Alors que l’automne s’installe et que les familles se préparent à profiter des vacances de la Toussaint, les valises s’allègent parfois de vêtements superflus, mais jamais du précieux trio : chargeur, écouteurs, et batterie externe. Ce petit boîtier rectangulaire, souvent glissé dans une poche de veste ou un sac à main, est devenu un allié incontournable du voyageur moderne. Pourtant, derrière son apparence anodine, il suscite désormais une attention particulière dans les aéroports du monde entier. Les compagnies aériennes, soucieuses de sécurité, resserrent peu à peu leur contrôle sur ces dispositifs. Et si votre powerbank vous empêchait de monter à bord ?
La batterie externe, indispensable mais potentiellement dangereuse ?
On l’emporte partout : en randonnée, au festival, dans les transports en commun, et surtout en avion. La batterie externe, ou powerbank, permet de recharger son smartphone, sa tablette ou ses écouteurs sans dépendre d’une prise murale. Mais cette liberté a un prix : la technologie lithium-ion qui la fait fonctionner est instable sous certaines conditions. En cas de surchauffe, de choc ou de défaut de fabrication, elle peut s’enflammer spontanément. Un risque minime, mais réel.
En 2024, un incident sur un vol intérieur aux États-Unis a mis les compagnies en alerte : une batterie mal rangée dans un bagage en soute a pris feu en plein vol, obligeant l’équipage à intervenir rapidement. Bien que l’avion ait atterri sans dommage, l’alerte a été suffisante pour que plusieurs transporteurs révisent leurs politiques. La batterie externe, longtemps considérée comme un simple accessoire, est désormais traitée comme un équipement potentiellement dangereux.
Clémentine Ravel, ingénieure en sécurité aérienne et consultante pour plusieurs compagnies européennes, explique : Le lithium-ion est une technologie performante, mais fragile. Une batterie abîmée, même légèrement, peut devenir un foyer d’incendie. Et en altitude, dans un environnement confiné, les conséquences peuvent être dramatiques.
Quelles sont les règles internationales en vigueur ?
L’Organisation internationale du transport aérien (IATA) fixe des normes claires pour le transport des batteries lithium-ion, y compris les batteries externes. Ces règles, adoptées par la majorité des compagnies, reposent sur un critère essentiel : la capacité, mesurée en wattheures (Wh).
Les passagers peuvent transporter jusqu’à deux batteries externes en cabine, sous certaines conditions :
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En dessous de 100 Wh : autorisation automatique, sans déclaration.
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Entre 100 et 160 Wh : autorisation préalable requise auprès de la compagnie.
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Au-delà de 160 Wh : interdiction totale pour les passagers.
La capacité est généralement indiquée sur le boîtier ou sur l’emballage. Pour les modèles les plus courants — ceux vendus dans les grandes surfaces ou les boutiques en ligne — la plupart se situent entre 20 et 50 Wh, ce qui les rend parfaitement conformes. Mais les versions haute capacité, destinées aux professionnels ou aux voyageurs longue durée, peuvent dépasser les 100 Wh sans que l’utilisateur en soit toujours conscient.
Thomas Berthier, pilote de ligne chez Air France depuis douze ans, précise : On ne voit pas souvent des passagers avec des batteries de 160 Wh, mais il arrive que des gens emportent des modèles industriels, pensant qu’ils sont autorisés. Ce genre d’erreur peut entraîner des retards ou des confiscations à l’embarquement.
Pourquoi la soute est-elle interdite pour les batteries externes ?
La règle est stricte : aucune batterie externe, quelle que soit sa capacité, ne peut être placée dans les bagages en soute. La raison ? La difficulté de détecter et d’éteindre un feu en soute. Contrairement à la cabine, où les hôtesses et stewards peuvent réagir rapidement, une prise de feu dans les compartiments inférieurs est plus complexe à gérer.
