Un billet de 50€ sur le pare-brise : le piège des voleurs qui agit dès 2025

Une feuille pliée en huit se glisse sur le pare-brise et, lorsqu’elle se déploie, elle ressemble à un billet bien réel. Sur le parking du centre-commercial Symphonie, à Nantes, Charlotte Berteau, 25 ans, y a vu « un 50 euros qui brillait ». Obligeante, elle sortit pour attraper l’argent. Quatre secondes plus tard, la portière passager claquait déjà et un rameur musclé dérobait son sac à main posé sur le siège avant. Scenario total : moins de vingt secondes. Depuis quelques mois, ce tour de passe-passe se répète jusque dans les villages d’à peine 2 000 habitants en France. Il suffit d’un billet d’ardoise, d’un complice discret et d’un automobiliste pressé ou rêveur.

Quel est exactement le plan d’action des voleurs ?

Les acteurs se partagent trois rôles bien réglés : un poseur, un rabatteur et un chauffeur. Le poseur attend la fin des courses, lorsque les clients regagnent leur véhicule. Il dépose le faux billet coincé sous l’essuie-glace. Un coin apparent attire l’attention. Comme nos yeux percèvent immédiatement le contraste entre le billet et le verre clair, la réaction est quasi réflexe : sortir le papier.

C’est alors que le rabatteur actionne l’interrupteur psychologique. Il peut freiner brusquement devant la voiture, encombrer la sortie avec une poussette ou simplement s’approcher en faisant mine de chercher l’argent qu’il a « perdu ». Le but est de créer un court laps d’indécision. Les enquêteurs de Nantes ont retrouvé sur vidéosöurveïllance des séquences où le rabatteur parle fort : « Pardon, c’est peut-être à moi ce billet ! » Charlotte se souvient : « J’ai lâché l’accélérateur pour chercher une réponse polie. »

Derrière l’aile arrière gauche, le troisième larron a déjà ouvert la portière. Ses doigts gyrophares évitent le clic central. En six secondes, le forfait est réalisé : sac à main, ordinateur, maison, clavier de la sécurité sociale, boîte à bijoux en carton album…

Comment échapper à l’appât ?

Marcher jusqu’à sa voiture en tenant ses clés permet déjà de déjouer la manoeuvre. Aurélien Costa, employé de banque à Bordeaux, raconte qu’il a pris l’habitude de, « comme mes collègues, regarder deux fois l’essuie-glace avant d’ouvrir ». L’effet visuel du faux billet s’amoindrit si on réalise, même à distance, qu’une feuille pliée ne peut rester coincée à la rainure. Avant d’aborder la voiture, il scanne l’environnement à 360°. Course ou non, il ne quitte pas l’allée tant que ses yeux n’ont pas vu la voiture, les lieux et, surtout, les silhouettes.

La deuxième règle reste plus pragmatique encore : verrouiller immédiatement à l’intérieur du véhicule. Matthieu Brochard, pompier volontaire en Bretagne, applique un protocole militaire : « Je verrouille, je passe, je démarre, puis seulement j’observe l’aide-google à WhatsApp. » Pour lui, l’astronomie de l’année : une demi-seconde décroché le phone

Dans quels lieux le stratagème fait-il le plus de dégâts ?

Parking souterrains mal éclairés, stations-service 24/24 ou entrées d’hypermarchés après 18 h 30 : les passe-murailles moderne choisissent la pénombre et la fatigue humaine. Devant la médiathèque Arthemis d’Arras, Lieuxreyx Rangueil, retraité sympathique, perdit son appareil photo pendant son heure de gym aquatique. « J’ai passé six mois à sauver pour acheter ce boîtier. C’était glissé dans le sac à langer présenté comme effet poupée russe », soupire-t-il. Les images de surveillance ont malheureusement manqué l’éclairage, laissant un mystère à peine l’épaisseur d’un billet analysé.

Les zones franches, gratuites et ouvertes aux camionnettes, constituent également des stations de tremplin avant des déplacements à travers l’Europe, notamment vers l’Espagne où le même procédé a été rapporté.

Que faire au moment même où l’onde de choc survient ?

