Alors que l’automne s’installe sur le territoire français, les masques réapparaissent discrètement dans les transports en commun, les établissements scolaires et certains lieux de travail. Ce retour discret d’un accessoire devenu familier pendant la pandémie s’accompagne d’un regain d’activité du virus SARS-CoV-2. Si les autorités sanitaires ne sonnent pas encore l’alerte maximale, plusieurs indicateurs pointent vers une poussée épidémique saisonnière, portée par un nouveau variant surnommé Frankenstein sur les réseaux sociaux. Entre données épidémiologiques, témoignages de terrain et préparatifs vaccinaux, voici un état des lieux de cette nouvelle phase de la crise sanitaire.
Le Covid-19 connaît-il une nouvelle vague en France ?
La question taraude les Français qui constatent un retour des mesures barrières dans certains espaces publics. Selon Santé Publique France, les indicateurs de circulation du virus montrent une augmentation progressive depuis mi-juillet. Le point de situation publié pour la semaine du 29 septembre au 5 octobre confirme une tendance à la hausse, bien que les niveaux restent encore inférieurs à ceux observés l’an dernier à la même période. Toutefois, le taux d’incidence des cas de Covid-19 vus en cabinet de médecine générale atteint désormais 51 cas pour 100 000 habitants — un chiffre stable par rapport à la semaine précédente, mais dix fois supérieur à celui enregistré en février 2025. Ce creux observé en début d’année, suivi d’une remontée progressive, suggère un cycle saisonnier bien établi.
Pourquoi le rebond automnal est-il difficile à mesurer ?
La précision des données épidémiologiques a été affectée par la réduction des méthodes de surveillance. Moins de tests PCR sont réalisés, et la déclaration des cas positifs n’est plus obligatoire. Cela rend plus complexe la détection en temps réel de l’ampleur du rebond. On navigue à vue , confie Élodie Rivière, médecin généraliste à Lyon. Les patients arrivent avec des symptômes grippaux, mais rares sont ceux qui font un test. On traite les symptômes, sans toujours savoir si c’est le Covid, un autre virus ou une forme résiduelle de fatigue post-virale.
Cependant, un indicateur reste fiable : la surveillance des eaux usées. Depuis plusieurs semaines, la concentration du virus dans les réseaux d’assainissement augmentait régulièrement. Mais la dernière analyse indique un ralentissement de cette progression, voire une stabilisation au niveau national. Ce n’est pas encore une décélération franche, mais c’est un signe encourageant , précise le bulletin de Santé Publique France. Le pic pourrait-il être proche ? Rien n’est certain, mais la vigilance reste de mise.
Quel est l’impact sur le système hospitalier ?
Les hospitalisations liées au Covid-19 ont augmenté, passant de 0,9 % à 1,1 % du total des admissions. Le nombre de passages aux urgences pour suspicion ou confirmation de Covid s’élève à 2 054, soit 0,6 % des entrées. Ce chiffre, bien que modeste, traduit une pression réelle sur les services. À l’hôpital Cochin à Paris, le Dr Antoine Mercier, chef du service des maladies infectieuses, observe une situation tendue. Nous avons vu arriver plusieurs patients âgés, fragiles, avec des formes sévères. Certains avaient été contaminés dans leur entourage familial, sans même s’en rendre compte.
Les 65 ans et plus représentent la majorité des hospitalisations (635), suivis par les 15-64 ans (110), tandis que les enfants de 5 à 14 ans ne comptabilisent qu’un seul cas. Aucune hospitalisation n’a été signalée chez les moins de 5 ans. Six patients ont été admis en réanimation après passage aux urgences pour Covid-19 ou suspicion de Covid-19. Ce n’est pas une vague comparable à celles de 2020 ou 2021, tempère le Dr Mercier, mais chaque admission supplémentaire pèse dans un contexte de pénurie de personnel et de saturation chronique des services.
Le variant XFG, surnommé Frankenstein , est-il plus dangereux ?
Le rebond actuel est principalement attribué au variant XFG, rapidement surnommé Frankenstein sur les réseaux sociaux en raison de sa composition génétique complexe. Issu de recombinants de plusieurs sous-lignages d’Omicron, ce variant suscite des inquiétudes, mais les scientifiques rassurent : il ne présente pas de virulence accrue. Il n’est pas plus pathogène, mais il est plus transmissible , explique la virologue Claire Fontaine, chercheuse à l’Institut Pasteur. C’est typique des variants dominants : ils se propagent mieux, mais ne tuent pas forcément plus.
Le nom Frankenstein , bien qu’accrocheur, est trompeur. Il évoque une créature monstrueuse, alors que le variant, selon les données disponibles, ne provoque pas de formes plus graves. C’est un piège médiatique , regrette Claire Fontaine. Cela alimente la peur alors que la priorité est de faire passer le message de prévention, pas de dramatiser.
Comment les Français réagissent-ils à ce nouveau rebond ?
Les comportements varient fortement selon les générations et les régions. À Bordeaux, Léa Béranger, 34 ans, consultante en santé publique, a repris le masque dans le tramway. Je vis avec mon père, qui est immunodéprimé. Même si le risque est moindre qu’avant, je ne veux pas prendre de chance. En revanche, son collègue Julien, 28 ans, estime que le Covid, c’est du passé. On a tous été contaminés plusieurs fois. Maintenant, on a l’immunité.
