En ville, ces gestes simples sauvent les hérissons chaque hiver

Chaque hiver, dans les jardins, les parcs et les friches urbaines, des dizaines de milliers de hérissons s’enroulent sur eux-mêmes, cherchant un refuge silencieux pour traverser les mois les plus froids. Pourtant, ce rituel ancestral, essentiel à leur survie, devient de plus en plus périlleux en milieu urbain. Confrontés à une nature aménagée, fragmentée et parfois hostile, ces petits mammifères aux allures de boules d’épines peinent à trouver les ressources nécessaires pour hiberner sereinement. Loin d’être invincibles, les hérissons sont profondément vulnérables. Mais chaque geste compte. À travers des témoignages de citoyens engagés et des recommandations concrètes, découvrez comment, simplement, vous pouvez devenir un allié précieux de ces sentinelles nocturnes de la biodiversité.

Quelles sont les principales menaces pour les hérissons en hiver ?

En milieu naturel, les hérissons s’installent dans des cavités forestières, sous des tas de feuilles ou dans des terriers abandonnés pour entamer leur hibernation. Mais en ville, ces espaces disparaissent. Les jardins sont de plus en plus entretenus, les haies taillées, les feuilles ramassées, les espaces verts bétonnés. Résultat : les hérissons manquent d’abris sûrs. Léa Boulanger, habitante de Bordeaux et membre d’une association locale de protection de la faune, raconte : J’ai trouvé un hérisson sous mon compost en janvier, tremblant, à découvert. Il n’avait nulle part où se cacher. Il faisait moins 2 degrés cette nuit-là. Ce genre de situation est de plus en plus fréquent. Sans refuge isolé, l’animal ne parvient pas à maintenir sa température corporelle, ce qui peut entraîner un réveil prématuré et une perte d’énergie fatale. De plus, la nourriture naturelle — insectes, vers, limaces — se raréfie en hiver, et encore davantage dans les zones bétonnées où les sols sont appauvris ou traités chimiquement. Les hérissons affaiblis ont alors moins de chances de survivre jusqu’au printemps.

Comment créer un abri sécurisé pour les hérissons ?

Un abri bien conçu peut faire la différence entre la vie et la mort. Il doit être à l’abri des intempéries, des prédateurs et des perturbations humaines. Thomas Rey, paysagiste à Lyon, a intégré cette réflexion dans ses aménagements : J’installe désormais des cabanes en bois dans un coin ombragé du jardin, orientées au sud pour capter un peu de chaleur. Je les remplis de paille, de feuilles mortes, et je recouvre le tout d’un vieux tissu imperméable. Ces abris peuvent être achetés ou fabriqués soi-même. L’essentiel est qu’ils soient stables, isolants et discrets. Il est également recommandé de laisser certains recoins du jardin sauvages . Un tas de branches, un coin de compost non retourné ou un massif de plantes vivaces non taillées en automne deviennent des sanctuaires naturels. Émilie Serrano, retraitée à Toulouse, témoigne : Depuis que j’ai cessé de tout nettoyer, j’ai vu trois hérissons différents traverser mon jardin. L’un d’eux a même hiberné sous mon cabanon.

Quels matériaux utiliser pour un abri efficace ?

Le bois est idéal pour sa capacité isolante. Une caisse en bois, surélevée du sol pour éviter l’humidité, recouverte d’un toit étanche, et garnie de matières organiques (feuilles, paille, foin), reproduit les conditions naturelles d’hibernation. Il est crucial d’éviter les matériaux synthétiques ou plastiques, qui ne respirent pas et peuvent provoquer de la condensation. L’entrée doit être étroite, d’environ 12 cm de diamètre, pour empêcher les renards ou les chats d’y pénétrer. Certains jardiniers ajoutent une petite rampe d’accès pour faciliter l’entrée, surtout si le sol est irrégulier.

Quels dangers domestiques faut-il éliminer dans son jardin ?

Le jardin, censé être un lieu de vie, peut devenir une zone à risques mortels pour les hérissons. Les bassins d’eau, par exemple, sont des pièges fréquents. Les animaux, en quête d’humidité ou de nourriture, peuvent tomber et ne pas réussir à remonter. Clément Marchand, habitant de Nantes, a perdu deux hérissons en un hiver à cause de son étang : Je ne m’en rendais pas compte. Ils nageaient, mais n’avaient aucun point de sortie. Depuis, il a installé une échelle en bois et un filet flottant. Maintenant, je les vois grimper tranquillement.

Comment adapter son entretien de jardin à la présence de hérissons ?

Les outils motorisés sont une menace majeure. Une tondeuse ou une débroussailleuse peut blesser grièvement un hérisson endormi sous un tas de feuilles. Il est essentiel de vérifier visuellement les zones à entretenir, surtout en automne et au début de l’hiver. De même, les produits chimiques — pesticides, herbicides, raticides — doivent être bannis. Ils contaminent la chaîne alimentaire : un hérisson qui mange un insecte empoisonné absorbe lui aussi les toxines. Camille Dubreuil, maraîchère bio à Rennes, explique : J’utilise des purins d’ortie, des pièges à bière pour les limaces, et j’encourage les auxiliaires naturels. Depuis, j’ai plus de biodiversité, et les hérissons viennent régulièrement.

