En quelques mois, le monde de la tech a basculé. Alors que les regards étaient tournés vers les tempêtes médiatiques et les annonces fracassantes d’autres géants du numérique, Larry Ellison, discret mais implacable, a gravi les sommets de la fortune mondiale avec la lenteur puissante d’un mouvement tectonique. Sa richesse, désormais estimée à plus de 300 milliards de dollars, le place au deuxième rang mondial, dépassant des figures emblématiques comme Jeff Bezos et Bill Gates. Ce n’est pas le fruit du hasard, mais le résultat d’une stratégie longue, patiente, et profondément ancrée dans les fondations de l’industrie numérique. Derrière ce silence calculé, une machine s’est mise en marche : celle de l’intelligence artificielle, du cloud, et d’un réseau d’alliances stratégiques qui redessine le paysage technologique global.
Comment Larry Ellison a-t-il rattrapé les leaders mondiaux en Bourse ?
L’ascension d’Ellison sur les marchés financiers a été fulgurante, mais elle repose sur une accumulation de choix précis. Fin juillet, sa fortune, évaluée à 144 milliards de dollars, a bondi de plus de 100 milliards en quelques semaines. Au 19 août, elle atteignait 302 milliards selon Bloomberg, plaçant le fondateur d’Oracle à un souffle d’Elon Musk, qui reste en tête avec 375 milliards. Ce rattrapage n’est pas seulement une affaire de chiffres : il marque un changement de paradigme dans la manière dont les marchés valorisent les entreprises technologiques.
Contrairement aux mouvements spectaculaires des dirigeants comme Musk, Ellison n’a jamais cherché à dominer les réseaux sociaux ou à alimenter les rumeurs. Son influence s’exerce ailleurs : dans les coulisses, lors des réunions stratégiques, et surtout dans les performances boursières d’Oracle. Depuis janvier, le cours de l’action a grimpé de près de 50 % à Wall Street, porté par une transformation silencieuse mais profonde de l’entreprise. Les investisseurs ont compris que le futur de la tech ne se joue plus seulement dans les voitures électriques ou les fusées, mais dans les data centers, les bases de données, et l’infrastructure invisible qui alimente l’IA.
Chloé Reynaud, analyste financière à Paris, observe : « Ce qui frappe, c’est la régularité du mouvement. Il n’y a pas eu de coup d’éclat, mais une accumulation de résultats solides. Oracle a su anticiper la demande en puissance de calcul, et Ellison, en tant qu’actionnaire majoritaire, en a directement bénéficié. »
Quels sont les leviers derrière cette croissance exponentielle ?
Le moteur principal de cette ascension, c’est l’intelligence artificielle. Oracle, fondée en 1977 autour d’un concept simple — structurer les données pour en faire un outil d’entreprise —, a su réinventer son modèle sans jamais renier ses fondations. La base de données reste le cœur du système, mais elle sert désormais d’ossature à des services cloud de pointe, capables de gérer des modèles d’IA massifs.
Ellison, bien qu’officiellement président du conseil et directeur de la technologie depuis 2014, continue d’imprimer sa vision. Il n’a pas besoin de tweeter pour imposer son autorité : il la fait sentir dans chaque décision stratégique. Son pari ? Que l’IA ne sera viable que si elle repose sur une infrastructure robuste, sécurisée, et performante. « On ne construit pas l’avenir avec des algorithmes seuls, disait-il lors d’une réunion interne à Redwood City. On le construit avec des serveurs, des câbles, et des systèmes qui ne tombent jamais en panne. »
Les centres de données d’Oracle, déployés aux États-Unis, en Europe et en Asie, sont devenus des pièces maîtresses de cette stratégie. Les entreprises partenaires — startups, géants industriels, administrations — achètent du temps de calcul pour entraîner leurs modèles. Chaque transaction alimente les revenus d’Oracle, et par ricochet, la fortune d’Ellison.
Le témoignage de Romain Delaunay, PDG d’une société de santé numérique basée à Lyon, illustre cette mutation : « On a migré nos systèmes vers Oracle Cloud il y a dix-huit mois. La stabilité, la sécurité, et la rapidité d’accès aux données ont été décisives. On ne choisit pas Oracle pour le glamour, mais parce que ça marche. Et quand ça marche, ça se paie — et Ellison en profite. »
Quel rôle joue le projet « Stargate » dans cette stratégie ?
En janvier, une annonce discrète mais capitale a été faite à la Maison Blanche : le lancement du projet « Stargate », une initiative colossale visant à doter les États-Unis d’un réseau d’infrastructures dédiées à l’IA avancée. L’enveloppe prévue s’élève à 500 milliards de dollars d’ici 2029. Ce n’est pas un simple programme technologique : c’est une course à l’infrastructure, comparable à celles des grands projets industriels du XXe siècle.
Oracle en est un pilier central. Aux côtés d’OpenAI, qui assure la direction technique, de SoftBank, chargé de lever une partie du financement, et du fonds MGX — réunissant Microsoft, OpenAI, et d’autres partenaires —, Oracle fournit la majeure partie de l’infrastructure cloud et des data centers. Ce partenariat, rare par son ampleur, signifie que l’entreprise d’Ellison n’est plus un simple fournisseur, mais un acteur clé de la souveraineté technologique américaine.
