En France, les discussions autour des retraites mettent rarement en lumière certaines professions pourtant indispensables au bon fonctionnement de notre société. Les préparateurs en pharmacie en sont un parfait exemple : des acteurs clés de la santé publique, mais dont les conditions de retraite restent alarmantes. À travers des témoignages et des analyses, cet article explore les défis auxquels ils font face et esquisse des pistes pour un avenir plus juste.
Pourquoi la retraite des préparateurs en pharmacie est-elle si précaire ?
Rencontre avec Aurélien Vasseur, préparateur en pharmacie depuis 1985 dans le Nord-Pas-de-Calais. À 61 ans, il pensait pouvoir prendre sa retraite sereinement, mais les chiffres ont été un choc : « Avec 820 euros mensuels après 38 ans de labeur, je dois prolonger mon activité. Comment expliquer ça à mes petits-enfants ? »
Un métier intense, une reconnaissance limitée
Entre la gestion des ordonnances, le conseil personnalisé aux patients et la rigueur des préparations, leur rôle va bien au-delà de ce que suggèrent les grilles salariales. Pourtant, cette polyvalence ne se traduit ni par des salaires élevés ni par des pensions conséquentes.
Quels sont les facteurs qui pénalisent leurs pensions ?
Trois éléments clés creusent l’écart :
- Des rémunérations souvent proches du SMIC
- Des carrières fractionnées (notamment pour 76% de femmes dans la profession)
- Un système de calcul désavantageux pour les métiers à progression salariale limitée
Sophie Lemaitre, 58 ans et mère de trois enfants, témoigne : « J’ai cumulé les temps partiels pour élever ma famille. Résultat ? Une retraite estimée à 650 euros. Personne ne nous avait prévenus. »
Comment transformer ce système inéquitable ?
Contrairement aux médecins ou aux infirmiers, les préparateurs restent invisibles dans les débats publics. Pourtant, comme le souligne le Dr Étienne Roux, pharmacien : « Sans eux, nos officines s’effondreraient en 48 heures. Leur expertise sur les interactions médicamenteuses sauve des vies quotidiennement. »
Propositions concrètes
- Instaurer des bonifications pour les métiers à forte utilité sociale
- Revaloriser les grilles salariales en pharmacie
- Créer un régime complémentaire obligatoire
À retenir
Les préparateurs ont-ils droit à une retraite anticipée ?
Non, contrairement à d’autres professions de santé, ils ne bénéficient d’aucun dispositif de départ anticipé malgré la pénibilité physique (station debout prolongée, gestes répétitifs).
Existe-t-il des disparités régionales ?
Oui. Les préparateurs ruraaux subissent une double peine : salaires plus bas que dans les grandes villes et moins d’opportunités d’évolution.
La réforme des retraites de 2023 change-t-elle la donne ?
Très marginalement. L’allongement de la durée de cotisation aggrave même la situation pour certains, comme l’explique Kevin Torrès, syndicaliste : « On nous demande de travailler plus longtemps pour… toucher moins. »
Vers une prise de conscience collective
Le cas des préparateurs en pharmacie révèle une faille béante dans notre modèle social. Quand des professionnels dévoués se retrouvent à devoir choisir entre travailler jusqu’à 70 ans ou vivre dans la précarité, c’est tout notre contrat générationnel qui est en jeu. Des solutions existent – reste à trouver la volonté politique pour les mettre en œuvre.