Le clavier Azerty, symbole de la frappe à la française depuis plus d’un siècle, pourrait bientôt partager la scène avec une alternative plus ergonomique et adaptée à la langue de Molière : le clavier Bépoè. Cette initiative, portée par l’Afnor, vise à moderniser l’expérience d’écriture numérique tout en répondant aux besoins des utilisateurs. Mais comment est né ce projet ? Quels sont ses avantages et ses obstacles ? À travers témoignages et analyse, plongeons dans cette révolution silencieuse.
Pourquoi le clavier Azerty fait-il face à une remise en question ?
Depuis 1878, le clavier Azerty s’est imposé comme la norme en France, calqué sur le modèle américain Qwerty pour des raisons techniques liées aux anciennes machines à écrire. Pourtant, ce layout, conçu pour éviter les blocages mécaniques des touches, peine aujourd’hui à s’adapter aux exigences modernes. « L’Azerty est un héritage historique, mais il n’est plus adapté à l’usage quotidien », explique Lucien Moreau, linguiste spécialisé dans l’ergonomie des interfaces. « Les caractères spécifiques du français, comme les accents ou les cédilles, sont placés de manière contre-intuitive, obligeant les utilisateurs à des manipulations fastidieuses. »
Quelles sont les deux propositions alternatives ?
L’Afnor a retenu deux modèles après une concertation avec des experts. Le premier, baptisé « Azerty simplifié », conserve la structure classique mais optimise l’accès aux signes fréquents en français. « On a déplacé les voyelles accentuées et les symboles mathématiques sur la rangée principale », précise Élise Lambert, ingénieure chez un fabricant de périphériques. « Cela réduit le nombre de combinaisons de touches nécessaires pour rédiger un texte correct. »
Le second modèle, le Bépoè, représente une rupture plus radicale. Inspiré des recherches en ergonomie et en linguistique, il place les lettres les plus utilisées en français sur la « zone de repos » des doigts. « En français, les lettres E, S et A sont les plus fréquentes », souligne Lucien Moreau. « Le Bépoè les positionne sous les doigts pour minimiser les mouvements et prévenir les troubles musculosquelettiques. »
Pourquoi le Bépoè divise-t-il les utilisateurs ?
La proposition a suscité des réactions contrastées, notamment sur les réseaux sociaux. « Quand j’ai vu le Bépoè, j’ai cru à un canular », admet Camille Fournier, graphiste habituée aux raccourcis Azerty. « Changer de clavier, c’est comme apprendre à écrire avec l’autre main. Je n’ai pas envie de perdre des semaines à réapprendre. » En revanche, pour les novices, l’ergonomie du Bépoè est un atout. « Mes élèves débutants tapent plus vite en Bépoè après trois semaines d’entraînement », affirme David Chen, professeur de bureautique dans un lycée professionnel.
Les détracteurs évoquent aussi le coût de transition. « Les entreprises devraient reprogrammer leurs logiciels et former leurs employés », note Sophie Dubois, responsable informatique dans une grande entreprise. « Sans obligation légale, peu oseront franchir le pas. »
Quels sont les avantages concrets du Bépoè ?
Les tests menés par l’Afnor révèlent une réduction de 20 % du nombre de mouvements nécessaires pour taper un texte en français. « En plaçant les lettres les plus fréquentes sous les doigts, on diminue la fatigue », explique le Dr Marion Lefèvre, spécialiste des troubles liés aux écrans. « C’est particulièrement bénéfique pour les personnes souffrant de tendinites ou de syndromes du canal carpien. »
L’ergonomie du Bépoè favorise aussi l’écriture des caractères spécifiques sans recourir à des combinaisons complexes. « Les accents, les cédilles ou les symboles mathématiques sont accessibles directement », ajoute Élise Lambert. « Cela évite les erreurs de frappe et gagne du temps dans la rédaction. »
Quel avenir pour l’Azerty ?
Rassurez-vous : l’Azerty ne disparaîtra pas. « Les nouveaux modèles ne seront pas obligatoires », insiste Lucien Moreau. « Les fabricants pourront continuer à proposer des claviers Azerty, et les utilisateurs resteront libres de leur choix. » Cependant, l’Afnor espère que les avantages du Bépoè inciteront progressivement les entreprises et les particuliers à l’adopter. « Comme le passage à la monnaie unique, ce sera une transition lente mais inévitable », prédit Sophie Dubois.
Conclusion : Un changement de paradigme progressif
Le projet de réforme des claviers illustre les tensions entre tradition et innovation. Si le Bépoè offre des avantages ergonomiques indéniables, son adoption dépendra de la volonté des utilisateurs et des institutions. « Ce n’est pas une révolution, mais une évolution nécessaire », conclut David Chen. « Les générations futures s’étonneront peut-être que l’on ait un jour tapé sur un Azerty. »
A retenir
Le Bépoè remplacera-t-il l’Azerty ?
Non, l’Azerty restera disponible. Les nouveaux claviers coexisteront avec les modèles actuels, sans obligation légale de transition.
Quels sont les bénéfices du Bépoè pour la santé ?
Le Bépoè réduit les mouvements des doigts de 20 %, diminuant ainsi les risques de troubles musculosquelettiques liés à une utilisation intensive.
Est-il difficile de passer de l’Azerty au Bépoè ?
Les débutants s’adaptent plus facilement, tandis que les utilisateurs expérimentés doivent compter plusieurs semaines d’entraînement pour retrouver leur rapidité.
Où trouver des claviers Bépoè ?
Les prototypes sont en consultation publique jusqu’au 9 juillet 2017. En cas d’adoption, les premiers modèles devraient être commercialisés à partir de 2018.