Le débat sur la suppression d’un jour férié au profit d’une seconde journée de solidarité pour les Ehpad agite les institutions françaises. Entre crise financière du secteur et préservation des droits des travailleurs, la proposition suscite des réactions contrastées. Plongée dans un sujet aux multiples ramifications.
Pourquoi une deuxième journée de solidarité est-elle envisagée ?
Les Ehpad français traversent une tempête financière sans précédent. Avec un déficit avoisinant 800 millions d’euros, ces structures peinent à offrir des conditions dignes aux résidents. Mathilde Vercambre, aide-soignante dans un établissement public lyonnais, témoigne : « Nous manquons de tout – matériel, personnel, temps. Les familles paient déjà cher, mais ça ne suffit pas. »
Des besoins croissants face au vieillissement démographique
La France compte 15 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, un chiffre qui doublera d’ici 2050. Les coûts de prise en charge explosent, tandis que les financements stagnent. « Notre Ehpad refuse des admissions chaque semaine par manque de places », déplore Julien Amiard, directeur d’un établissement en Dordogne.
Quelles alternatives à la suppression d’un jour férié ?
La sénatrice écologiste Anne Souyris défend une refonte complète du système : « Taxer les plus-values immobilières des seniors aisés ou réallouer des crédits publics serait plus juste qu’exploiter les salariés. » Une position partagée par Élodie Raban, syndicaliste CGT : « Pourquoi toujours faire payer les mêmes ? Les multinationales versent des dividendes record tandis qu’on nous demande de travailler gratuitement. »
Le modèle allemand comme inspiration ?
Outre-Rhin, un système de cotisations sociales spécifiques finance la dépendance depuis 1995. « Cela génère 12 milliards annuels sans toucher aux jours fériés », souligne Karl Brenner, expert en politiques gérontologiques. Une piste que la France hésite encore à emprunter.
Comment les salariés vivraient-ils cette réforme ?
Selon une enquête IFOP, 68% des actifs s’opposent à la mesure. Parmi eux, Thomas Lermer, cariste dans la logistique : « Je travaille déjà 45h par semaine. Perdre un jour de repos serait dur psychologiquement et physiquement. » À l’inverse, certains y voient un mal nécessaire : « Si ça peut sauver des vies dans les Ehpad, je suis prêt à faire ce geste », estime Marc-Olivier Flandin, technicien en télécommunications.
Un impact économique en cascade
Les économistes alertent sur les conséquences macroéconomiques : réduction du pouvoir d’achat, baisse de la consommation durant les ponts, impact sur le tourisme intérieur. « C’est un faux calcul », analyse la professeure d’économie Camille Vasseur. « L’État récupérerait 2,5 milliards, mais en perdrait 1,8 en TVA et impôts sur la consommation. »
A retenir
Quel est l’état financier des Ehpad ?
Près de 60% des Ehpad publics sont déficitaires, avec un manque à gagner moyen de 15€ par résident et par jour selon la Cour des comptes.
Quand serait appliquée cette mesure ?
Si la loi passe, la réforme pourrait entrer en vigueur dès 2026, probablement en supprimant le lundi de Pentecôte comme en 2004.
Existe-t-il des précédents en Europe ?
Plusieurs pays ont instauré des contributions spécifiques pour la dépendance, mais aucun n’a utilisé le mécanisme des jours fériés comme la France.
Conclusion
Ce débat cristallise des enjeux plus larges : quelle solidarité intergénérationnelle dans une société vieillissante ? Comment concilier justice sociale et efficacité économique ? Alors que les parlementaires planchent sur le texte, une chose est sûre : la solution devra faire plus que colmater les brèches d’un système à bout de souffle.