Dans un contexte où le pouvoir d’achat est de plus en plus contraint, les enseignes discount comme Primark séduisent des millions de consommateurs par leurs prix défiant toute concurrence. Vêtements, accessoires, produits cosmétiques : tout semble accessible à moindre coût. Pourtant, derrière cette apparence de bonheur consumériste se cache parfois une réalité plus inquiétante. Une récente enquête de l’UFC-Que Choisir vient de tirer la sonnette d’alarme, révélant que certains produits, particulièrement dans le domaine de la beauté, pourraient mettre en danger la santé des utilisateurs. Ce constat, appuyé par des analyses rigoureuses, invite à repenser notre rapport aux produits low-cost, surtout lorsqu’il s’agit de ce que l’on applique sur sa peau ou, pire encore, sur ses lèvres.
Qu’a révélé l’enquête de l’UFC-Que Choisir sur les produits Primark ?
L’UFC-Que Choisir, association de consommateurs reconnue pour son expertise et son indépendance, a mené une analyse approfondie de plusieurs produits cosmétiques vendus chez Primark. Le but ? Évaluer la sécurité de ces articles souvent perçus comme des alternatives économiques aux grandes marques. Les résultats, publiés après des mois de tests en laboratoire, sont préoccupants. Sur une dizaine de produits analysés, un s’est détaché par la gravité de sa composition : le baume à lèvres Nourishing Lip Balm.
Le produit, vendu à quelques euros seulement, affiche un packaging soigné, avec des promesses d’hydratation intense et d’efficacité naturelle. Mais derrière cette image rassurante, une composition chimique controversée. L’analyse a révélé la présence de substances dérivées de la pétrochimie, notamment le Petrolatum, la Paraffine, la Cera microcristallina et le Paraffinum liquidum. Ces composants, bien qu’autorisés dans certaines limites par la réglementation européenne, soulèvent des questions importantes en matière de sécurité, surtout lorsqu’ils sont appliqués sur une zone aussi sensible que les lèvres.
Comme l’explique Camille Lefebvre, toxicologue consultée par l’association : « Le Petrolatum, s’il n’est pas raffiné à un très haut niveau, peut contenir des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), des substances classées comme cancérogènes potentiels. Or, les lèvres sont une zone de passage direct vers le système digestif. Chaque fois qu’on lèche ses lèvres, on ingère une partie du produit. »
Pourquoi le baume à lèvres Nourishing Lip Balm est-il particulièrement dangereux ?
C’est la combinaison des ingrédients, plus que leur présence isolée, qui inquiète les experts. Le Nourishing Lip Balm contient non seulement du Petrolatum, mais aussi de la Paraffine liquide (Paraffinum liquidum) et de la cire microcristalline (Cera microcristallina). Ces substances forment un film occlusif sur les lèvres, empêchant la perte d’eau, mais aussi l’échange d’air. À court terme, cela donne une impression d’hydratation, mais à long terme, cela peut étouffer la peau, favoriser la déshydratation et même provoquer une dépendance au produit.
L’UFC-Que Choisir a attribué à ce baume la note D, la plus basse possible dans son système d’évaluation. Cette note reflète un risque élevé pour tous les utilisateurs, y compris les plus vulnérables : enfants, femmes enceintes, personnes à la peau sensible. L’association recommande formellement de ne pas acheter ce produit et de jeter celui déjà en possession.
C’est le cas d’Élodie Ricard, mère de deux enfants, qui a découvert l’alerte trop tard. « J’avais acheté ce baume pour ma fille de 8 ans parce qu’il coûtait 1,50 euro et qu’il sentait bon. Quand j’ai vu l’article de Que Choisir, j’ai tout de suite vérifié la composition. J’ai jeté le tube immédiatement. Je me demande combien de fois elle l’a léché sans que je m’en rende compte. »
Les ingrédients pétrochimiques dans les cosmétiques : quels risques réels ?
Les dérivés du pétrole sont couramment utilisés dans l’industrie cosmétique pour leurs propriétés émollientes et leur faible coût. Mais leur utilisation soulève des débats scientifiques et éthiques depuis des années. Le Petrolatum, par exemple, est un sous-produit du raffinage du pétrole. S’il est purifié selon les normes les plus strictes (comme le Petrolatum blanc médicinal), il peut être considéré comme sûr. Mais les produits low-cost n’ont pas toujours droit à ce niveau de purification.
Des études, notamment celles menées par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), ont montré que certains lots de Petrolatum contiennent des traces d’HAP, des composés mutagènes et cancérogènes. En 2012, l’ECHA a classé certains types de Petrolatum comme « susceptibles de provoquer le cancer » s’ils ne sont pas suffisamment raffinés.
Le Paraffinum liquidum, quant à lui, est un hydrocarbure liquide utilisé comme agent filmogène. Il n’est pas biodégradable et peut s’accumuler dans les tissus corporels à long terme. « Ce n’est pas un poison aigu, mais une exposition chronique, même à faible dose, peut avoir des effets insidieux », précise le Dr Antoine Morel, dermatologue à Lyon. « Surtout chez les enfants, dont les systèmes métaboliques sont encore en développement. »
Primark vend-il uniquement des produits dangereux ?
Non, et c’est là toute la subtilité de cette affaire. L’enquête de l’UFC-Que Choisir n’accuse pas Primark dans son ensemble, mais pointe un produit spécifique. D’autres articles testés, comme certains masques en tissu ou sérums pour la peau, ont obtenu des notes élevées. Par exemple, un sérum contenant de la niacinamide et de l’acide hyaluronique a été jugé conforme aux bonnes pratiques cosmétiques, avec une formule transparente et sans ingrédients controversés.
