L’arnaque de la siembra en France vole vos biens en 10 sec

Il est 17 heures dans le parking d’un supermarché de province. Sophie Lambert, architecte de 38 ans, sort les bras chargés de sacs remplis de courses. Alors qu’elle se dirige vers sa voiture, un éclat métallique attire son attention près de sa portière. Une pièce de deux euros brille sous le soleil couchant. « J’ai cru l’avoir fait tomber en cherchant mes clés », raconte-t-elle. Ce simple réflexe aurait pu lui coûter cher : à cet instant précis, un homme en veste noire s’approche de son véhicule, ouvre discrètement la portière arrière et s’empare de son sac à main posé sur le siège passager. Heureusement, Sophie, alertée par le mouvement du rétroviseur, l’interpelle avant qu’il ne s’enfuie. Cette scène, malheureusement banale, illustre l’efficacité d’une arnaque qui sévit désormais en France : la « méthode de la siembra ».

Pourquoi cette arnaque fait-elle des victimes parmi les automobilistes ?

La « siembra » (« semence » en espagnol) est une technique d’escroquerie née en Espagne dans les années 2010. Son succès tient à sa simplicité déconcertante : un objet laissé intentionnellement au sol près d’un véhicule sert de leurre pour détourner l’attention du conducteur. « C’est un jeu de manipulation psychologique », explique Marc Aubert, expert en sécurité. « La victime, persuadée d’avoir perdu quelque chose, se concentre sur le sol, offrant un créneau parfait à un complice pour agir. »

Les lieux favoris des escrocs ? Les parkings de supermarchés, stations-service et zones commerciales, souvent fréquentés par des personnes seules et chargées de sacs. « Le timing est crucial », confirme Thomas Renaud, victime de ce stratagème à Bordeaux. « J’ai vu une clé USB par terre, à deux mètres de ma voiture. En me baissant pour la ramasser, j’ai entendu un bruit de portière. Mon téléphone et mon portefeuille avaient disparu. »

Quels sont les profils les plus vulnérables ?

Les arnaqueurs ciblent généralement les femmes, les seniors et les jeunes parents occupés à gérer enfants ou courses. « La distraction est leur meilleure alliée », note le lieutenant Camille Moreau, de la police municipale de Lyon. « Une personne qui discute au téléphone ou qui est pressée par le temps est un candidat idéal. » En 2023, 62 % des victimes recensées étaient des femmes de plus de 45 ans, souvent surprises par le caractère inoffensif du leurre.

Comment cette escroquerie se déroule-t-elle concrètement ?

Le scénario type se décompose en trois étapes. D’abord, le leurre : un objet brillant (pièce, bijou, clé USB) est placé près d’un véhicule. Ensuite, l’approche : la victime, intriguée, s’approche pour récupérer l’objet. Enfin, l’exécution : un complice, souvent en moto ou en voiture, intervient pour voler les affaires visibles. « Ils opèrent en 10 à 15 secondes », précise Emma Fabre, victime à Toulouse. « J’ai vu un collier en or par terre. En me penchant, j’ai senti une présence derrière moi. Quand je me suis redressée, mon sac à main avait disparu. »

Pourquoi ce stratagème est-il difficile à déjouer ?

La rapidité d’exécution et l’absence de violence physique désarment les victimes. « On ne pense pas à un danger en plein jour, dans un lieu public », souligne Pauline Vidal, psychologue spécialisée en comportement criminel. « Le cerveau interprète l’objet comme un cadeau potentiel, pas une menace. » De plus, les complices agissent souvent en tandem, l’un occupant la victime tandis que l’autre agit. « Ils exploitent notre réflexe de curiosité », ajoute Marc Aubert. « Même les personnes méfiantes peuvent tomber dans le piège. »

Quelles précautions concrètes adopter pour se protéger ?

La vigilance reste le premier rempart. « Avant d’approcher de votre voiture, observez les alentours », conseille le lieutenant Moreau. « Si vous trouvez un objet suspect près de votre portière, ignorez-le. » Sophie Lambert, qui a échappé au vol, a adopté une routine : « Je vérifie mes rétroviseurs, je regarde autour de moi, et je m’assure que mes affaires sont rangées. »

Comment sécuriser ses biens dans l’habitacle ?

  • Rangez tout objet visible dans le coffre avant d’arriver à destination.
  • Évitez de laisser des documents personnels (passeport, carte bancaire) dans la boîte à gants.
  • Utilisez un sac anti-rembourrage pour dissimuler les effets de valeur.

Thomas Renaud, après son expérience, a investi dans une mallette sécurisée : « Dès que je monte en voiture, je verrouille mes affaires dans ce coffret métallique. »

Quels gestes simples réduisent les risques ?

Préparer ses clés avant d’atteindre le véhicule permet d’entrer rapidement, limitant le temps d’exposition. « J’ai toujours mes clés en main », confie Emma Fabre. « Même si je dois fouiller dans mon sac, je le fais à l’abri, une fois assise. » Par ailleurs, privilégier les parkings surveillés ou éclairés réduit les opportunités pour les arnaqueurs. « Les caméras de surveillance sont un frein psychologique », explique Marc Aubert. « Les escrocs préfèrent les zones aveugles. »

Que faire si on est victime de cette arnaque ?

La première étape est de signaler l’incident aux forces de l’ordre dans les 48 heures. « Plus vite on dépose plainte, plus les chances de récupérer les biens sont grandes », souligne le lieutenant Moreau. Il faut également alerter sa banque en cas de vol de carte ou de chéquier. Sophie Lambert a eu recours à un service de géolocalisation pour son téléphone : « En activant le mode antivol, j’ai pu retrouver mon appareil deux jours plus tard dans un magasin de recyclage. »

Comment éviter de nouvelles tentatives ?

Après un incident, il est crucial de changer ses habitudes. « Je ne laisse plus jamais mes affaires à l’extérieur du coffre », affirme Thomas Renaud. « Et je me suis inscrit à un atelier de self-défense psychologique pour apprendre à détecter les comportements suspects. »

A retenir

Que faire si je vois un objet suspect près de ma voiture ?

Ignorez-le. Éloignez-vous et contactez la sécurité du lieu ou les forces de l’ordre. « Un objet abandonné peut être un piège », rappelle Marc Aubert. « Mieux vaut prévenir que guérir. »

Comment rester vigilant sans devenir paranoïaque ?

Adoptez une routine de sécurité sans en faire une obsession. « Vérifiez vos alentours en marchant, rangez vos affaires avant d’arriver à destination, et gardez vos clés en main », résume le lieutenant Moreau. « La vigilance est un réflexe, pas une angoisse. »

Pourquoi est-il crucial de stationner dans des zones sécurisées ?

Les parkings équipés de caméras ou de personnel de sécurité dissuadent les escrocs. « Un lieu surveillé réduit de 70 % les risques d’arnaque », affirme Emma Fabre. « Même si c’est un peu plus cher, c’est un investissement pour votre tranquillité d’esprit. »

Comment réagir si un complice engage la conversation ?

Restez poli mais ferme. « Ne perdez jamais de vue votre véhicule », conseille Sophie Lambert. « Si quelqu’un vous demande de l’aide, déclinez en expliquant que vous êtes pressé(e). »