Quelle alimentation proposer sans nuire ?

Il est tentant de nourrir les hérissons, surtout lorsqu’on les voit errer la nuit. Mais toute alimentation doit être réfléchie. Les croquettes pour chats sans céréales ni lait sont une bonne option. Évitez absolument le lait, lourd en lactose : il provoque des diarrhées sévères, souvent mortelles. Les aliments sucrés, salés ou gras sont également interdits. Un bol d’eau fraîche, renouvelé quotidiennement, est indispensable, surtout si les températures restent positives. En cas de gel, il faut le remplacer par de l’eau tiède ou utiliser un récipient isolé. Solène Leroux, étudiante en biologie à Montpellier, a mis en place un petit poste de nourrissage : J’ai installé une cabane en dessous pour protéger la nourriture de la pluie. Un hérisson vient chaque soir. Je le vois prendre force.

Pourquoi ne pas suralimenter les hérissons ?

Un apport excessif de nourriture peut empêcher l’animal de se préparer naturellement à l’hibernation. Le hérisson doit accumuler des réserves de graisse, mais pas trop vite ni trop tard. Une alimentation trop riche ou trop tardive peut retarder l’entrée en hibernation, le laissant exposé aux grands froids. Il est donc préférable de nourrir modérément, surtout en automne, et de réduire progressivement en décembre, sauf si l’hiver est doux et que l’animal reste actif.

Comment limiter les risques liés à la circulation ?

Les routes sont l’un des principaux facteurs de mortalité des hérissons. Leurs déplacements nocturnes les exposent aux véhicules, surtout dans les zones résidentielles où la vitesse n’est pas toujours maîtrisée. En région parisienne, une étude a montré que près de 40 % des hérissons trouvés morts l’avaient été sur la chaussée. Julien Ferrand, élu local à Orléans, a mené une campagne de sensibilisation : Nous avons installé des panneaux “Attention hérissons” dans les quartiers boisés. Nous avons aussi lancé un appel aux riverains pour rouler lentement la nuit.

Quelles actions collectives peuvent être mises en place ?

Les initiatives citoyennes portent leurs fruits. À Strasbourg, un groupe de voisins a créé un corridor hérisson en perçant des trous de 13 cm dans les murets séparant les jardins. Avant, ils étaient coincés, raconte Manon Lefebvre, coordinatrice du projet. Maintenant, ils circulent librement, sans traverser les rues. Ces petits passages, simples à réaliser, permettent aux animaux de se déplacer en sécurité. Des collectifs se forment aussi pour surveiller les zones à risques et signaler les passages dangereux aux municipalités.

Pourquoi ne pas déranger un hérisson en hibernation ?

Un hérisson en hibernation paraît inerte, mais il est en état de torpeur. Son métabolisme est ralenti, son cœur bat très lentement. Tout réveil brutal — dû à un dérangement, un bruit ou un changement de température — coûte énormément d’énergie. S’il ne parvient pas à se rendormir rapidement, il peut épuiser ses réserves et mourir avant le réveil printanier. Si vous découvrez un hérisson endormi, observez-le discrètement. Ne le touchez pas, ne le déplacez pas, sauf s’il est en danger immédiat (feu, inondation, travaux). Dans ce cas, contactez un centre de soins pour la faune sauvage.

Pourquoi agir pour les hérissons est-il essentiel ?

Les hérissons sont des alliés naturels du jardinier. Un seul animal peut consommer des milliers d’insectes nuisibles par an : limaces, vers gris, araignées rouges. Leur disparition aurait un impact direct sur l’équilibre des écosystèmes urbains. Or, selon l’Observatoire de la faune sauvage, leur population a chuté de plus de 30 % en vingt ans en France. Les causes ? La perte d’habitats, les collisions routières, les produits chimiques, et le réchauffement climatique, qui perturbe leurs cycles biologiques. Aider un hérisson à passer l’hiver, c’est participer à la préservation d’une espèce emblématique, mais aussi à la santé globale de notre environnement.

A retenir

Que faire si je trouve un hérisson actif en hiver ?

Un hérisson qui se déplace par grand froid peut être en difficulté. S’il est petit, maigre ou semble désorienté, il a peut-être besoin d’aide. Dans ce cas, mettez-le dans une boîte isotherme avec une bouillotte chaude (pas brûlante), nourrissez-le légèrement avec des croquettes, et contactez un centre de soins. Ne le gardez pas chez vous plus de quelques heures.

Est-il utile d’installer une caméra pour surveiller un abri ?

Les caméras thermiques ou nocturnes peuvent être intéressantes pour observer sans déranger. Mais il faut éviter toute source de lumière ou de bruit. L’idéal est de filmer à distance, sans interaction. Certaines associations partagent ces images pour sensibiliser le public.

Peut-on avoir plusieurs hérissons dans un même jardin ?

Oui, surtout si les ressources sont suffisantes. Les hérissons sont solitaires, mais ils peuvent partager un même territoire sans conflit. Il n’est pas rare d’observer plusieurs individus dans un jardin bien aménagé, surtout en automne, avant l’hibernation.

Que faire en cas de découverte d’un hérisson mort ?

Signalez-le à une association de protection de la faune ou à un muséum. Cela permet d’alimenter les données sur les causes de mortalité et d’adapter les actions de conservation.