La colère monte face au moustique tigre : une médecin d’Angoulême exige des mesures claires et rapides pour protéger les enfants en 2025

À Angoulême, l’été n’a jamais été aussi lourd à porter. Entre canicules répétées et circulation accrue du moustique tigre, les familles, les enseignants et les professionnels de santé voient monter une inquiétude qu’elles ne parviennent plus à contenir. Parmi elles, Élise Rambert, médecin généraliste et mère de deux enfants scolarisés dans une école primaire du quartier Saint-Yrieix, tire la sonnette d’alarme. Depuis plusieurs semaines, elle milite pour une réponse publique claire, coordonnée et évaluée face à une menace qui, selon elle, ne peut plus être ignorée : la prolifération du moustique tigre autour des lieux fréquentés par les enfants. Son appel, relayé par une lettre ouverte, résonne comme un cri de ras-le-bol collectif. Car derrière les piqûres, ce sont des enjeux de santé publique, de coordination territoriale et de confiance dans l’action municipale qui sont en jeu.

Quelle réponse municipale face à la menace sanitaire du moustique tigre ?

Le constat est alarmant : cinq cas autochtones de chikungunya ont été confirmés en Charente, une première dans la région. Ces cas, bien que circonscrits, marquent un tournant. Le moustique tigre, longtemps perçu comme un nuisible lointain, est désormais établi. Et son expansion suit la courbe de la température. « Quand il fait 35 °C, un œuf de moustique tigre peut devenir un adulte en sept jours », explique Élise Rambert. « Chaque flaque d’eau, aussi petite soit-elle, devient un laboratoire à virus. »

Face à cette urgence, les appels des riverains restent souvent sans réponse claire. Une première lettre avait été adressée à la mairie il y a un mois. Aucun retour officiel n’avait été donné, aucun calendrier précis établi. « On nous dit : « Videz vos soucoupes, portez des manches longues », mais on ne peut pas demander à une enfant de six ans de jouer dans la cour de récré sous un manteau en plein été », s’indigne Léa Bonfils, enseignante à l’école Jean-Jaurès. « Ce n’est pas de la négligence, c’est de l’impuissance. »

La demande des parents et des professionnels est simple : un plan d’action public, visible, mesurable, avec un responsable désigné et des délais tenus. « On ne veut pas d’un discours rassurant, on veut des résultats », insiste Élise Rambert. « Et surtout, on veut savoir que les décisions sont prises en tenant compte de la réalité du terrain, pas en fonction de la communication. »

Pourquoi cibler les écoles, crèches et Ehpad en priorité ?

Les enfants, les tout-petits et les personnes âgées sont les plus vulnérables. Ils passent des heures à l’extérieur, ont une peau sensible, et parfois un système immunitaire affaibli. C’est pourquoi les pièges collectifs doivent être déployés en priorité autour de ces lieux stratégiques. « Un piège bien positionné peut réduire la population de moustiques de 70 % dans un rayon de 50 mètres », affirme Thomas Léger, entomologiste consultant pour plusieurs collectivités. « Mais il faut qu’ils soient entretenus, surveillés, et que leur efficacité soit mesurée. »

À Angoulême, certains établissements ont déjà installé des moustiquaires aux fenêtres, mais ces mesures restent isolées. « On a posé des filets à l’école Sainte-Claire, mais on ne sait pas si d’autres écoles en ont aussi », témoigne Céline Moreau, parent d’élève. « C’est inégal. C’est injuste. »

La solution, selon les experts, réside dans une cartographie dynamique des points noirs : gouttières bouchées, nids-de-poule remplis d’eau, espaces verts mal entretenus. Une telle cartographie permettrait non seulement d’agir vite, mais aussi de suivre l’évolution de la menace. « On a besoin de données, pas de bonnes intentions », souligne Élise Rambert. « Si on installe dix pièges, on doit savoir au bout de deux semaines combien de moustiques ont été capturés. Sinon, on fait du décoratif. »

Comment agir efficacement sur les gîtes larvaires ?

La lutte contre le moustique tigre ne se gagne pas à coups de sprays ou de fumigations aléatoires. Elle se joue dans les détails : une gouttière mal entretenue, une flaque persistante après une averse, un bac à fleurs oublié. Ces micro-environnements sont des pépinières à moustiques. Or, beaucoup de ces points d’eau se trouvent sur la voie publique : trottoirs fissurés, grilles d’égout obstruées, espaces verts mal drainés.

Des équipes municipales dédiées pourraient intervenir en amont, en ciblant les zones sensibles autour des écoles. « Il ne s’agit pas de tout nettoyer, mais de faire des tournées ciblées, régulières, et surtout anticipées », précise Thomas Léger. « Avant une période de chaleur, on traite les gîtes potentiels. C’est plus efficace et moins coûteux que de réagir après l’explosion de la population. »

Un système de pilotage transparent pourrait inclure des bilans hebdomadaires publiés en ligne : nombre de gîtes traités, pièges remplacés, signalements traités. « On veut voir que ça bouge, que ça progresse », dit Léa Bonfils. « Quand les enfants voient des agents municipaux agir près de leur école, ils comprennent que leur sécurité compte. »

Comment mobiliser les habitants sans les laisser seuls face au risque ?

La sensibilisation est essentielle, mais elle ne peut pas tout. « On peut rappeler aux gens de vider leurs soucoupes, mais on ne peut pas leur demander de surveiller chaque centimètre carré de leur quartier », estime Céline Moreau. Une campagne de sensibilisation massive, bien conçue, doit accompagner l’action publique, pas la remplacer.

