Une journée noire menace la clinique de Saint-Malo mardi 30 septembre

Le 30 septembre 2025 s’annonce comme une date charnière pour le secteur de la santé privée en France. Dans les 52 cliniques du groupe Vivalto, une mobilisation inédite est en préparation : une grève générale massive, portée par une intersyndicale unie (CGT, FO, Sud et CFTC), exige une revalorisation salariale globale pour tous les salariés. Ce mouvement, loin d’être une réaction soudaine, s’inscrit dans un climat de tension croissante entre les personnels soignants, administratifs et techniques, et une direction perçue comme sourde à leurs préoccupations. Alors que l’inflation pèse sur les budgets familiaux, les soignants réclament un traitement à la hauteur de leurs responsabilités. Ce n’est pas seulement une question d’argent, mais de reconnaissance, de justice sociale et de dignité au travail.

Pourquoi une grève générale est-elle annoncée ?

Le cœur du conflit réside dans une exigence simple mais ferme : l’augmentation générale des salaires. Contrairement aux augmentations ciblées ou aux primes ponctuelles, les syndicats refusent désormais le saupoudrage , cette pratique consistant à répartir de maigres enveloppes budgétaires à quelques privilégiés, laissant la majorité des salariés sur la touche. Magali Mahier, déléguée syndicale CGT à la clinique de la Côte d’Émeraude à Saint-Malo, explique avec une colère mesurée : Tous les ans, on nous parle des négociations annuelles obligatoires. Mais en réalité, ces discussions se transforment en loterie. Ceux qui ont le plus besoin d’augmenter leurs revenus ne sont jamais prioritaires. Et pendant ce temps, l’inflation grignote nos salaires, nos conditions de vie se dégradent.

Cette frustration s’est cristallisée lors du comité de groupe exceptionnel du 12 septembre 2025, où la direction a rejeté la demande d’augmentation générale. Ce refus a été perçu comme une fin de non-recevoir, confirmant aux yeux des syndicalistes que seul un mouvement fort, unitaire et visible permettrait de faire bouger les lignes. Le choix du 30 septembre n’est pas anodin : il s’inscrit dans une série de mobilisations sectorielles, mais vise surtout à marquer les esprits en frappant l’ensemble du réseau Vivalto en même temps.

Quels sont les enjeux derrière cette mobilisation ?

Une lutte pour l’équité salariale entre public et privé

Un des arguments centraux des syndicats est la disparité persistante entre les salaires du public et du privé. Nos collègues du public ont des grilles de rémunération claires, indexées sur l’indice de traitement. Nous, on est livrés à la bonne volonté des directions d’établissement , souligne Julien Rocher, infirmier en réanimation à la clinique de Dinan. Il ajoute : J’ai des amis qui font le même travail que moi, dans un CHU à Rennes. Ils gagnent 500 euros de plus par mois, pour des horaires comparables. Et pourtant, on parle souvent du privé comme du “secteur innovant”. Mais l’innovation, ce n’est pas de payer mal ceux qui la rendent possible.

La précarité des agents non-soignants

Le mouvement ne concerne pas seulement les infirmiers ou les aides-soignants. Il inclut aussi les agents de service, les secrétaires médicales, les techniciens de laboratoire. Pour beaucoup, ces personnels sont invisibles, pourtant indispensables. Élodie Tanguy, agent d’entretien à la clinique de Saint-Malo depuis huit ans, témoigne : Je nettoie les salles d’opération, je désinfecte les chambres. Si je ne fais pas bien mon travail, les patients risquent des infections. Et pourtant, je suis payée au SMIC, sans augmentation significative depuis 2022. Quand on parle de “revalorisation”, il faut qu’on soit dans le lot.

Cette inclusion de tous les métiers reflète une volonté de solidarité sectorielle. Les syndicats veulent montrer que la santé est un système complexe, où chaque maillon compte. Une grève qui ne concernerait que les soignants serait incomplète. C’est toute la chaîne de fonctionnement d’un établissement de santé qui se met en grève.

Quelles conséquences pour les patients ?

La question des patients est au cœur des débats. Les syndicats insistent sur leur responsabilité : aucune vie ne sera mise en danger. Mais ils rappellent aussi que la grève est un droit constitutionnel. Magali Mahier précise : Nous avons déjà fait quatre jours de grève en mars 2025. Les patients ont été accueillis, les urgences traitées. Mais nous ne pouvons pas garantir les interventions programmées. Ce n’est pas nous qui déprogrammons, c’est la direction qui doit décider, en fonction des effectifs présents.

À Saint-Malo, où la clinique emploie environ 170 personnes, l’impact pourrait être sensible. On ne bloque pas les urgences, on ne ferme pas les portes. Mais si 60 % des infirmiers sont en grève, il est impossible de maintenir toutes les chirurgies , explique Yann Le Goff, cadre de santé en chirurgie orthopédique. Ce que nous voulons, c’est que les patients comprennent que nous ne sommes pas contre eux, mais contre un système qui nous épuise.