Larry Ellison a assisté à l’annonce à la Maison Blanche, aux côtés de dirigeants et de responsables politiques. Son alignement avec Donald Trump, qu’il a soutenu financièrement à plusieurs reprises, n’est pas anecdotique. Il reflète une vision commune : celle d’une technologie au service de la puissance nationale. Des liens similaires existent avec Benyamin Netanyahou, Premier ministre israélien, sur des projets d’infrastructure en Méditerranée orientale. Selon des sources du Grand Continent, Ellison aurait indirectement financé des initiatives liées à l’annexion de territoires à Jérusalem, une zone géopolitique sensible. Ces choix, bien que controversés, montrent que l’homme d’affaires ne se limite pas à la technologie : il investit aussi dans l’influence.
Qu’est-ce que cette ascension révèle sur l’avenir de la tech mondiale ?
À 81 ans, Larry Ellison incarne une forme de longue-vue dans un monde obsédé par l’immédiateté. Son parcours, jalonné de quatre mariages, deux enfants, et d’un empire personnel incluant 98 % de l’île de Lanai, achetée 300 millions de dollars, n’est pas celui d’un play-boy milliardaire. C’est celui d’un stratège qui construit, patiemment, un héritage durable.
Lanai, cette île hawaïenne presque entièrement sous son contrôle, est devenue un laboratoire à ciel ouvert : test de smart grids, d’agriculture durable, et de systèmes de gestion énergétique. Pour certains, c’est un caprice. Pour d’autres, c’est une vitrine de ce que peut être une société intégralement gérée par des systèmes intelligents — une anticipation du monde que Oracle cherche à bâtir.
Ellison possède également des propriétés impressionnantes en Californie, en Floride, et au Nevada, souvent reliées à des centres de données ou des hubs technologiques. Ces lieux ne sont pas seulement des résidences : ce sont des nœuds dans un réseau plus vaste, où la vie privée et l’infrastructure économique se croisent.
Cette ascension fulgurante révèle une vérité essentielle : l’ère des disruptions médiatiques cède la place à celle de l’infrastructure. Les entreprises qui gagneront demain ne seront pas celles qui annoncent le plus fort, mais celles qui construisent le plus solide. L’IA ne fonctionne pas sans serveurs. Les modèles ne s’entraînent pas sans électricité. Et les rêves technologiques ne deviennent réalité que si quelqu’un, quelque part, a mis en place les fondations.
Comment Larry Ellison se distingue-t-il des autres géants de la tech ?
La différence entre Ellison et ses pairs tient à son style. Musk fait la une par ses déclarations. Bezos fascine par son empire logistique. Gates inspire par sa philanthropie. Ellison, lui, agit dans l’ombre. Il ne se livre pas, ne s’excuse pas, ne s’embarrasse pas de communication. Il construit.
Son actionnariat à hauteur de 40 % dans Oracle fait de chaque mouvement boursier un tremblement personnel. Mais loin de le rendre vulnérable, cela l’ancrage dans la réalité des résultats. Il ne peut pas se contenter de promesses : il doit livrer.
Un ancien cadre d’Oracle, qui a travaillé directement avec lui pendant dix ans sous couvert d’anonymat, raconte : « Il arrive parfois sans prévenir en pleine réunion, écoute cinq minutes, puis pose une question qui change tout. Il ne parle pas beaucoup, mais quand il parle, tout le monde se tait. Il voit les choses en termes d’architecture, pas de marketing. »
A retenir
Quel est le secret de la croissance de Larry Ellison ?
Le succès d’Ellison repose sur une stratégie de long terme centrée sur l’infrastructure technologique. Plutôt que de se lancer dans des projets médiatiques, il a concentré Oracle sur le cloud et l’IA, anticipant la demande en puissance de calcul. Cette vision, combinée à son actionnariat majoritaire, lui a permis de capitaliser directement sur la hausse du cours de l’action.
Pourquoi le projet « Stargate » est-il crucial ?
« Stargate » est un projet d’envergure nationale visant à doter les États-Unis d’infrastructures massives pour l’IA. Avec une enveloppe de 500 milliards de dollars d’ici 2029, il place Oracle au cœur de la souveraineté technologique américaine, aux côtés d’OpenAI, SoftBank et Microsoft. C’est une alliance stratégique qui assure à Ellison un rôle central dans l’avenir de la tech.
Comment Ellison influence-t-il la géopolitique ?
À travers ses soutiens politiques à Donald Trump et Benyamin Netanyahou, ainsi que ses investissements dans des zones sensibles comme Jérusalem, Ellison étend son influence au-delà de la technologie. Il participe à des projets qui mêlent innovation, pouvoir et géopolitique, montrant qu’il voit l’entreprise comme un levier d’action globale.
Quelle est la différence entre Ellison et les autres milliardaires de la tech ?
Ellison se distingue par son silence, sa patience et son obsession pour l’infrastructure. Il ne cherche pas la popularité, mais la pérennité. Alors que d’autres surfent sur les tendances, il construit les fondations sur lesquelles elles reposent. Son ascension révèle que la vraie puissance, dans le monde numérique, n’est pas dans le bruit, mais dans la solidité.