L’IA envahit les entreprises et collectivités : ce que cela change pour vous dès 2025

L’intelligence artificielle, longtemps perçue comme une technologie réservée aux géants du numérique, s’immisce désormais dans les stratégies des entreprises de tous secteurs et de toutes tailles. Pourtant, derrière l’enthousiasme généralisé, se cache une réalité plus nuancée : beaucoup d’organisations peinent à définir concrètement comment l’IA peut transformer leur activité. Une étude récente menée par KPMG auprès de 1 400 cadres dirigeants à travers le monde éclaire ce paradoxe. Elle révèle que 86 % des dirigeants considèrent que l’adoption de l’intelligence artificielle confère un avantage concurrentiel significatif. Mais cette conviction ne va pas toujours de pair avec une mise en œuvre efficace. Entre les grandes entreprises pionnières, les ETI en phase d’expérimentation et les PME encore hésitantes, les écarts sont criants. Et ces disparités s’étendent aussi selon les secteurs et les régions du globe, dessinant un paysage technologique profondément inégal.

Quel avantage concurrentiel l’intelligence artificielle offre-t-elle vraiment aux entreprises ?

L’étude de KPMG montre que la quasi-totalité des dirigeants perçoivent l’IA comme un levier stratégique. Pourtant, cette perception ne se traduit pas uniformément en action. À Toulouse, Éléonore Vasseur, directrice innovation chez NovaPharma, une entreprise spécialisée dans les médicaments innovants, témoigne : Nous avons intégré l’IA dans notre processus de recherche dès 2021. Aujourd’hui, nous sommes capables de simuler des interactions moléculaires en quelques heures, là où cela prenait des mois auparavant. Grâce à ces modèles prédictifs, NovaPharma a réduit de 40 % le temps de développement de nouveaux traitements. Ce type d’avantage est précisément ce que redoutent les entreprises qui restent à l’écart de ces innovations. L’IA permet non seulement d’accélérer les processus, mais aussi d’optimiser les coûts, d’améliorer la prise de décision et de personnaliser l’offre client. Pour Éléonore, ce n’est plus une option, c’est une nécessité. Ceux qui attendent trop longtemps risquent de se retrouver dépassés .

Pourquoi observe-t-on de telles disparités entre les grandes entreprises, les ETI et les PME ?

Les grandes entreprises disposent souvent des ressources humaines, financières et technologiques pour déployer l’IA à grande échelle. C’est le cas de TechNova, un groupe industriel basé à Lyon, qui a mis en place une cellule dédiée à l’intelligence artificielle. Son directeur digital, Thibaut Lenoir, explique : Nous avons recruté une vingtaine de data scientists et investi dans des infrastructures cloud. En deux ans, nous avons automatisé 60 % de nos processus logistiques. Ce niveau d’investissement reste inaccessible pour la plupart des ETI et des PME. Ces dernières, bien que conscientes des bénéfices potentiels, peinent à franchir le pas. Julien Mercier, dirigeant d’une PME de menuiserie à Nantes, confie : J’ai vu des démonstrations d’outils d’IA pour optimiser les commandes ou la gestion des stocks. Mais entre ce qu’on nous montre et ce qu’on peut vraiment mettre en œuvre chez nous, il y a un fossé. Manque de compétences, coûts d’intégration, crainte de l’obsolescence : les freins sont nombreux. Les ETI, quant à elles, se situent entre ces deux extrêmes. Certaines, comme AgriSud, une entreprise agroalimentaire du Sud-Ouest, ont lancé des projets pilotes. Son responsable R&D, Malik Benhaddou, affirme : Nous testons un algorithme pour prédire les rendements des cultures selon les conditions météorologiques. Les résultats sont prometteurs, mais on avance pas à pas.

Quels secteurs sont les plus en pointe dans l’adoption de l’IA ?

Le secteur pharmaceutique, comme l’illustre le cas de NovaPharma, est clairement en tête. L’IA y est utilisée pour accélérer la découverte de molécules, simuler des essais cliniques ou encore personnaliser les traitements. Mais d’autres secteurs suivent de près. Dans la finance, les banques comme Crédalys utilisent l’IA pour détecter les fraudes en temps réel. Nos algorithmes analysent des millions de transactions chaque jour , précise Camille Dubreuil, responsable cybersécurité. Grâce à cela, nous avons réduit de 70 % les pertes liées aux fraudes. L’industrie manufacturière exploite aussi l’IA pour la maintenance prédictive, évitant ainsi des arrêts de production coûteux. En revanche, certains secteurs, comme la distribution ou l’artisanat, restent en retrait. Sophie Renard, gérante d’un réseau de boutiques en région parisienne, reconnaît : On entend parler d’IA pour la gestion des stocks ou le marketing ciblé, mais on ne sait pas par où commencer. On a peur de se lancer dans un projet trop complexe.

Quelles sont les différences géographiques dans l’adoption de l’IA ?

Les États-Unis et la Chine dominent sans surprise le paysage de l’intelligence artificielle. Aux États-Unis, des entreprises comme Google, Amazon ou Tesla ont intégré l’IA au cœur de leurs modèles économiques. En Chine, le gouvernement soutient massivement les initiatives d’IA, notamment dans les villes intelligentes et la surveillance. Là-bas, l’adoption est poussée par une combinaison de volonté politique et de culture entrepreneuriale très agressive , analyse Raphaël Marchand, consultant en transformation numérique. En Europe, le rythme est plus hétérogène. L’Allemagne et les Pays-Bas se distinguent par des projets ambitieux dans l’industrie 4.0, tandis que la France, bien que présente, manque parfois de coordination. On a des talents, des startups innovantes, mais on a du mal à passer à l’échelle , regrette Éléonore Vasseur. Cette fragmentation géographique crée un risque de dépendance technologique pour les entreprises européennes, qui pourraient devoir s’appuyer sur des outils développés ailleurs, avec des implications sur la souveraineté numérique.

