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En plein cœur de la Normandie, trois chantiers prometteurs de logements adaptés aux personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie ont été brusquement interrompus. Une situation inédite pour Résidences comme Toit, une société spécialisée dans l’habitat inclusif, qui dénonce aujourd’hui un effondrement de son financement bancaire. Ce revirement, survenu en juin, a plongé les équipes dans l’incompréhension et les territoires concernés dans l’incertitude. À Alençon, Saint-Lô et Le Havre, les pelleteuses sont à l’arrêt, les entreprises ont quitté les sites, et les futurs résidents attendent des réponses. Derrière cette crise financière, se dessine une question plus large : comment des projets d’intérêt social, validés par les collectivités et attendus par les populations, peuvent-ils être mis en suspens par un simple retrait de banque ?
Les trois chantiers de Résidences comme Toit, répartis entre l’Orne, la Manche et la Seine-Maritime, avaient tous reçu les autorisations nécessaires et bénéficiaient d’un appui local fort. À Alençon, le projet consistait en la construction d’une résidence de 33 logements, spécialement conçus pour accueillir des personnes âgées ou en situation de handicap. À Saint-Lô, 29 appartements devaient offrir un cadre de vie sécurisé, avec des aménagements ergonomiques et un accompagnement social. Le Havre, quant à lui, devait accueillir 25 logements dans un quartier en pleine mutation urbaine.
Valérie Mellé, directrice générale de l’entreprise depuis sa création en 2019, souligne que ces projets étaient solidement ancrés dans les besoins locaux . Chaque site avait fait l’objet d’études d’impact, de concertations avec les services sociaux, et d’engagements de partenaires publics. Nous avions même obtenu des subventions de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) et des aides de l’État dans le cadre du plan Un toit pour tous . Rien ne laissait présager un tel coup d’arrêt.
Le point de rupture ? Le retrait de la banque partenaire, qui a suspendu le déblocage des fonds sans préavis. Selon Valérie Mellé, cela ne nous était encore jamais arrivé . L’entreprise, basée à Metz, avait pourtant construit sa réputation sur des réalisations rigoureuses, respectant les délais et les normes. Nous avons toujours honoré nos engagements financiers. Aujourd’hui, nous sommes pris au piège d’un système opaque, où une décision bancaire peut ruiner des années de travail.
Derrière les chiffres, ce sont des vies qui sont suspendues. Parmi les futurs résidents, certains attendaient ces logements depuis des mois, voire des années. C’est le cas de Jeanne Lefebvre, 68 ans, atteinte de sclérose en plaques, qui vivait chez sa fille à Saint-Lô. Je ne pouvais plus monter les escaliers, la salle de bain n’était pas adaptée. On m’avait dit que je pourrais emménager en septembre, avec un ascenseur, une douche à l’italienne, un interphone relié à l’extérieur. Aujourd’hui, plus rien. Je me sens abandonnée.
À Alençon, c’est Franck Delorme, ancien infirmier devenu paraplégique après un accident, qui espérait retrouver une certaine autonomie. Je ne demande pas le luxe, juste un logement où je peux vivre seul sans dépendre de mes proches. On m’a fait miroiter une date, puis une autre. Maintenant, on me dit qu’il n’y a plus de financement. C’est humiliant.
Ces témoignages illustrent une réalité trop souvent ignorée : les personnes en situation de handicap ou en perte d’autonomie ne manquent pas de volonté, mais de solutions concrètes. Les logements adaptés restent rares, et chaque projet abandonné creuse un peu plus le fossé entre les politiques affichées et les réalités vécues.
Les projets de logements adaptés reposent sur un équilibre fragile entre subventions publiques, prêts bancaires et financements privés. Résidences comme Toit, comme de nombreuses structures du secteur, s’appuie sur des prêts d’investissement garantis par des cautionnements publics. En théorie, ces dispositifs devraient sécuriser les banques. En pratique, la décision d’un établissement bancaire peut tout remettre en cause.
Nous avions un montage financier validé par plusieurs organismes , précise Valérie Mellé. La banque savait parfaitement à quoi elle s’engageait. Le retrait soudain de leur part nous laisse sans ressource. Nous avons tenté de négocier, de trouver des solutions alternatives, mais le temps presse. Les entreprises du BTP ont des coûts fixes, elles ne peuvent pas rester indéfiniment sur un chantier à l’arrêt.
Un cadre juridique existe pour encadrer ces financements, notamment via les conventions signées entre bailleurs sociaux, collectivités et établissements bancaires. Pourtant, dans les faits, les banques conservent une marge de manœuvre importante. Elles peuvent invoquer des risques économiques, des révisions internes de stratégie, ou des tensions sur les taux d’intérêt , explique Nicolas Berthier, économiste spécialisé dans le logement. Et lorsqu’elles se retirent, les autres acteurs sont souvent trop fragiles pour prendre le relais rapidement.
