70 % des gens ne utilisent pas de papier toilette : la tendance s’impose en 2025

Chaque jour, des milliards de personnes dans le monde accomplissent un geste banal : se nettoyer après être allé aux toilettes. Pourtant, derrière cette routine silencieuse se cache une divergence culturelle, sanitaire et environnementale profonde. Alors que l’usage du papier toilette semble s’imposer comme une norme dans certaines régions, notamment en Occident, la majorité de la population mondiale — entre 70 % et 75 % — opte pour une méthode bien plus ancienne, mais aussi plus efficace : l’eau. De Tokyo à Marrakech, de Milan à Séoul, les pratiques varient, révélant des réalités hygiéniques, écologiques et corporelles souvent méconnues. Cet article explore les raisons pour lesquelles l’eau pourrait bien être l’avenir des toilettes, à la fois pour notre santé et pour la planète.

Comment le monde se nettoie-t-il après les toilettes ?

La réponse à cette question simple est étonnamment complexe. En Asie, l’utilisation de l’eau est la norme depuis des siècles. Au Japon, les toilettes high-tech équipées de jets d’eau, de chauffage du siège et de séchage automatique sont omniprésentes, même dans les logements modestes. Singapour, quant à lui, a intégré ces dispositifs dans ses normes sanitaires modernes, alliant hygiène et innovation. En Inde, au Pakistan ou en Indonésie, le bidon d’eau — souvent appelé « lota » — est un objet du quotidien, utilisé avec précision et économie d’eau.

En Europe, les habitudes sont plus contrastées. En Italie, le bidet fait encore partie de nombreux intérieurs, bien que sa présence diminue dans les nouvelles constructions. Léa Bianchi, architecte d’intérieur à Bologne, témoigne : « Chez mes parents, le bidet était sacré. Aujourd’hui, quand je conçois des salles de bains, mes clients jeunes me demandent souvent de l’enlever pour gagner de la place. C’est dommage, car c’est une solution à la fois pratique et plus propre. »

En revanche, dans les pays anglo-saxons comme les États-Unis ou le Royaume-Uni, l’eau est rarement utilisée. Le papier toilette règne en maître, malgré ses limites sanitaires et environnementales. Pourquoi cette différence ? L’historienne Sarah Delorme, spécialiste des pratiques corporelles, explique : « L’adoption du papier toilette est liée à l’industrialisation du XIXe siècle. Aux États-Unis, les fabricants ont réussi à le vendre comme un symbole de modernité et de propreté. Mais ce n’est qu’un produit marketing, pas une nécessité hygiénique. »

Pourquoi l’eau est-elle plus hygiénique que le papier ?

Sur le plan médical, l’eau l’emporte largement. Le frottement du papier, même doux, peut irriter la peau sensible de la région anale et génitale. Pour les personnes souffrant d’hémorroïdes, de fissures anales ou de maladies inflammatoires de l’intestin, le papier toilette devient un supplice quotidien. En revanche, un jet d’eau tiède nettoie en douceur, sans friction, en éliminant les résidus de manière bien plus complète.

Le Dr Elias N’Goma, proctologue à Lyon, confirme : « Je recommande systématiquement l’eau à mes patients. Les irritations post-défécatrices diminuent fortement, et les risques d’infections urinaires, particulièrement chez les femmes, sont réduits. Le papier laisse souvent des traces microscopiques de selles, ce qui favorise les proliférations bactériennes. »

En outre, l’eau est un agent de nettoyage naturel, neutre et non allergisant. Contrairement au papier, qui peut contenir des parfums, des agents blanchissants ou des produits chimiques, l’eau pure ne provoque ni démangeaisons ni réactions cutanées. Pour Amélie Tchakarov, une enseignante à Toulouse souffrant de dermatite chronique, le passage au bidet a été une révélation : « Pendant des années, j’ai cru que mes irritations venaient de mon savon. En réalité, c’était le papier toilette. Depuis que j’utilise un bidet, plus aucun problème. »

Quel est l’impact environnemental du papier toilette ?

La production de papier toilette est un désastre écologique. Chaque année, plus de 27 000 arbres sont abattus rien que pour la consommation américaine, selon des estimations du Natural Resources Defense Council. En Chine, ce chiffre grimpe à 47 millions. Ces arbres proviennent souvent de forêts vierges, notamment en Indonésie ou en Amazonie, où la déforestation menace la biodiversité et aggrave le changement climatique.

La fabrication du papier toilette consomme aussi d’énormes quantités d’eau et d’énergie. En moyenne, il faut 37 gallons (environ 140 litres) d’eau pour produire une seule roule de papier — sans compter l’eau utilisée pour le transport et l’emballage. En comparaison, un jet d’eau de 20 secondes utilise moins de 2 litres. « C’est un paradoxe absolu », souligne Julien Mercier, ingénieur en écologie urbaine. « On utilise des millions de litres d’eau pour fabriquer un produit que l’on jette après l’avoir utilisé pour se nettoyer… alors qu’un simple jet d’eau serait à la fois plus propre et moins gourmand. »

La consommation individuelle est vertigineuse. En Espagne, une personne utilise en moyenne 622 kilomètres de papier toilette au cours de sa vie. Aux États-Unis, ce chiffre dépasse les 1 000 kilomètres — l’équivalent d’un trajet Paris-Marseille en bande continue. Et chaque rouleau, même recyclé, finit souvent par polluer : 90 % des bouchons dans les canalisations proviennent de lingettes ou de morceaux de papier toilette accumulés.

Les lingettes humides : une fausse bonne idée ?

Face aux limites du papier, les lingettes humides ont été présentées comme une alternative moderne, plus douce et plus efficace. Enrichies en aloès, en glycérine ou en savon neutre, elles promettent une hygiène supérieure. Pourtant, leur bilan est mitigé.