Le premier reflexe à éviter : crier ou courir. Cela maintient le choc émotionnel, source d’un sevrage immédiat. Christine Lohier, agent de police municipale, formule la triple approche : « Verrouillez, appelez la police, signalez. »

Appuyer sur « 17 » alimente le fichier réel. Il faut décrire les couleurs de vêtements, les tâches de tatouages, les inscriptions des casquettes (Oakland Raiders, etc.). Les compte-gouttes et détails indiquent au service RCMP nationale où envoyer le drone de surveillance. Trois signalements distincts ont permis à la brigade de Toulouse d’identifier une équipe grâce au motif de leurs baskets blanches ringardes, plus durables face à la pluie.

Le deuxième cours d’action : photographier immédiatement l’intérieur de la voiture. Pour l’assurance ainsi que le paiement de la franchise. Christine explique : « Si la vitre n’est pas brisée, on parle de vol. Sous assurance auto. Si la vitre est fracturée, c’est vandalisme. » Chaque étiquetage influence le remboursement.

Comment suivre les données volées ?

Un smartphone contient plus d’objets de haute valeur que les Louvre. Cartes bancaires, photographies, documents d’identité et géolocalisations jusqu’aux portefeuilles numériques constituent la boîte noire moderne. En 2024, un simple paramètre d’effacement à distance via Find My Device (Google) ou Find My (Apple) permet de nettoyer les dossiers à distance, empêchant toute revente des données. Laure Garnier, consultante en cybersécurité à Lyon, souligne : « Activez l’option “Verrouillage” sous Google ou “Mode Perdu”. C’est comme placer un clic asymétrique sans avoir à rappeler l’assureur. »

Lorsqu’une victime ignore la perte immédiate de ses cartes bancaires, il est utile de composer le numéro de rétractation de la banque (3930) avant même de boucler. Cela reste accessible même si le téléphone a été volé, la banque allouant une ligne dédiée à partir du fixe ou d’un autre mobile. Les refus de paiements seront signalés automatiquement, facturés par la banque.

Pourquoi la sensibilisation garde l’arnaque sous son chenil ?

Hugo Pelaprat, cadre commercial à Rennes, a découvert l’arnaque via un groupe WhatsApp régional de conducteurs. « On partage les lieux à risque, les faux billets retrouvés et même les vidéos dégradées des caméras de parking. » Cette rumeur digitalisée remonte la pente médiatique, empêchant les malfaiteurs de s’installer dans un même endroit plus longtemps. Les gérants de centre commercial ont inauguré des campagnes d’affiches en façade. « 50 € ou piège ? » lit-on en coquelicot fluo.

Les compagnies de déménagement, Uber, taxi et livreurs ont aussi intégré ces consignes dans des briefings hebdomadaires. Le partage des informations est devenu aussi viral que l’invention sophistiquée du stratagème.

Conclusion : quand la chance devient votre pire ennemie

Derrière un simple pli de papier piment, les voleurs misent sur l’aveuglement sensoriel : une couleur vive attire l’œil, et l’idée de gain immédiat pousse à l’extérieur du véhicule. Parier sur la vigilance banale révèle souvent le meilleur rempart : une porte verrouillée, un regard sur les environs et une vitesse d’exécution réduite à zéro. La liberté de circuler en voiture ne doit jamais se transformer en un jeu de devinettes où le prix payé est la sécurité de votre sphère privée. Partager ces gestes simples est la plus belle portée d’amande secrète aujourd’hui.

A retenir

Quel est le montant réel sur le billet ?

Rien. Des imitations de 10, de 20 ou de 50 euros sont simplement imprimées sur du papier compact et pliées pour créer un « montant réel ». En général, ce sont de simples feuilles blanches.

Le stratagème fonctionne-t-il aussi le jour ?

Oui. Ces voleurs n’attendent pas la nuit. Ils se fondent dans la foule et jouent sur les déplacements quotidiens.

Le numéro de police est-il gratuit ?

Un appel au 17 est gratuit depuis tous les téléphones fixe ou mobile.

Les assureurs remboursent-ils sans ordonnance ?

Non, il est impératif de porter plainte pour ouvrir le dossier remboursement. Sans certificat de police, l’assureur exécutera une franchise ou un refus.