Découverte d’un métal rare sous leur jardin en 2025, un couple français dépossédé au profit d’une entreprise canadienne

Dans le calme bucolique de Sainte-Marie, un village niché entre collines et forêts du sud-ouest de la France, la vie coulait paisiblement pour Luc et Martine Berthier. Retraités depuis plusieurs années, ils avaient transformé leur propriété en un petit paradis végétal, où chaque saison apportait son lot de couleurs et de surprises. Mais celle de l’automne 2023 allait marquer un tournant inattendu dans leur existence paisible. Ce qu’ils pensaient être un simple projet d’aménagement de jardin allait les plonger au cœur d’un enjeu géopolitique, technologique et juridique d’une ampleur qu’ils n’auraient jamais imaginée.

Qu’est-ce qui a conduit à la découverte du néodyme sous un jardin français ?

Le projet initial était modeste : creuser un bassin naturel pour y installer des nénuphars et quelques poissons rouges. Luc, ancien professeur de sciences, aimait s’occuper de ses mains. Ce jour-là, en creusant à environ un mètre de profondeur, il sentit une résistance inhabituelle. « C’était comme si la terre refusait de céder », raconte-t-il. En retirant la terre, il découvrit une roche d’un gris métallique, presque irisé, qui semblait émettre une lueur bleutée sous certaines incidences de lumière. « On aurait dit qu’elle vibrait, ou qu’elle était magnétique », ajoute Martine, qui a aussitôt remarqué que les outils en métal s’attiraient étrangement à la surface de la pierre.

Intrigués, ils ont envoyé un échantillon à un laboratoire local de géologie, par simple curiosité. Deux semaines plus tard, le retour fut spectaculaire : les analyses révélaient la présence d’une concentration exceptionnelle de néodyme, un élément des terres rares. « On nous a dit que c’était une des poches les plus riches jamais détectées en Europe occidentale », confie Luc, encore ému. La nouvelle s’est répandue rapidement, attirant l’attention de spécialistes, puis, plus inquiétant, celle d’entreprises internationales.

Pourquoi le couple ne peut-il pas exploiter cette ressource malgré sa découverte sur sa propriété ?

La première réaction du couple fut naturellement de se demander s’ils allaient devenir riches. Mais très vite, la réalité légale les a rattrapés. Peu de temps après la confirmation de la découverte, un représentant d’une société canadienne, Nortech Mining, s’est présenté chez eux. Cette entreprise, spécialisée dans l’extraction des terres rares, avait obtenu, des années auparavant, les droits d’exploitation miniers sur une vaste zone incluant Sainte-Marie, dans le cadre d’un accord signé avec l’État français.

« C’était un choc », reconnaît Martine. « On nous a expliqué que même si le néodyme est sous notre jardin, il ne nous appartient pas. C’est comme si on découvrait de l’or chez soi, mais que l’État avait déjà vendu les droits à une multinationale. » En France, le sous-sol est considéré comme un bien national. Selon le Code minier, les ressources minérales du sol appartiennent à l’État, et non au propriétaire foncier. Seule une déclaration d’utilité publique peut permettre l’exploitation, souvent après négociation avec des entreprises agréées.

Quelles sont les implications juridiques de la propriété des ressources souterraines ?

Le cas des Berthier illustre une faille juridique peu connue du grand public. « Beaucoup de propriétaires pensent que tout ce qui est sous leurs pieds leur appartient, mais ce n’est pas le cas », explique Élodie Vasseur, avocate spécialisée en droit minier. « En France, dès qu’il s’agit de ressources minérales stratégiques, l’État prend le contrôle. Cela remonte à la loi de 1956 sur les mines, qui visait à protéger les intérêts nationaux. »

Cette règle, bien que logique dans un contexte de souveraineté économique, peut sembler injuste aux yeux de citoyens comme les Berthier. « Ils ont fait la découverte, ils ont alerté les autorités, mais ils ne tireront aucun bénéfice direct », souligne Vasseur. Nortech Mining, quant à elle, a entamé les démarches administratives pour obtenir une concession d’exploitation, avec l’appui de l’administration française. Le couple n’a reçu qu’une lettre de remerciement officielle et une indemnisation symbolique pour « perturbation du terrain ».

Quelle est l’importance du néodyme dans les technologies modernes ?

Le néodyme n’est pas un métal ordinaire. Il est l’un des éléments clés des aimants permanents les plus puissants du monde, utilisés dans une multitude d’appareils : moteurs des voitures électriques, éoliennes, disques durs, smartphones, et même dans certains équipements médicaux comme les IRM. « Sans néodyme, la transition énergétique serait impossible », affirme Damien Laroche, ingénieur en matériaux à l’INSA Toulouse. « Un seul véhicule électrique moderne peut contenir jusqu’à deux kilos de terres rares, dont une part importante de néodyme. »

La demande mondiale pour ce métal a triplé en dix ans, et l’Europe, qui importe plus de 90 % de ses terres rares de Chine, cherche désespérément à diversifier ses sources. C’est dans ce contexte que la découverte des Berthier prend tout son sens. « Ce n’est pas seulement une poche de métal, c’est une opportunité stratégique », commente Laroche. « Si on peut exploiter ce gisement localement, cela réduit notre dépendance, et cela crée des emplois. »

Quel est l’impact de cette découverte sur la communauté locale ?