Quels sont les obstacles majeurs à l’implémentation de l’IA en entreprise ?

Les freins à l’adoption de l’IA sont à la fois techniques, humains et culturels. D’un point de vue technique, il faut disposer de données de qualité, structurées et accessibles. Or, dans de nombreuses entreprises, les données sont encore cloisonnées ou stockées dans des systèmes obsolètes. On ne peut pas nourrir un algorithme avec des données sales , souligne Thibaut Lenoir. Avant même de parler d’IA, il faut une refonte complète de l’infrastructure IT. Sur le plan humain, le manque de compétences est criant. Les data scientists, ingénieurs en machine learning et architectes de systèmes intelligents sont rares et très demandés. Malik Benhaddou confirme : Recruter dans ce domaine, c’est une bataille. On doit souvent former en interne. Enfin, la culture d’entreprise joue un rôle crucial. Beaucoup de salariés redoutent que l’IA menace leurs emplois. Julien Mercier raconte : Quand on a parlé d’automatiser certaines tâches, il y a eu de la résistance. On a dû organiser des ateliers pour rassurer les équipes, montrer que l’IA pouvait les libérer de tâches répétitives, pas les remplacer.

Comment les entreprises peuvent-elles réussir leur transition vers l’IA ?

Les entreprises qui réussissent leur intégration de l’IA partagent plusieurs traits communs. Elles commencent souvent par des projets ciblés, à faible risque, pour démontrer rapidement la valeur ajoutée. On a lancé avec un petit projet de chatbot pour le service client , raconte Camille Dubreuil. En trois mois, on a réduit de moitié les appels entrants. Ça a convaincu la direction de continuer. Une autre clé est la collaboration entre métiers. L’IA ne doit pas être un projet purement technique, mais une initiative transverse. Il faut que les opérationnels soient impliqués dès le départ , insiste Raphaël Marchand. Enfin, la formation continue est essentielle. Des entreprises comme TechNova ont mis en place des programmes de montée en compétence pour leurs salariés. On a formé 300 collaborateurs à la data literacy en un an , précise Thibaut Lenoir. Ce n’est pas parce qu’ils deviennent des experts en IA, mais ils comprennent mieux ce qu’on fait, et ça facilite les projets.

Quel avenir pour l’IA dans les entreprises d’ici 2030 ?

Les experts s’accordent à penser que d’ici 2030, l’IA sera omniprésente dans les organisations, qu’elles soient grandes ou petites. Mais son adoption ne sera pas automatique. Elle dépendra de la capacité des entreprises à surmonter les obstacles actuels. Les régions et les secteurs qui investissent aujourd’hui seront les leaders de demain. Ceux qui hésitent trop longtemps risquent de se retrouver dans une position très difficile , prévient Raphaël Marchand. Par ailleurs, l’émergence de solutions d’IA plus accessibles, comme les plateformes low-code ou les services cloud pré-entraînés, pourrait accélérer l’adoption dans les PME. On voit déjà des outils simples qui permettent d’automatiser des tâches administratives ou de générer du contenu marketing , note Éléonore Vasseur. Ce sera un levier pour les plus petites structures.

Conclusion

L’intelligence artificielle n’est plus une promesse lointaine : elle transforme déjà les entreprises qui osent l’embrasser. Pourtant, derrière l’engouement, se cache une réalité complexe. Les écarts entre grandes entreprises et PME, entre secteurs et entre régions, risquent de se transformer en fractures si rien n’est fait. La clé du succès réside dans une approche pragmatique, humaine et progressive. Comme le souligne Malik Benhaddou : L’IA, ce n’est pas une révolution du jour au lendemain. C’est une évolution, mais elle doit commencer maintenant.

A retenir

Quel pourcentage de dirigeants voient l’IA comme un avantage concurrentiel ?

86 % des cadres dirigeants interrogés par KPMG estiment que les entreprises adoptant l’intelligence artificielle dans leur secteur développeront un avantage concurrentiel.

Quels secteurs sont les plus avancés dans l’adoption de l’IA ?

Le secteur pharmaceutique est particulièrement en pointe, notamment en recherche et développement. La finance et l’industrie manufacturière suivent de près, tandis que la distribution et l’artisanat restent en retrait.

Quelles sont les principales disparités géographiques ?

Les États-Unis et la Chine sont nettement en avance dans le déploiement de l’IA, soutenus par des politiques publiques ambitieuses et une culture d’innovation forte. L’Europe, bien que présente, accuse un certain retard en termes de coordination et de montée en échelle.

Quels sont les principaux freins à l’adoption de l’IA ?

Les obstacles incluent le manque de données de qualité, la pénurie de talents spécialisés, les coûts d’implémentation élevés et la résistance culturelle au sein des organisations.

Comment les entreprises peuvent-elles réussir leur intégration de l’IA ?

En commençant par des projets pilotes ciblés, en impliquant les équipes opérationnelles, en formant les collaborateurs et en adoptant une vision stratégique à long terme.