Primark, contacté par l’association, a répondu par communiqué : « Nous prenons très au sérieux les préoccupations liées à la sécurité de nos produits. Le baume à lèvres Nourishing Lip Balm a été retiré de la vente dans tous nos magasins européens dans le cadre d’un rappel préventif. Nous travaillons avec nos fournisseurs pour améliorer la qualité de nos formulations. »
Cette réaction montre que les enseignes discount ne sont pas nécessairement irresponsables, mais qu’elles peuvent parfois faire des compromis sur la qualité pour maintenir des prix très bas. Le défi est donc de savoir distinguer, au milieu des allégations marketing, les produits sûrs de ceux qui cachent des dangers.
Comment les consommateurs peuvent-ils se protéger ?
La première règle est de ne pas se fier uniquement au prix ou au packaging. « Un produit beau et bon marché n’est pas forcément mauvais, mais il mérite une attention particulière », souligne Sophie Vasseur, formatrice en éducation à la consommation. « Il faut apprendre à lire les étiquettes, à reconnaître les noms d’ingrédients à risque, et à utiliser des outils d’information fiables. »
Des applications comme Yuka, INCI Beauty ou Clean Beauty permettent désormais de scanner un produit et d’obtenir une évaluation quasi instantanée de sa composition. Elles identifient les substances potentiellement nocives, comme les parabens, les phénoxyéthanol, ou les dérivés pétroliers, et proposent des alternatives plus sûres.
Lucas Brenner, étudiant en biologie, utilise Yuka depuis deux ans. « Avant, j’achetais n’importe quoi. Maintenant, je scanne tout. J’ai arrêté un déodorant parce qu’il contenait du triclosan, un perturbateur endocrinien. C’est une petite habitude qui peut changer beaucoup. »
Quelle est l’importance de la vigilance éthique et environnementale ?
La question ne se limite pas à la santé. Derrière la composition des produits se cache aussi une dimension éthique et écologique. Les dérivés pétroliers sont non seulement d’origine fossile, mais leur production est énergivore et polluante. En choisissant des produits contenant de l’huile de coco, du beurre de karité ou de la cire d’abeille, on opte non seulement pour une meilleure santé, mais aussi pour un impact environnemental réduit.
De plus en plus de consommateurs, comme Inès Tariq, militante pour une consommation responsable, font ce lien. « Je refuse d’acheter des cosmétiques qui me mettent en danger ou qui détruisent la planète. Ce n’est pas un luxe, c’est une responsabilité. Même si ça coûte un peu plus cher, je préfère investir dans un produit sûr que dans une fausse économie. »
Quelles alternatives sûres et abordables existent sur le marché ?
Il est possible de trouver des baumes à lèvres sûrs sans se ruiner. De nombreuses marques proposent des formules naturelles à des prix raisonnables. Par exemple, certains produits de la gamme Weleda ou Sanoflore, bien que plus chers que ceux de Primark, restent accessibles (entre 5 et 8 euros) et sont formulés sans dérivés pétroliers.
Les pharmacies et parapharmacies proposent aussi des baumes dits « médicaux », comme le célèbre baume du Tigre ou certains produits de la marque Bioderma, qui utilisent des composants éprouvés et non controversés. Enfin, les boutiques en ligne spécialisées dans les cosmétiques bio, comme Greenweez ou Biocoop, offrent des options variées avec des garanties de traçabilité.
Conclusion
L’enquête de l’UFC-Que Choisir sur le baume à lèvres Nourishing Lip Balm de Primark est un signal d’alerte pour tous les consommateurs. Elle rappelle que le prix bas ne doit jamais primer sur la sécurité, surtout quand il s’agit de produits appliqués sur des zones sensibles du corps. Cette affaire montre aussi que la vigilance individuelle, combinée à des outils d’information fiables, peut faire la différence. Acheter malin, ce n’est pas seulement économiser de l’argent, c’est aussi protéger sa santé, celle de ses proches, et l’environnement. Face à la tentation du bon marché, il faut parfois savoir dire non — même si le produit semble inoffensif.
A retenir
Quel produit de Primark a été pointé par l’UFC-Que Choisir ?
Le baume à lèvres Nourishing Lip Balm a été identifié comme présentant un risque élevé pour la santé en raison de la présence de dérivés pétroliers non suffisamment raffinés, comme le Petrolatum et le Paraffinum liquidum.
Pourquoi le Petrolatum est-il dangereux ?
Le Petrolatum peut contenir des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) s’il n’est pas hautement purifié. Ces substances sont classées comme cancérogènes potentiels par plusieurs agences sanitaires européennes.
Quelle note a reçue ce produit ?
L’UFC-Que Choisir a attribué la note D au Nourishing Lip Balm, la plus basse de son échelle, indiquant un risque élevé pour tous les utilisateurs, y compris les enfants et les femmes enceintes.
Primark vend-il d’autres produits dangereux ?
L’enquête ne condamne pas l’ensemble de l’offre de Primark. D’autres produits cosmétiques, comme certains masques ou sérums, ont obtenu des notes élevées grâce à des formulations plus saines et transparentes.
Que faire si on possède déjà ce baume ?
L’UFC-Que Choisir recommande de ne pas utiliser ce produit et de le jeter. Primark a d’ailleurs procédé à un retrait préventif dans ses magasins européens.
Comment éviter les produits à risque ?
Il est conseillé de lire attentivement les étiquettes, de privilégier les ingrédients naturels et de recourir à des applications de scan comme Yuka ou INCI Beauty pour évaluer la sécurité des produits cosmétiques.