Dans les écoles, les réactions sont contrastées. À Rennes, une enseignante de CM2, Chloé Desmarais, rapporte que plusieurs élèves ont été absents la semaine dernière pour des symptômes respiratoires. Les parents nous disent qu’ils ont fait un test rapide, positif au Covid, mais ils ne sont pas obligés de le déclarer. On est dans le flou total.
Cette désinformation ou cette indifférence croissante inquiète les professionnels de santé. Le problème, ce n’est pas le virus, c’est l’apathie , souligne Élodie Rivière. On a perdu le réflexe de prévention. Or, les personnes vulnérables, elles, sont toujours exposées.
Quelles mesures sont prises pour limiter la propagation ?
Le ministère de la Santé a annoncé le lancement d’une nouvelle campagne de vaccination à partir du 14 octobre. Elle cible prioritairement les personnes âgées de plus de 65 ans, les personnes immunodéprimées, et celles souffrant de comorbidités. Le vaccin proposé est adapté au variant XFG, comme cela a été le cas pour les campagnes précédentes.
Cette vaccination est cruciale , insiste Claire Fontaine. Elle ne garantit pas une protection totale contre l’infection, mais elle réduit fortement le risque de forme grave, d’hospitalisation et de décès.
La campagne se déroulera en parallèle de celle contre la grippe, ce qui devrait faciliter l’accès pour les patients. Les centres de vaccination, les pharmacies et les médecins généralistes seront mobilisés. On espère une meilleure adhésion que l’an dernier , confie le Dr Mercier. L’année dernière, on a eu du mal à convaincre. Cette année, avec le retour des symptômes, peut-être que les gens seront plus réceptifs.
Le masque doit-il redevenir obligatoire dans certains lieux ?
Pour l’instant, aucune obligation nationale n’a été réinstaurée. Cependant, certaines entreprises, établissements scolaires et hôpitaux ont décidé de réintroduire le port du masque dans les espaces clos. À l’hôpital de Nantes, par exemple, le personnel soignant est invité à le porter dans les services de gériatrie. Ce n’est pas une obligation, mais une recommandation forte , précise la direction.
En région Île-de-France, plusieurs lignes de bus et de tram ont vu un retour spontané du masque parmi les usagers, sans injonction officielle. Je le mets quand il y a du monde , témoigne Marc, 72 ans, retraité. Je ne veux pas retomber malade comme l’an dernier. J’ai mis deux mois à m’en remettre.
Quelle est la stratégie à long terme face au Covid-19 ?
Le Covid-19 semble s’inscrire désormais dans une logique de maladie saisonnière, comme la grippe. La stratégie sanitaire évolue en conséquence : surveillance ciblée, campagnes vaccinales annuelles, protection des plus vulnérables. On passe d’une gestion de crise à une gestion endémique , résume Claire Fontaine. Cela demande plus de responsabilité individuelle, mais aussi une meilleure communication publique.
Le défi reste de concilier liberté individuelle et protection collective. On ne peut pas vivre en permanence en état d’alerte, reconnaît Élodie Rivière. Mais on ne peut pas non plus ignorer que des gens meurent encore du Covid, surtout parmi les plus fragiles.
Conclusion
Le rebond automnal du Covid-19 en France n’atteint pas les sommets des vagues précédentes, mais il rappelle que le virus circule toujours. Porté par un variant plus contagieux, il touche surtout les personnes âgées et vulnérables. La campagne de vaccination du 14 octobre sera un test crucial de l’engagement collectif. Entre vigilance sanitaire et fatigue pandémique, la société française doit trouver un nouvel équilibre — durable, responsable, et humain.
A retenir
Le taux d’incidence du Covid-19 est-il en hausse ?
Oui, le taux d’incidence estimé par Santé Publique France est de 51 cas pour 100 000 habitants, un niveau stable sur une semaine mais dix fois supérieur à celui de février 2025. Cette augmentation s’inscrit dans un rebond automnal progressif.
Le variant XFG est-il plus dangereux ?
Non, selon les scientifiques. Le variant XFG, surnommé Frankenstein , est plus transmissible, mais ne présente pas de virulence accrue. Il provoque des formes comparables aux variants précédents.
Les hôpitaux sont-ils saturés ?
Non, pas pour l’instant. Les hospitalisations liées au Covid augmentent légèrement, passant à 1,1 % du total, mais Santé Publique France indique qu’il n’y a pas encore de répercussion notable sur le système de soins . La vigilance reste toutefois de mise.
Quand commence la nouvelle campagne de vaccination ?
La campagne de vaccination contre le Covid-19, adaptée au variant XFG, débute le 14 octobre 2025. Elle cible les personnes vulnérables, notamment les plus de 65 ans et les immunodéprimés, et se déroule en parallèle de la campagne contre la grippe.
Le masque est-il de nouveau obligatoire ?
Non, il n’est pas obligatoire au niveau national. Toutefois, certaines structures (hôpitaux, écoles, entreprises) recommandent ou imposent son port dans les espaces clos, notamment pour protéger les personnes fragiles.