À Saint-Lô, la mairie avait fait de l’accessibilité un pilier de sa politique urbaine. Nous avions identifié un besoin criant , témoigne Élodie Carpentier, adjointe au logement. Les maisons de retraite sont saturées, les logements classiques ne répondent pas aux besoins des personnes âgées ou handicapées. Ce projet était une réponse concrète. Son arrêt est un coup dur pour notre ambition inclusive.
À Alençon, le maire a qualifié la situation de scandaleux dans un courrier adressé au préfet. Nous avons mis à disposition un terrain communal, nous avons accéléré les procédures d’urbanisme. Et aujourd’hui, tout s’effondre à cause d’un acteur privé ? Cela montre les limites du modèle actuel.
Le Havre, ville en pleine transformation, voyait dans ce projet un élément de diversité sociale. Nous voulons éviter les ghettos de la précarité ou de l’isolement , souligne Malik Benarfa, urbaniste municipal. Un logement adapté, c’est aussi un levier d’insertion, d’emploi, de lien social. Lorsqu’on bloque ce type de projet, on bloque une partie de la ville elle-même.
Plusieurs pistes sont explorées. Résidences comme Toit a saisi la médiation du crédit, une procédure permettant d’obtenir une médiation entre l’entreprise et l’établissement bancaire. Nous espérons que cela permettra de rétablir un dialogue , indique Valérie Mellé. En parallèle, des discussions sont en cours avec d’autres banques, notamment des établissements mutualistes ou des banques publiques comme la Banque des territoires.
Des collectivités envisagent aussi de prendre le relais directement. Si la solution privée échoue, il faut que le public assume ses responsabilités , affirme Élodie Carpentier. Des fonds d’urgence pourraient être mobilisés via les conseils départementaux, qui ont en charge l’aide sociale à l’autonomie.
À plus long terme, des voix s’élèvent pour réformer le système de financement. Il faut des garde-fous , plaide Nicolas Berthier. Par exemple, des clauses de solidarité entre banques, ou des fonds de garantie spécifiques pour les projets d’intérêt social. On ne peut pas laisser des vies en suspens à cause d’un aléa bancaire.
Cette situation met en lumière une faille structurelle : la dépendance des projets sociaux à des décisions financières souvent déconnectées des enjeux territoriaux. Nous vivons une forme de désincarnation du financement , analyse Clara Vasseur, sociologue spécialisée dans les politiques du logement. Les banques prennent des décisions basées sur des modèles de risque abstraits, sans considérer l’impact humain.
Elle appelle à une refondation du partenariat public-privé , où les objectifs sociaux seraient mieux intégrés aux critères de financement. Il faut que les banques soient tenues de justifier leurs retraits, et que des mécanismes de recours soient plus rapides.
Pour Valérie Mellé, cette crise est aussi une alerte. Nous ne sommes pas les seuls à être fragilisés. Combien d’autres associations, de petites entreprises, sont-elles en train de perdre des projets pour les mêmes raisons ? Il faut que cela cesse.
L’arrêt des trois chantiers normands de Résidences comme Toit n’est pas qu’un incident financier. C’est un symptôme d’un système où l’humain peine à s’imposer face aux logiques de marché. Alors que les besoins en logements adaptés ne cessent de croître, avec le vieillissement de la population et l’évolution des handicaps, il devient urgent de repenser les mécanismes de financement. Des vies sont en jeu, des dignités sont en suspens. Et chaque retrait bancaire, aussi justifié soit-il sur le papier, creuse un peu plus le fossé entre les politiques de l’inclusion et leurs réalités concrètes.
Trois projets de logements adaptés sont actuellement à l’arrêt : un à Alençon (33 logements), un à Saint-Lô (29 logements) et un au Havre (25 logements). Tous étaient portés par Résidences comme Toit, une entreprise spécialisée dans l’habitat inclusif.
La banque partenaire a suspendu le déblocage des fonds sans préavis, invoquant probablement des révisions internes de stratégie ou des risques financiers. Aucune explication officielle n’a été fournie, ce qui rend la situation particulièrement difficile pour l’entreprise.
De nombreuses personnes, souvent en situation de handicap ou en perte d’autonomie, attendaient ces logements pour retrouver une certaine indépendance. L’arrêt des chantiers les plonge dans l’incertitude et l’isolement, alors qu’ils avaient souvent quitté leur ancien logement en prévision de l’emménagement.
Oui. Résidences comme Toit a saisi la médiation du crédit et cherche de nouveaux partenaires bancaires. Des collectivités locales envisagent aussi d’intervenir directement via des fonds d’urgence ou des prises de participation dans les projets.
Les arrêts de chantiers pour cause de financement sont rares mais en augmentation. Avec la hausse des taux d’intérêt et la pression sur les bilans bancaires, les projets à faible rentabilité immédiate, même d’intérêt social, sont de plus en plus menacés.
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