En 2023, un rapport de l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) a montré que les incendies de batteries en soute, bien que rares, représentent un risque disproportionné par rapport à leur fréquence. Les systèmes d’extinction automatique ne sont pas toujours efficaces contre les feux de lithium, qui peuvent se rallumer spontanément.
Élodie Gagnier, responsable sûreté à l’aéroport de Lyon, témoigne : On a intercepté une batterie dans un bagage enregistré la semaine dernière. Elle était abîmée, avec une légère déformation. On l’a immédiatement isolée. Ces objets doivent rester à portée de main, c’est une question de sécurité collective.
Emirates impose une interdiction totale d’utilisation en vol
À compter du 1er octobre 2025, Emirates devient la première grande compagnie à interdire formellement l’utilisation des batteries externes à bord. Les passagers peuvent transporter une seule unité de moins de 100 Wh, mais elle doit rester éteinte, débranchée et rangée pendant toute la durée du vol. Même la recharge via les prises USB des sièges est interdite.
La décision, saluée par certains experts, surprend d’autres. C’est une mesure préventive forte, mais cohérente , analyse Clémentine Ravel. En interdisant l’usage, Emirates réduit les risques de surchauffe liés à la charge simultanée de plusieurs appareils. Et surtout, cela permet à l’équipage de garder le contrôle de la situation en cas d’incident.
Le choix d’Emirates pourrait faire école. Plusieurs compagnies asiatiques et du Moyen-Orient étudient actuellement des restrictions similaires. En attendant, des transporteurs comme Qatar Airways ou Etihad recommandent déjà de ne pas utiliser les powerbanks pendant les phases critiques du vol — décollage et atterrissage.
En revanche, les grandes compagnies européennes comme Air France-KLM, Lufthansa ou Iberia, ainsi que les asiatiques Singapore Airlines et Cathay Pacific, n’ont pas encore adopté cette interdiction. Elles autorisent l’utilisation en cabine, à condition que la batterie soit conforme et que son usage reste raisonnable.
Low-cost : mêmes règles, mais tolérance en vol
Les compagnies à bas coût, souvent perçues comme plus laxistes, appliquent en réalité les mêmes règles de sécurité. Ryanair, easyJet ou Wizz Air exigent que les batteries externes soient transportées en cabine, avec une capacité inférieure à 100 Wh. En revanche, elles autorisent leur utilisation une fois en vol, tant que les passagers respectent les consignes de sécurité.
Un contraste qui n’échappe pas à Julien Mercier, voyageur fréquent et blogueur tech : J’ai pris un vol Ryanair récemment, et j’ai vu une dizaine de personnes utiliser leur powerbank. Personne n’a été interpellé. Mais sur un vol Emirates, ça aurait été impossible. C’est un peu le Far West, mais tant que les règles de base sont respectées, ça passe.
Comment éviter les mauvaises surprises à l’aéroport ?
Les agents de sûreté ont le droit de confisquer une batterie externe jugée suspecte — abîmée, sans étiquette de puissance, ou dépassant les limites autorisées. Pour éviter tout incident, plusieurs gestes simples s’imposent :
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Vérifiez la capacité en wattheures (Wh) sur le boîtier ou l’emballage.
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Transportez-la uniquement en cabine, jamais en soute.
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Gardez-la éteinte pendant le vol, surtout si vous voyagez avec Emirates.
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Sortez-la lors du passage au contrôle de sécurité, comme vous le feriez pour votre ordinateur.
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Évitez de la laisser branchée sans surveillance, notamment dans les aéroports où les prises publiques sont sollicitées.
Un conseil souvent oublié : ne voyagez pas avec une batterie ancienne ou gonflée. Même si elle fonctionne encore, elle représente un risque accru. J’ai vu des passagers essayer de sauver une batterie défectueuse, raconte Élodie Gagnier. Ils pensent que “ça passera”. Mais on préfère être prudent.
Le futur du transport des batteries externes en avion
La tendance est claire : les compagnies aériennes veulent plus de contrôle sur les appareils électroniques embarqués. Après les interdictions de certains modèles de smartphones (comme le Galaxy Note 7 en 2016), c’est au tour des batteries externes de passer sous la loupe.
