été un choc. « J’ai appris ça en faisant mes courses, raconte-t-il. J’ai pris un paquet comme d’habitude, et sur l’emballage, il y avait un petit message : “Dernière fabrication”. J’ai d’abord cru à une blague. »
Pour lui, ces biscuits sont bien plus qu’un goûter. « Pendant mes années de fac, je révisais avec un paquet posé à côté de mes livres. Le goût de la framboise, un peu artificiel mais si reconnaissable, me rassurait. C’était un rituel. Aujourd’hui, mes élèves me voient parfois en manger pendant les pauses. Je leur dis : “C’est mon antidote contre la mélancolie.” Et maintenant, même ça va disparaître. »
Jonathan a signé la pétition en ligne, lancée par une fan inconditionnelle, Camille Lefebvre, une graphiste de 34 ans. En quelques semaines, plus de 27 000 personnes ont ajouté leur nom, espérant faire plier Deliceo. « On sait que c’est peut-être illusoire, reconnaît-elle, mais on voulait montrer qu’il y a encore une communauté autour de ce produit. Ce n’est pas juste un biscuit, c’est un symbole. »
Sur les réseaux sociaux, des comptes Instagram et TikTok ont vu le jour, dédiés à la mémoire des Fourrés Framboise. Des vidéos montrent des boîtes vides exposées comme des reliques, des dégustations finales filmées en direct, ou encore des hommages artistiques. Une jeune comédienne, Léa Tournier, a même créé un court-métrage intitulé *Le Dernier Fourré*, où un homme découvre que son biscuit préféré a disparu et entame un périple absurde pour en retrouver un. « C’est une fable sur la perte, explique-t-elle. Parfois, ce sont les petites choses qui nous manquent le plus. »
Avec la disparition imminente du produit, les consommateurs cherchent des substituts. Certains se tournent vers des marques concurrentes, comme les “Rouleaux Cerise” de Bon’heure ou les “Mini Coeurs” de Patisud, mais la plupart reconnaissent que le goût n’est pas le même. « C’est similaire, mais il manque quelque chose, confie Jonathan. Peut-être le croquant exact du biscuit, ou cette acidité très spécifique. »
Face à ce vide, une tendance s’impose : la recréation maison. Sur des blogs comme “Cuisine Nostalgie” ou “Le Goût du Passé”, des recettes inspirées des Fourrés Framboise fleurissent. Mathilde Renard, une pâtissière amateur de Grenoble, a publié une version maison après avoir passé des semaines à expérimenter. « J’ai testé une dizaine de combinaisons de farine, de beurre et de gelée. Le secret, c’est la cuisson à basse température pour garder le croustillant. Et pour la garniture, j’utilise de la purée de framboises lyophilisées, mélangée à un peu de pectine. »
Des kits de pâtisserie “Fourrés Framboise DIY” ont même commencé à apparaître sur des plateformes de vente en ligne. Un petit marché de l’émotion, en somme.
Loin de tourner le dos à ses fans, Deliceo a répondu publiquement à la vague d’émotion. Dans un communiqué, l’entreprise affirme : « Nous mesurons l’attachement des consommateurs aux Fourrés Framboise. Cette décision, bien qu’indispensable d’un point de vue stratégique, n’a pas été prise à la légère. »
L’entreprise promet une transition vers des produits plus innovants, plus en phase avec les attentes actuelles. Une nouvelle gamme, baptisée “Deliceo Nature”, devrait être lancée dans les six prochains mois. Elle inclura des biscuits aux fruits rouges, mais sans conservateurs, avec 30 % de sucre en moins et un emballage recyclable. « Nous voulons préserver l’esprit des Fourrés Framboise, tout en modernisant l’expérience », précise Clara Vasseur, directrice marketing de Deliceo.
Pour certains, c’est une trahison. Pour d’autres, une évolution nécessaire. « Je comprends qu’il faille changer, admet Jonathan Maillard, mais j’espère qu’ils n’oublieront pas ce qui faisait la magie de ce biscuit : sa simplicité, son goût franc, son côté un peu rétro. Pas besoin de le rendre “sain” à tout prix. Parfois, le plaisir, c’est aussi une forme de santé. »
Au-delà du goût, les Fourrés Framboise faisaient partie du paysage culturel français. Présents dans les goûters d’enfants, les pauses au travail, les pique-niques de famille, ils incarnaient une forme de douceur accessible, quotidienne. Leur emballage rouge vif, reconnaissable entre mille, était un repère visuel autant qu’un repère gustatif.
Leur disparition marque une étape dans la transformation des habitudes alimentaires. Comme les bonbons au miel, les sodas au cola classique ou les yaourts aux fruits artificiels, les Fourrés Framboise deviennent des vestiges d’une époque où le plaisir gustatif n’était pas constamment mis en balance avec la santé. Ils rejoignent désormais la liste des produits “disparus mais pas oubliés”.
La sociologue Élise Berthier, spécialiste des pratiques alimentaires, observe : « Ces produits, même modestes, structurent notre mémoire sensorielle. Ils sont associés à des lieux, des époques, des relations. Quand ils disparaissent, c’est comme si une couche de notre identité collective s’effaçait. »
Elle cite l’exemple des “Petits Lu” ou des “Chocapic”, qui ont fait l’objet de controverses similaires lors de modifications de recette. « Le consommateur n’achète pas seulement un produit, il achète un souvenir. Et quand ce souvenir est menacé, la réaction est souvent émotionnelle, parfois violente. »
Oui, la production a été officiellement arrêtée par Deliceo. Les derniers paquets disponibles en magasin sont des stocks résiduels. Une fois épuisés, ils ne seront plus réapprovisionnés.
L’entreprise a étudié cette option, mais les coûts de refonte de la ligne de production, combinés à la baisse de la demande, ont rendu le projet économiquement non viable. Adapter la recette aurait nécessité un investissement important pour un retour incertain.
Quelques vendeurs proposent encore des stocks sur des plateformes de revente, mais les prix sont souvent très élevés, parfois jusqu’à dix fois le prix initial. Il s’agit généralement de lots limités ou de collections spéciales.
L’entreprise n’exclut pas une réédition limitée, notamment en édition “nostalgie” ou en collaboration avec des influenceurs. Mais pour l’instant, aucune date n’a été annoncée. Tout dépendra de la réaction du marché face à la nouvelle gamme “Deliceo Nature”.
Non, la recette est un secret industriel. Toutefois, plusieurs amateurs ont réussi à recréer des versions très proches, en s’appuyant sur l’analyse sensorielle et des tests en cuisine. Certaines de ces recettes circulent librement sur internet.
La fin des Fourrés Framboise n’est pas seulement une page qui se tourne dans l’histoire d’une marque. C’est un moment de bascule, où l’on mesure à quel point les objets les plus simples peuvent porter en eux des mondes entiers. Un biscuit, ce n’est pas qu’un encas. C’est un rituel, une pause, un souvenir partagé. Et quand il disparaît, c’est un peu de nous qui s’en va avec lui.
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