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Une plante invasive menace les côtes bretonnes en 2025 : l’appel urgent des experts pour sauver la biodiversité

Sur les falaises bretonnes, là où le vent fouette les herbes rases et où la mer gronde sans relâche, une menace silencieuse gagne du terrain. Elle ne rugit pas, ne gronde pas, mais étend ses tentacules verts avec une régularité implacable. La griffe de sorcière, Carpobrotus edulis, originaire d’Afrique du Sud, s’est installée sur les côtes françaises comme une invitée indésirable qui, au fil des décennies, a oublié les règles de l’hospitalité. Ce succulent aux fleurs flamboyantes, jaunes ou roses, séduit l’œil mais ravage l’écosystème. En Bretagne, son expansion inquiète autant les botanistes que les habitants attachés à la beauté fragile de leurs rivages.

Qu’est-ce que la griffe de sorcière et pourquoi est-elle si dangereuse ?

La griffe de sorcière est une plante succulente aux tiges rampantes, capables de s’étendre sur plusieurs mètres. Elle prospère dans les sols pauvres, sablonneux, là où d’autres végétaux peinent à s’établir. Introduite en Europe au début du XXe siècle pour stabiliser les dunes et prévenir l’érosion, son efficacité a vite tourné au cauchemar écologique. En Bretagne, elle s’est emparée des falaises, des talus côtiers et des zones humides, formant des tapis denses qui étouffent tout sur leur passage.

Contrairement à une idée reçue, cette plante ne se contente pas de pousser vite : elle domine. Elle capte l’eau, monopolise la lumière et modifie la composition du sol, rendant l’environnement hostile aux espèces locales. Le pire ? Elle ne se contente pas de remplacer la flore indigène. Elle détruit tout un équilibre fragile, celui des milieux côtiers bretons, parmi les plus riches d’Europe en biodiversité.

Quels sont les impacts sur la biodiversité bretonne ?

Le Conservatoire Botanique National de Brest suit de près l’évolution de cette invasion. Selon leurs relevés, certaines zones côtières ont perdu jusqu’à 70 % de leur diversité végétale en dix ans. “Ce n’est pas seulement une question de plantes”, précise Élise Le Guen, botaniste au Conservatoire. “Quand on perd les espèces locales comme le statice maritime ou la camomille des dunes, on perd aussi les insectes qui en dépendent, puis les oiseaux qui se nourrissent de ces insectes. C’est un effet domino.”

À Ploumanac’h, sur la côte de granit rose, un sentier autrefois bordé de lavande sauvage et de thym maritime est aujourd’hui presque entièrement recouvert par la griffe de sorcière. “Avant, on entendait les abeilles toute la journée”, raconte Gwenaël Kervella, pêcheur et bénévole dans une association de protection de la nature. “Maintenant, c’est le silence. Cette plante ne produit pas de nectar intéressant pour nos pollinisateurs. Elle est belle, mais vide.”

Même les mouettes rieuses, habituées à nicher dans les touffes d’herbe rase, trouvent de moins en moins de refuges. “Elles ont besoin de zones claires pour surveiller les prédateurs”, explique Aodren Le Moal, ornithologue bénévole. “La griffe de sorcière forme une masse trop compacte. Elles fuient.”

Pourquoi les experts sonnent-ils l’alerte ?

Patrick Camus, écologue spécialisé dans les milieux côtiers, et Christian Fontaine, chercheur en gestion des espèces invasives, ont lancé un appel solennel en 2023. “Nous sommes à un point de bascule”, affirme Patrick Camus. “Si nous ne réagissons pas maintenant, dans cinq ans, il sera trop tard. Cette plante ne se contente plus de coloniser les zones dégradées. Elle entre dans les espaces protégés.”

Leur diagnostic est sans appel : la griffe de sorcière progresse de 15 à 20 % par an dans certaines régions. Pire, elle se reproduit à la fois par graines et par fragmentation. Un simple morceau de tige arraché et transporté par le vent ou par un promeneur peut donner naissance à une nouvelle colonie. “C’est une machine à coloniser”, résume Christian Fontaine. “Et elle est parfaitement adaptée à notre climat breton, humide et doux.”

Existe-t-il des solutions naturelles pour lutter contre cette invasion ?

Oui, et elles sont à la fois simples, efficaces et respectueuses de l’environnement. L’arrachage manuel, bien que laborieux, reste la méthode la plus recommandée. “Il faut agir comme un chirurgien”, dit Élise Le Guen. “Ne pas se contenter de tirer la plante à la surface. Il faut extraire toutes les racines, parfois jusqu’à 30 centimètres de profondeur.”

Les bénévoles de l’association “Côtes Vivantes”, basée à Crozon, ont mis au point une méthode en trois étapes : arrachage complet, paillage épais avec des déchets végétaux locaux, puis surveillance mensuelle. “On revient tous les deux mois sur les zones traitées”, explique Maelle Rozec, coordinatrice des chantiers citoyens. “On a vu des résultats en six mois. Des espèces comme l’œillet des dunes ont recommencé à pousser.”