À Sainte-Marie, la nouvelle a suscité des réactions contrastées. Certains habitants, comme Yannick Fournier, éleveur de chèvres à la retraite, voient dans ce projet une chance pour relancer l’économie d’un village en déclin. « Il y a dix jeunes qui sont partis l’année dernière. Si une mine s’installe, peut-être qu’ils reviendront. »

Mais d’autres, comme Léa Chambon, enseignante et militante écologiste, s’inquiètent des conséquences environnementales. « L’extraction des terres rares est polluante. On risque de contaminer les nappes phréatiques, et de détruire des paysages uniques. » Des pétitions ont circulé, des réunions publiques ont été organisées. Le maire, hésitant, a appelé à la prudence. « On ne veut pas de richesse au prix de notre environnement », a-t-il déclaré lors d’un conseil municipal.

Quelles solutions alternatives existent pour répondre à la demande en néodyme ?

Face à la pression croissante sur les ressources naturelles, des solutions alternatives émergent. Le recyclage des aimants contenus dans les vieux appareils électroniques est l’une des pistes les plus prometteuses. « On jette des tonnes d’équipements chaque année, sans penser qu’ils contiennent des métaux précieux », explique Claire Ménard, chercheuse au CNRS. « Des procédés innovants permettent désormais d’extraire jusqu’à 95 % du néodyme contenu dans un moteur de voiture électrique en fin de vie. »

Ces technologies, encore peu développées à grande échelle, pourraient un jour réduire la nécessité d’extraire de nouvelles ressources. En attendant, des pays comme la France cherchent à sécuriser leurs approvisionnements, quitte à s’appuyer sur des accords internationaux. Le cas de Nortech Mining, bien que légal, pose question sur la souveraineté nationale : pourquoi une entreprise canadienne détient-elle les droits d’exploitation sur un gisement français ?

Quelles leçons peut-on tirer de l’expérience des Berthier ?

Pour Luc et Martine, cette aventure a changé leur regard sur le monde. « On vivait tranquilles, on pensait tout savoir de notre terrain. Et puis, un jour, on découvre que sous nos pieds, il y a une ressource qui intéresse le monde entier », dit Luc, les yeux brillants. « C’est comme si on avait ouvert une porte sur un autre monde. »

Ils ont choisi de ne pas s’opposer à l’exploitation, malgré leur déception. « On n’a pas les moyens de lutter contre une multinationale », reconnaît Martine. « Mais on espère que notre histoire servira de cas d’école. Que les gens comprennent que la terre, ce n’est pas seulement de la terre. C’est un trésor, parfois, mais aussi une bataille. »

Quelles perspectives d’avenir pour l’exploitation des ressources rares en France ?

Le cas de Sainte-Marie pourrait marquer le début d’un nouveau chapitre dans la gestion des ressources naturelles françaises. Le gouvernement a annoncé, en réponse à la découverte, une révision du cadre juridique relatif aux mines stratégiques. « Il faut mieux équilibrer les intérêts de l’État, des entreprises et des citoyens », a déclaré la secrétaire d’État à la Transition énergétique.

Des projets pilotes de co-développement, où les habitants des zones concernées pourraient bénéficier d’une part des revenus d’exploitation, sont à l’étude. En parallèle, des campagnes d’information visent à sensibiliser les propriétaires fonciers aux droits miniers. « Ce n’est pas parce qu’on creuse dans son jardin qu’on devient millionnaire », ironise Élodie Vasseur, « mais au moins, on peut savoir à quoi s’attendre. »

A retenir

La découverte du néodyme sur une propriété privée donne-t-elle des droits au propriétaire ?

Non. En France, les ressources minérales du sous-sol appartiennent à l’État, même si elles sont découvertes sur une propriété privée. Le propriétaire foncier ne détient pas automatiquement les droits d’exploitation.

Pourquoi une entreprise canadienne peut-elle exploiter un gisement en France ?

Les droits d’exploitation ont été attribués par l’État français à Nortech Mining dans le cadre d’un accord stratégique visant à développer l’extraction de terres rares. Ce type de concession peut être accordé à des entreprises étrangères si elles répondent aux critères techniques et environnementaux.

Le néodyme est-il dangereux à extraire ?

L’extraction du néodyme peut avoir un impact environnemental significatif, notamment par la pollution des sols et des eaux due aux produits chimiques utilisés. Des normes strictes sont nécessaires pour encadrer ces activités.

Peut-on recycler le néodyme ?

Oui. Le recyclage des aimants contenant du néodyme est possible et de plus en plus efficace. Il représente une alternative durable à l’extraction de nouvelles ressources, bien qu’il ne suffise pas encore à couvrir la demande mondiale.

Les habitants d’un village touché par une exploitation minière peuvent-ils en bénéficier ?

Actuellement, les retombées économiques sont souvent limitées. Cependant, de nouvelles propositions visent à instaurer des mécanismes de redistribution locale, afin que les communautés concernées profitent directement de l’exploitation de leur territoire.