Des discussions sont en cours au sein de l’IATA pour harmoniser les règles d’usage, au-delà des seules capacités autorisées. L’idée serait d’imposer une norme internationale d’utilisation en vol, similaire à celle d’Emirates. Ce n’est pas une question de confort, mais de prévention , insiste Clémentine Ravel. Plus on standardise, moins on laisse de place à l’interprétation.
En parallèle, certains fabricants anticipent le mouvement. Anker, marque leader sur le marché, a lancé en 2024 une gamme de powerbanks “voyage aérien”, avec un indicateur de sécurité visible, une coque ignifugée, et une capacité limitée à 99 Wh pour rester dans la zone autorisée sans formalité.
Conclusion : la prudence avant tout
La batterie externe n’est pas (encore) interdite. Elle reste un outil utile, voire indispensable, pour de nombreux passagers. Mais son statut a changé : elle n’est plus un gadget, mais un équipement soumis à des règles strictes. Le cas d’Emirates montre que les compagnies sont prêtes à aller plus loin, au nom de la sécurité.
Avant chaque vol, prenez deux minutes pour vérifier les consignes de votre transporteur. Un simple coup d’œil sur son site peut vous éviter une confiscation, un retard, ou pire, un refus d’embarquement. Et si vous hésitez, privilégiez la déconnexion : chargez vos appareils avant le départ, téléchargez vos films et musiques, et profitez du vol pour vous détendre. Comme le dit Julien Mercier : J’ai testé un vol sans powerbank. Au début, j’étais stressé. Au bout de deux heures, je lisais un livre. C’était pas mal du tout.
FAQ
Peut-on emporter plusieurs batteries externes en cabine ?
Oui, la plupart des compagnies autorisent jusqu’à deux batteries externes de moins de 100 Wh en cabine. Au-delà, ou pour des modèles entre 100 et 160 Wh, une autorisation préalable est nécessaire.
Pourquoi ne peut-on pas les mettre en soute ?
Les batteries lithium-ion peuvent s’enflammer en cas de surchauffe ou de choc. En soute, un incendie est plus difficile à détecter et à éteindre. Pour cette raison, elles doivent rester en cabine, à portée de vue.
Que faire si ma batterie n’indique pas sa capacité en Wh ?
La capacité peut parfois être calculée : multipliez la tension (V) par l’ampérage (Ah). Si l’étiquette indique seulement le mAh (milliampères-heure), divisez ce nombre par 1000, puis multipliez par la tension (souvent 3,7 V). Exemple : 20 000 mAh × 3,7 V / 1000 = 74 Wh.
Les compagnies low-cost sont-elles plus tolérantes ?
Non. Ryanair, easyJet et autres appliquent les mêmes règles de sécurité. La seule différence est qu’elles autorisent souvent l’utilisation en vol, contrairement à Emirates.
Peut-on utiliser sa batterie externe pendant le vol ?
Sur la plupart des compagnies, oui, tant qu’elle est conforme. Mais Emirates interdit formellement son usage à bord à partir d’octobre 2025. Vérifiez toujours les consignes spécifiques de votre vol.
A retenir
Quelle est la règle principale pour emporter une batterie externe en avion ?
Elle doit être transportée en cabine, jamais en soute, et sa capacité ne doit pas dépasser 100 Wh sans autorisation. Elle doit rester éteinte si la compagnie l’exige, comme c’est le cas avec Emirates.
Quel est le risque d’une batterie externe en avion ?
Le risque principal est un départ de feu lié à la technologie lithium-ion. Même s’il est rare, il est suffisamment sérieux pour que les compagnies renforcent leurs contrôles.
Faut-il s’attendre à une interdiction généralisée de l’usage des powerbanks ?
Pas dans l’immédiat, mais la tendance est à la restriction. Emirates a ouvert la voie, et d’autres compagnies pourraient suivre, surtout si des incidents se multiplient.