Le paillage joue un rôle crucial. En recouvrant les sols dégagés, il empêche la lumière d’atteindre les graines dormantes de la griffe de sorcière, tout en favorisant le retour des plantes indigènes. “On utilise du compost de varech ou des tontes de gazon local”, précise Gwenaël Kervella. “Rien de chimique. On veut restaurer, pas polluer.”

Peut-on utiliser la griffe de sorcière de manière positive ?

La question divise. Certains jardiniers, comme Louan Le Berre, paysagiste à Concarneau, ont tenté de domestiquer la plante. “Dans un jardin clos, avec des bacs surélevés, elle peut avoir sa place”, admet-il. “Elle résiste à tout, ne demande presque pas d’eau, et ses fleurs sont spectaculaires. Mais il faut la contenir. Une seule tige qui touche le sol, et c’est la catastrophe.”

D’autres explorent des usages plus originaux. À Douarnenez, un collectif de permaculteurs expérimente l’utilisation des feuilles de griffe de sorcière comme couvre-sol temporaire dans les zones fortement érodées. “On l’utilise comme une plante pionnière, mais on l’enlève avant qu’elle ne s’installe”, précise Maelle Rozec. “C’est risqué, mais encadré, ça peut fonctionner.”

Cependant, la majorité des experts restent prudents. “Toute utilisation doit être extrêmement contrôlée”, insiste Christian Fontaine. “On ne peut pas se permettre de normaliser une espèce invasive, même si elle a des qualités.”

Comment mobiliser la population autour de ce combat ?

La réponse vient du terrain. Depuis 2022, plusieurs communes bretonnes ont lancé des campagnes de sensibilisation. À Locquirec, par exemple, des panneaux pédagogiques montrent le contraste entre une falaise envahie et une falaise restaurée. Des ateliers sont organisés pour apprendre à reconnaître la plante et à l’arracher correctement.

Les écoles s’impliquent aussi. À Roscoff, les élèves de CM2 du collège Sainte-Anne participent chaque printemps à un “nettoyage vert”. “On leur apprend que la nature, c’est aussi une responsabilité”, dit leur enseignante, Morgane Le Floch. “Ils sont fiers de sauver leurs falaises.”

Les autorités locales suivent. La communauté de communes du Pays d’Iroise a intégré la lutte contre les espèces invasives dans son plan climat. “Ce n’est pas un sujet secondaire”, affirme le vice-président à l’environnement, Yannick Le Dantec. “La biodiversité, c’est notre patrimoine. Et elle est menacée.”

Le futur des côtes bretonnes est-il encore sauvable ?

Oui, mais à condition d’agir vite et ensemble. La griffe de sorcière n’est pas invincible. Elle peut être contenue, voire repoussée, grâce à des actions simples, répétées et coordonnées. “Ce n’est pas une bataille perdue”, affirme Patrick Camus. “Mais elle demande de la persévérance. Il faut voir ça comme un marathon, pas un sprint.”

Chaque jardinier, chaque promeneur, chaque élu peut faire la différence. En refusant de planter la griffe de sorcière dans son jardin, en signalant une nouvelle colonie, en participant à un chantier de nettoyage, on contribue à la préservation d’un écosystème unique. “Je me bats pour que mes enfants puissent encore voir des papillons sur les falaises”, dit Gwenaël Kervella. “Ce n’est pas grand-chose. Mais c’est tout.”

A retenir

Qu’est-ce que la griffe de sorcière ?

La griffe de sorcière, ou Carpobrotus edulis, est une plante succulente originaire d’Afrique du Sud, introduite en Europe pour stabiliser les sols. Devenue invasive, elle forme des tapis denses sur les côtes, étouffant la flore locale.

Pourquoi est-elle dangereuse pour l’environnement ?

Elle élimine les plantes indigènes en leur volant lumière, eau et nutriments. Son expansion perturbe toute la chaîne alimentaire, affectant insectes, oiseaux et la stabilité des écosystèmes côtiers.

Peut-on l’éradiquer sans produits chimiques ?

Oui, l’arrachage manuel, suivi d’un paillage et d’une surveillance régulière, est une méthode naturelle et efficace. Elle évite la pollution et favorise le retour des espèces locales.

Est-il possible de l’utiliser dans les jardins ?

Seulement dans des conditions très contrôlées, comme en bac fermé. En espace ouvert ou naturel, son introduction est fortement déconseillée, voire interdite dans certaines zones protégées.

Comment peut-on agir concrètement ?

En apprenant à reconnaître la plante, en évitant de la planter, en participant à des opérations d’arrachage ou en sensibilisant son entourage. La mobilisation citoyenne est essentielle pour enrayer son expansion.

Anita

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