Le risque, selon les syndicalistes, n’est pas tant dans l’immédiat que dans le long terme : Si on continue à brader les salaires, à surcharger les équipes, on va perdre des soignants. Et là, ce n’est plus une grève qui perturbera les soins, c’est la fermeture progressive des services.

Quelle est la réponse de la direction du groupe Vivalto ?

À ce stade, la direction du groupe Vivalto n’a pas souhaité s’exprimer publiquement. Dans un courrier interne, elle a réaffirmé son engagement en faveur des négociations constructives et rappelé que les NAO se tiennent chaque année. Mais cette réponse est perçue comme insuffisante. On n’a pas besoin de négociations, on a besoin de décisions , tranche Magali Mahier.

Le silence de la direction alimente la suspicion. Les syndicats s’interrogent sur la répartition des bénéfices. Vivalto est un groupe privé, souvent financé par des fonds d’investissement. On sait que les cliniques sont rentables. Alors pourquoi les salariés ne bénéficient pas de cette performance ? demande Julien Rocher. Des questions qui résonnent au-delà de Vivalto, touchant à la gouvernance des établissements de santé privés en France.

Un mouvement qui pourrait s’étendre ?

La grève du 30 septembre pourrait faire tache d’huile. D’autres groupes privés, comme Korian ou Elsan, sont déjà sous pression. À Rennes, des discussions informelles ont lieu entre syndicats de différents établissements. Ce qu’on vit à Vivalto, d’autres le vivent ailleurs , confie Sophie Arvel, déléguée FO à la clinique de l’Ouest. Si le mouvement est suivi, s’il montre qu’on peut gagner, d’autres suivront.

Le choix d’une grève générale, plutôt que locale, est stratégique. Il vise à dépasser les logiques de cloisonnement entre établissements. Avant, chaque clinique négociait seule. La direction jouait sur les différences régionales, les besoins locaux. Maintenant, on parle d’un seul bloc. On est 52 établissements, des milliers de salariés. On a de la force , affirme Magali Mahier.

Quel avenir pour les soignants du privé ?

La mobilisation du 30 septembre ne se limite pas à une revendication salariale. Elle pose une question plus large : quel modèle de santé privée voulons-nous ? Un modèle purement marchand, où la rentabilité prime sur les conditions de travail ? Ou un modèle qui intègre la dignité, la sécurité et la reconnaissance des personnels ?

Pour Élodie Tanguy, le choix est clair : Je ne veux pas qu’on me dise “merci” pendant que je galère pour payer mes factures. Je veux un salaire décent, un emploi stable, et qu’on me traite comme une professionnelle.

Les soignants espèrent que cette grève marquera un tournant. Non pas une victoire éphémère, mais le début d’un dialogue sérieux avec la direction, fondé sur l’équité et la transparence. On ne demande pas la lune, juste à vivre dignement de notre travail , conclut Yann Le Goff.

A retenir

Quel est l’objectif principal de la grève du 30 septembre 2025 ?

L’objectif principal est d’obtenir une augmentation générale des salaires pour tous les salariés des 52 cliniques du groupe Vivalto, sans distinction de poste ou de niveau hiérarchique. Les syndicats rejettent les augmentations ciblées et réclament une revalorisation collective face à l’inflation et aux disparités salariales.

Qui participe à cette grève ?

Le mouvement concerne tous les personnels des cliniques Vivalto : soignants (infirmiers, aides-soignants), agents de service, personnels administratifs et techniques. L’intersyndicale (CGT, FO, Sud, CFTC) a uni ses forces pour porter une action collective et solidaire.

Les patients seront-ils mis en danger ?

Non. Les syndicats affirment que les services d’urgence et les soins vitaux seront assurés. Cependant, certaines interventions programmées pourraient être déprogrammées en fonction de la présence effective du personnel. Les patients seront informés au jour le jour.

Pourquoi la direction a-t-elle refusé l’augmentation générale ?

La direction invoque les limites des enveloppes budgétaires attribuées à chaque établissement dans le cadre des NAO. Selon les syndicats, cette justification masque une priorité donnée à la rentabilité plutôt qu’au bien-être des salariés.

Y a-t-il eu des précédents de grève dans ce groupe ?

Oui. En mars 2025, une grève de quatre jours avait déjà eu lieu à la clinique de la Côte d’Émeraude à Saint-Malo, liée à la fermeture estivale et aux conditions de travail. Ce précédent montre une montée des tensions et une capacité d’action des personnels.

Conclusion

La grève du 30 septembre 2025 dans les cliniques Vivalto n’est pas seulement un conflit social. C’est un cri de colère, mais aussi un appel à la reconnaissance. Derrière les chiffres et les revendications, il y a des femmes et des hommes qui soignent, nettoient, administrent, et qui veulent simplement vivre dignement de leur travail. Ce mouvement, massif et coordonné, pourrait bien devenir un moment fondateur pour la santé privée en France, en imposant la question des salaires et des conditions de travail au cœur du débat public. Le silence de la direction ne durera pas éternellement. Face à une intersyndicale unie et déterminée, le temps de la réponse approche.