À partir d’octobre 2025, les terrasses des cafés, restaurants et commerces en zone urbaine devront s’équiper de stores spécifiques, rigoureusement homologués pour leur performance acoustique. Cette mesure, inscrite dans une volonté d’apaiser le bruit ambiant en ville, marque un tournant dans la gestion de l’espace public. Alors que les centres-villes vibrent au rythme des conversations animées, des verres qui s’entrechoquent et de la musique en fond sonore, les riverains subissent de plus en plus ces sons prolongés, parfois jusqu’en pleine nuit. La nouvelle réglementation entend rééquilibrer cette cohabitation fragile entre vie commerçante et tranquillité résidentielle. Derrière ce changement technique se joue une transformation profonde des usages urbains, avec des conséquences économiques, sociales et environnementales qui s’annoncent multiples.
Quelle est la raison de cette nouvelle obligation ?
Le bruit, longtemps considéré comme une nuisance mineure, est désormais reconnu comme un facteur de stress chronique pouvant entraîner des troubles du sommeil, des problèmes cardiovasculaires et une baisse de bien-être général. Selon l’Organisation mondiale de la santé, l’exposition prolongée au bruit en milieu urbain représente un risque sanitaire comparable à la pollution de l’air. Dans ce contexte, les terrasses, particulièrement actives en été, sont devenues des points noirs acoustiques dans de nombreuses villes françaises. Lyon, Bordeaux, Montpellier ou encore Nantes ont vu le nombre de plaintes déposées par les habitants grimper en flèche ces dernières années. C’est cette pression citoyenne qui a conduit les collectivités à agir. La réglementation impose donc aux établissements concernés de s’équiper de stores capables d’absorber une part significative des sons émis en terrasse, notamment les voix fortes, les rires ou les bruits de vaisselle. L’objectif n’est pas d’étouffer la vie de quartier, mais de la rendre compatible avec le repos des riverains.
Quelles caractéristiques doivent posséder les stores homologués ?
Les nouveaux stores devront répondre à des normes strictes définies par un cahier des charges acoustique. Ils seront testés en laboratoire selon des protocoles normalisés, mesurant leur capacité à atténuer les fréquences typiques du brouhaha humain (entre 500 Hz et 4 000 Hz). Les matériaux utilisés devront combiner densité, porosité et structure interne spécifique pour piéger les ondes sonores. En plus de leur fonction acoustique, les stores devront résister aux intempéries, offrir une protection solaire efficace et s’intégrer esthétiquement au cadre architectural. Un label national devrait être mis en place pour faciliter l’identification des produits conformes. Les fabricants comme SolisTech ou AcoustiDesign ont déjà lancé des prototypes en béton cellulaire composite ou en textiles alvéolés, dont les performances préliminaires dépassent les exigences minimales. « Ce n’est plus seulement un store, c’est un élément d’urbanisme sonore », précise Camille Lefebvre, ingénieure acousticienne à Toulouse, qui accompagne plusieurs municipalités dans la transition.
Comment les restaurateurs réagissent-ils à cette obligation ?
La réaction est mitigée. Si certains professionnels saluent une mesure de bon sens, d’autres expriment des inquiétudes légitimes. Julien Moreau, qui tient « Le Petit Vélo », un bistrot chaleureux dans le quartier de la Croix-Rousse à Lyon, a vu sa clientèle doubler depuis la rénovation de sa terrasse. « On est un lieu de vie, pas une discothèque », insiste-t-il. « Mais je comprends que pour certains voisins, nos soirées animées deviennent pesantes. » Pourtant, l’investissement requis le préoccupe : entre 3 000 et 8 000 euros selon la taille de la terrasse, sans compter les frais d’installation. « Après deux ans de crise sanitaire, on a du mal à respirer financièrement. Ce type de dépense, c’est un coup dur. » Il espère que des aides publiques seront mises en place. D’autres, comme Élodie Ferrand, gérante du café « La Parenthèse » à Montpellier, voient dans cette réglementation une opportunité. « On va en profiter pour revoir l’ambiance de notre terrasse, proposer des soirées plus douces, avec de la musique live acoustique. Et puis, un beau store, c’est aussi un signal de qualité pour les clients. »
Quel impact économique cette mesure pourrait-elle avoir ?
Si le coût pèse sur les petits établissements, il pourrait stimuler d’autres secteurs. L’industrie du store, longtemps perçue comme traditionnelle, se tourne désormais vers l’innovation. Des PME spécialisées dans les matériaux composites ou les solutions durables voient leur carnet de commandes s’étoffer. À Saint-Étienne, l’entreprise Sonora a lancé une gamme de stores en lin recyclé renforcé avec des fibres absorbantes biosourcées. « On travaille avec des architectes et des acousticiens pour concevoir des produits sur mesure », explique son directeur, Théo Blanchet. « La demande explose depuis l’annonce de la réglementation. » Par ailleurs, de nouveaux métiers émergent : conseillers en aménagement sonore, installateurs certifiés, auditeurs urbains. Des formations courtes sont déjà proposées par des écoles techniques à Grenoble et à Lille. « C’est une niche, mais elle grandit vite », ajoute Camille Lefebvre. « On parle peut-être de milliers d’emplois dans les cinq prochaines années. »
Quels bénéfices pour les habitants et la ville ?