Sur le plan sanitaire, certaines lingettes contiennent des conservateurs comme le méthylisothiazolinone, connu pour provoquer des dermatites allergiques à répétition. Le Dr N’Goma met en garde : « J’ai vu une augmentation des cas d’eczéma périanal ces dix dernières années, souvent liée à l’usage quotidien de lingettes. La peau perd son équilibre naturel, devient plus sensible, et les infections secondaires sont fréquentes. »

Environnementalement, la situation est encore plus inquiétante. Même les lingettes dites « biodégradables » mettent des mois, voire des années, à se décomposer. Pires encore, jetées dans les toilettes, elles s’accumulent dans les réseaux d’assainissement et forment des « fatbergs » — des blocs géants de graisse et de déchets qui obstruent les égouts. À Londres, un fatberg de 130 tonnes a été retiré en 2017 sous les rues de la capitale britannique. « On pensait faire mieux, on a fait pire », résume Julien Mercier.

L’eau, une ressource rare : quel dilemme ?

Un argument souvent opposé à l’utilisation de l’eau pour le nettoyage est la préservation de cette ressource précieuse. Pourtant, les chiffres montrent que c’est la production de papier toilette qui consomme bien plus d’eau que son utilisation directe. Selon une étude de l’Université de Twente, la fabrication d’un rouleau de papier toilette nécessite environ 300 litres d’eau, contre 1 à 2 litres pour un rinçage manuel ou un jet de bidet.

De plus, des solutions existent pour réduire encore la consommation d’eau. Les bidets modernes, les toilettes équipées de jets intégrés ou les simples bidons en plastique permettent un usage ciblé et économe. À Marrakech, où l’eau est une denrée rare, les familles utilisent depuis des générations un petit récipient pour se laver après les toilettes. « On apprend très jeune à utiliser juste ce qu’il faut », raconte Youssef El Mekkaoui, un ingénieur en hydraulique. « Ce n’est pas une question de technologie, mais d’éducation. »

Quelles alternatives innovantes pour l’avenir des toilettes ?

Le marché sanitaire évolue rapidement. Au Japon, les toilettes Washlet de Toto équipées de jets d’eau, de séchage à air chaud et de désodorisation sont présentes dans 80 % des foyers. En Corée du Sud, les modèles similaires gagnent du terrain. En Europe, des startups proposent des adaptateurs jet d’eau compatibles avec les toilettes classiques, vendus à moins de 50 euros.

Ces innovations ne se limitent pas au confort. Elles répondent à une demande croissante de durabilité. Clara Dubois, fondatrice d’une entreprise de sanitaires écologiques à Nantes, explique : « Nos clients veulent réduire leur empreinte carbone, mais aussi améliorer leur bien-être. Un jet d’eau, c’est à la fois plus propre, plus doux, et plus responsable. »

D’autres solutions émergent : les toilettes à compost, les systèmes de recyclage d’eau grise, ou encore les bidets solaires pour les zones rurales dépourvues d’eau courante. Dans les bidonvilles de Nairobi, des ONG installent des toilettes sèches avec des bidons d’eau adjacents, combinant hygiène et accessibilité.

Comment changer nos habitudes ?

Le passage du papier à l’eau n’est pas seulement technique, il est culturel. Dans les pays occidentaux, le bidet est souvent perçu comme un objet démodé, voire incongru. Pourtant, une prise de conscience progresse, portée par les enjeux environnementaux et la recherche de bien-être corporel.

Des campagnes d’éducation, comme celles menées dans les écoles en Italie ou au Portugal, commencent à remettre le bidet au goût du jour. Les influenceurs en santé naturelle recommandent aussi l’eau comme geste simple d’autosoins. « C’est un geste basique, mais il change tout », affirme Amélie Tchakarov. « On parle de santé intime, de prévention, de respect du corps. Ce n’est pas anodin. »

A retenir

Pourquoi l’eau est-elle plus hygiénique que le papier toilette ?

L’eau nettoie sans friction, élimine plus efficacement les résidus et réduit les risques d’irritations et d’infections. Elle est particulièrement recommandée pour les personnes souffrant d’hémorroïdes, de fissures anales ou de dermatites.

Le papier toilette est-il vraiment nocif pour l’environnement ?

Oui. Des millions d’arbres sont abattus chaque année pour sa production, et sa fabrication consomme des quantités énormes d’eau et d’énergie. De plus, il contribue à la pollution des réseaux d’assainissement.

Les lingettes humides sont-elles une bonne alternative ?

Non. Même si elles semblent plus douces, elles contiennent souvent des produits chimiques irritants et ne se biodégradent pas correctement. Jetées dans les toilettes, elles bouchent les canalisations.

Utiliser de l’eau après les toilettes consomme-t-il trop de ressources ?

Au contraire. La production de papier toilette consomme bien plus d’eau que son utilisation directe. Un jet d’eau ciblé ou un bidet utilisent moins de 2 litres par utilisation, contre des centaines pour fabriquer un simple rouleau.

Existe-t-il des solutions simples pour adopter l’eau chez soi ?

Oui. On peut installer un bidet, un adaptateur jet d’eau, ou simplement utiliser un bidon d’eau. Ces solutions sont accessibles, économiques, et compatibles avec la plupart des salles de bains.

Conclusion

Le débat sur la méthode de nettoyage après les toilettes dépasse la simple question de confort. Il touche à la santé, à la culture, et à notre rapport à l’environnement. Alors que la majorité du monde utilise l’eau, les pays occidentaux s’accrochent à un produit industriel aux coûts cachés. En adoptant des pratiques plus naturelles et plus durables, nous ne faisons pas seulement un geste pour notre corps — nous contribuons à un avenir plus propre, plus juste, et plus intelligent.