Des outils simples, ludiques, destinés aux enfants, pourraient être diffusés dans les écoles : affiches, jeux, ateliers. « À l’école, on a fait un petit dessin sur les gîtes du moustique tigre », raconte un élève de CM1. « Après, j’ai dit à mon grand-père de vider son bac à pluie. » Ce genre d’effet boule de neige est précieux. Mais il doit s’appuyer sur un cadre institutionnel solide.

Les syndics de copropriétés, les gardiens d’immeubles, les jardiniers municipaux doivent aussi être intégrés au dispositif. Des consignes claires, des formations courtes, des supports d’affichage standardisés permettraient d’harmoniser les efforts. « On a besoin d’un langage commun », affirme Élise Rambert. « Pas de dix messages différents qui s’annulent. »

Peut-on concilier lutte antivectorielle et respect de la biodiversité ?

La réponse est oui, et elle passe par une approche écologique. Certaines villes ont intégré des mares aménagées dans leurs espaces publics, conçues pour favoriser les prédateurs naturels du moustique tigre : libellules, crapauds, batraciens. « Une mare bien conçue, avec des berges variées et des plantes aquatiques, devient un allié », explique Thomas Léger. « Elle attire les insectes qui se nourrissent des larves. »

Les jardiniers municipaux peuvent jouer un rôle clé en choisissant des essences résistantes à la sécheresse, en limitant les surfaces imperméables, et en maintenant un entretien régulier des berges. « Ce n’est pas de l’écologie douce, c’est de la prévention active », dit-il. « Et en plus, ça embellit la ville. »

À Angoulême, des expérimentations ont commencé dans le parc de l’Houmeau. Des mares ont été creusées, des bandes enherbées aménagées. « On voit déjà plus de libellules », constate un habitant du quartier. « Et moins de moustiques, je crois. » Ces initiatives, encore limitées, pourraient être généralisées si elles étaient intégrées à une stratégie municipale globale.

Comment construire une coordination efficace entre les acteurs ?

Le maillon faible, aujourd’hui, c’est l’absence de coordination claire. Qui décide ? Qui agit ? Qui évalue ? « On a besoin d’une cellule opérationnelle unique, centralisée, avec des représentants de la mairie, de la santé publique, des services techniques et des citoyens », propose Élise Rambert. Cette cellule pourrait centraliser les signalements, planifier les interventions, et publier des comptes rendus accessibles à tous.

Un système de signalement simple, via une application ou un numéro dédié, permettrait aux habitants de participer activement. « J’ai vu une flaque près de l’école, je l’envoie, et en trois jours, elle est traitée », imagine Céline Moreau. « Là, je saurai que ma voix compte. »

Les élus, eux, devraient fixer des objectifs mesurables : réduction de 50 % des piqûres signalées en trois mois, couverture de 100 % des écoles par des pièges d’ici septembre, traitement de 90 % des gîtes recensés dans les zones prioritaires. « Des chiffres, pas des promesses », insiste Élise Rambert. « C’est comme ça qu’on reconstruit la confiance. »

Protéger les enfants, une priorité politique ou une simple promesse ?

La lutte contre le moustique tigre n’est pas qu’une question technique. C’est une question de priorités. « Quand on voit des enfants se gratter pendant la récré, quand on entend les parents s’inquiéter pour leurs petits-enfants, on ne peut pas rester passif », dit Léa Bonfils. « Protéger les plus fragiles, c’est le cœur de l’action publique. »

Le risque, aujourd’hui, est l’improvisation. Des actions ponctuelles, des déclarations rassurantes, mais pas de vision d’ensemble. « On ne peut pas gérer une menace sanitaire comme on gère une campagne d’affichage », prévient Thomas Léger. « Il faut du temps, de la rigueur, et surtout de la continuité. »

Élise Rambert, qui soutient un candidat aux municipales sur des positions écologiques et sociales, voit dans cette crise une opportunité. « C’est le moment de montrer qu’on peut agir autrement : ensemble, en transparence, avec des résultats concrets. »

A retenir

Quel est le principal danger du moustique tigre à Angoulême ?

Le moustique tigre est désormais établi en Charente et peut transmettre des maladies comme le chikungunya ou la dengue. Cinq cas autochtones ont déjà été confirmés, marquant une escalade sanitaire. Sa prolifération s’accélère avec la chaleur, et chaque petite accumulation d’eau devient un gîte potentiel.

Pourquoi les écoles sont-elles des zones prioritaires ?

Les enfants sont particulièrement exposés aux piqûres et plus vulnérables aux complications. Ils passent beaucoup de temps à l’extérieur, et les mesures individuelles (vêtements longs, répulsifs) sont difficiles à appliquer en été. Protéger les écoles, c’est protéger un maillon essentiel de la communauté.

Quelles mesures concrètes demandent les habitants ?

Les familles et les professionnels réclament un plan d’action clair : déploiement de pièges collectifs autour des écoles, traitement systématique des gîtes larvaires en milieu public, création d’une cellule de coordination, publication de bilans hebdomadaires, et désignation d’un responsable identifiable.

Comment les citoyens peuvent-ils participer ?

En signalant les points d’eau stagnants via une plateforme dédiée, en entretenant leurs espaces privés, et en relayant les bons gestes auprès de leurs proches. Mais cette mobilisation ne doit pas se substituer à l’action publique, qui reste indispensable.

La biodiversité peut-elle aider à lutter contre le moustique tigre ?

Oui, en favorisant les prédateurs naturels comme les libellules ou les batraciens. Des mares bien conçues, des espaces verts pensés pour la régulation écologique, et des pratiques d’entretien adaptées peuvent réduire durablement la population de moustiques, tout en améliorant le cadre de vie.