Pour les résidents, l’espoir est simple : retrouver la tranquillité. Dans le 3e arrondissement de Lyon, où Julien Moreau exerce, plusieurs habitants ont témoigné. « Je vis au-dessus d’une terrasse très fréquentée. L’été, je dors avec des bouchons. Même en fermant les fenêtres, le bruit traverse tout », raconte Aïcha Benali, professeure de philosophie. « Si un store peut réduire de moitié ce vacarme, je serai la première à le saluer. » D’autres, comme Thomas Gervais, un retraité du quartier de la Part-Dieu, voient plus loin : « Ce n’est pas seulement le silence. C’est la possibilité de vivre en ville sans fuir le centre. » Au-delà du confort, les stores homologués pourraient jouer un rôle dans la lutte contre les îlots de chaleur. Grâce à leurs matériaux réfléchissants ou végétalisés, ils atténuent l’effet de béton et améliorent le microclimat. « On gagne parfois jusqu’à 4 degrés en moins sous la terrasse », note Camille Lefebvre. Une avancée précieuse dans un contexte de canicules de plus en plus fréquentes.
Comment cette réglementation s’inscrit-elle dans une évolution plus large ?
La mesure fait partie d’un mouvement global de réinvention de l’espace public. De nombreuses villes expérimentent des zones de basse émission sonore, des horaires d’ouverture différenciés ou des chartes de bon voisinage. À Bordeaux, un projet pilote teste des terrasses avec murs végétaux acoustiques. À Nantes, des capteurs de bruit en temps réel informent les gérants quand les niveaux dépassent un seuil critique. « On va vers une ville plus intelligente, plus attentive », estime Élodie Ferrand. « Le store homologué, c’est un petit outil, mais il symbolise un changement d’état d’esprit. » Les municipalités pourraient d’ailleurs aller plus loin : inciter les commerçants à adopter des pratiques sonores responsables, comme limiter le volume de la musique ou proposer des animations en douceur après 21 heures. La réglementation des stores n’est qu’un premier pas.
Quels défis restent à surmonter ?
Le principal défi est d’ordre financier. Sans aide publique significative, certains établissements pourraient être contraints de réduire leur terrasse ou de fermer. « Il ne faut pas que cette mesure pénalise les plus fragiles », prévient Julien Moreau. Un fonds de soutien, alimenté par une taxe légère sur les grandes chaînes de restauration, est envisagé à Lyon. Autre enjeu : la mise en conformité. Les délais sont courts, et les produits homologués ne seront pas tous disponibles à temps. Les fabricants craignent une pénurie. Enfin, il faudra évaluer l’efficacité réelle des stores dans des conditions réelles. « Un test en laboratoire ne dit pas tout », nuance Camille Lefebvre. « Il faudra mesurer sur le terrain, ajuster si nécessaire. »
Quelle est la conclusion sur cette mesure ?
La réglementation des stores homologués pour terrasses commerciales, qui entrera en vigueur en octobre 2025, incarne un effort concret pour améliorer la qualité de vie en milieu urbain. Elle répond à une demande sociale forte tout en stimulant l’innovation et l’économie verte. Bien que les coûts et les ajustements nécessaires posent des défis, particulièrement pour les petites structures, le bilan global s’annonce positif. En réduisant les nuisances sonores, en apaisant les conflits de voisinage et en améliorant le confort thermique, ces stores pourraient devenir des éléments clés d’une ville plus harmonieuse. Le défi sera de l’appliquer avec souplesse, justice et accompagnement, pour que cette transition bénéficie à tous : riverains, commerçants, et citoyens.
A retenir
Qu’est-ce qu’un store homologué selon la nouvelle réglementation ?
Un store homologué est un équipement spécialement conçu pour atténuer les nuisances sonores émises par les terrasses. Il doit passer des tests acoustiques certifiés, absorber efficacement les fréquences du brouhaha humain, tout en offrant une résistance aux intempéries et une intégration esthétique au bâti urbain.
Quand doit-on être en conformité ?
Tous les établissements concernés devront être équipés de stores homologués avant le 1er octobre 2025. Les contrôles pourraient être renforcés en période estivale, lorsque les terrasses sont les plus fréquentées.
Qui paie l’installation de ces nouveaux stores ?
Les coûts sont à la charge des exploitants de terrasses. Toutefois, certaines villes étudient la mise en place d’aides financières ou de subventions ciblées, notamment pour les petits commerces indépendants.
Les terrasses devront-elles fermer plus tôt ?
La réglementation ne fixe pas d’horaires d’ouverture. Elle vise uniquement à réduire le niveau sonore émis. Cependant, des chartes locales pourraient encourager des pratiques responsables, comme une baisse du volume après une certaine heure.
Y aura-t-il un contrôle de conformité ?
Oui, les municipalités seront chargées de vérifier la mise en place des stores homologués. Des audits techniques pourraient être menés, avec des sanctions en cas de non-respect, notamment des amendes ou des restrictions d’exploitation.