En 2023, une découverte scientifique à l’apparence anodine a secoué les milieux académiques, industriels et politiques en France. Julien Moreau, un étudiant en géologie passionné par les formations géologiques de l’est du pays, a mis au jour un gisement de terres rares d’une valeur estimée à 110 millions d’euros. Ce trouvaille, réalisée dans le cadre de sa thèse à l’université de Strasbourg, aurait pu marquer le début d’une nouvelle ère pour la souveraineté minérale française. Mais elle a surtout révélé les failles d’un système où la recherche publique entre en conflit direct avec les intérêts privés. L’histoire de Julien Moreau n’est pas seulement celle d’un jeune scientifique brillant, c’est un miroir tendu à une société en quête d’équilibre entre innovation, justice et écologie.
Qui est Julien Moreau, et comment a-t-il fait cette découverte ?
Julien Moreau, 24 ans, est un étudiant rigoureux, doté d’une curiosité insatiable pour les processus géologiques peu explorés. Originaire de Metz, il a grandi au cœur de la région lorraine, bercé par les paysages marqués par l’industrie sidérurgique. Cette histoire familiale a nourri son intérêt pour les ressources souterraines. Lors de sa dernière année à l’université de Strasbourg, il choisit de consacrer sa thèse à l’étude des anomalies magnétiques dans les anciennes zones minières du bassin houiller lorrain. Ce choix, perçu comme modeste par certains enseignants, s’avère être un pari gagnant.
À l’aide d’un spectromètre portatif et de données satellitaires accessibles publiquement, Julien détecte, au printemps 2023, une concentration inhabituelle de néodyme, de dysprosium et d’yttrium sur un terrain boisé à proximité de Thionville. Les prélèvements effectués sur plusieurs semaines confirment ses soupçons : il s’agit d’un gisement riche en éléments de terres rares, rare en Europe et stratégique pour l’industrie technologique. « C’était comme tomber sur une mine d’or au fond de son jardin », raconte-t-il, avec une pointe d’ironie. Mais ce trésor, loin de lui appartenir, allait très vite lui échapper.
Pourquoi une entreprise privée a-t-elle pu s’emparer du site ?
Moins de dix jours après la publication de ses résultats préliminaires dans une revue universitaire en libre accès, une société privée, EurMinex, spécialisée dans l’extraction de minéraux critiques, a exercé son droit de préemption sur le terrain. Ce droit, inscrit dans le Code minier français, permet à des entreprises agréées d’acquérir prioritairement les droits d’exploitation sur des gisements découverts, même si la découverte est le fruit d’un travail académique.
« Je n’ai même pas eu le temps de comprendre ce qui se passait, explique Julien. J’ai reçu un courrier me notifiant que mes données étaient désormais accessibles à toute entité économique intéressée. Un mois plus tard, le site était clôturé, avec des panneaux « Accès interdit ». »
Le directeur général d’EurMinex, Antoine Rival, justifie cette intervention rapide : « Notre rôle est de sécuriser l’approvisionnement stratégique de la France en minéraux critiques. La découverte de Julien Moreau est remarquable, mais c’est à nous de la transformer en projet industriel viable. » Une réponse qui, pour beaucoup, sonne comme une banalisation de l’appropriation d’un travail intellectuel.
Quelles sont les réactions dans le milieu universitaire ?
La communauté scientifique française a réagi avec une rare unité. Des universités de Lyon à Rennes, des chercheurs ont signé une pétition appelant à une réforme du Code minier. Parmi eux, la géologue Clémentine Ferrand, professeure à l’École des Mines de Nancy : « Ce cas est emblématique. Un étudiant passe des mois sur le terrain, dépense son énergie et son temps, et voilà que son travail sert de tremplin à une entreprise qui n’a rien produit. Où est la reconnaissance ? »
Plusieurs institutions ont également pointé du doigt le manque de protection des données de recherche. « Les publications académiques sont censées servir le savoir collectif, pas devenir des cartes au trésor pour des groupes privés », ajoute Marc Tissier, directeur du laboratoire de géosciences de Strasbourg. Certains universitaires proposent désormais de retarder la publication des données sensibles pendant plusieurs mois, le temps de sécuriser les droits d’exploitation ou d’associer les découvreurs aux projets futurs.
Quel est l’impact économique de ce gisement ?
Les terres rares, bien que présentes en quantité modérée dans la croûte terrestre, sont indispensables à la fabrication des aimants permanents utilisés dans les éoliennes, les voitures électriques, les smartphones ou encore les systèmes de défense. Actuellement, plus de 80 % de l’approvisionnement mondial provient de Chine, ce qui pose un risque stratégique pour l’Europe.
Le gisement découvert par Julien Moreau pourrait couvrir jusqu’à 15 % des besoins européens en néodyme sur une décennie, selon une estimation du BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Cela en ferait une ressource clé pour la transition énergétique. « Ce n’est pas qu’un gisement, c’est une opportunité de souveraineté », affirme Élise Nguyen, économiste spécialisée dans les chaînes de valeur critiques.
Toutefois, la question de la répartition des bénéfices reste entière. EurMinex prévoit d’investir 80 millions d’euros dans l’exploitation du site, mais aucune compensation n’a été proposée à Julien Moreau, ni à son université. « On parle de centaines de millions de valeur ajoutée, et le découvreur n’aura même pas un siège au comité de suivi », déplore Clémentine Ferrand.
Quels sont les risques environnementaux liés à l’extraction ?
Derrière l’aspect économique, le spectre environnemental plane. L’extraction des terres rares est notoirement polluante : elle nécessite d’importantes quantités d’eau, des traitements chimiques agressifs et génère des résidus radioactifs (comme le thorium ou l’uranium, souvent présents dans les minerais). En Malaisie ou en Chine, de tels sites ont laissé des zones contaminées pendant des décennies.
« Je ne veux pas que ma découverte devienne une catastrophe écologique », insiste Julien Moreau. Il appelle à une exploitation encadrée, avec des normes strictes et une surveillance indépendante. Des associations locales, comme Terre-Lorraine, ont déjà lancé des pétitions contre l’ouverture de la mine, exigeant une étude d’impact environnemental complète et une concertation citoyenne.
EurMinex affirme utiliser des technologies de pointe, notamment des procédés de lixiviation sans acide chlorhydrique et des systèmes de recyclage de l’eau. Mais pour Solène Dubreuil, ingénieure en environnement, « les promesses ne suffisent pas. Il faut des garanties indépendantes, des audits réguliers, et une clause de fermeture en cas de non-respect des normes ».
Le droit de découverte existe-t-il en France ?
En droit français, il n’existe pas de notion claire de « droit de découverte » pour les ressources naturelles. Contrairement à d’autres pays, comme le Canada ou l’Australie, où les découvreurs peuvent bénéficier de redevances ou de participations, en France, le sol appartient à l’État ou aux propriétaires fonciers, et les minerais sont régis par des règles de préemption industrielle.
« C’est un vide juridique inacceptable », affirme Léonard Brossard, avocat spécialisé en droit des ressources naturelles. « Un chercheur peut passer des années à cartographier une zone, publier ses résultats, et se faire devancer par une entreprise qui n’a rien fait d’autre que lire un article scientifique. »
Depuis l’affaire Moreau, plusieurs députés ont déposé des propositions de loi visant à introduire un statut de « découvreur », avec un droit à compensation ou à association au projet d’exploitation. Un groupe de travail parlementaire a été mis en place pour examiner la question d’ici 2025.
Quelles leçons tirer de cette affaire ?
L’affaire Julien Moreau n’est pas qu’un cas isolé. Elle illustre un dilemme contemporain : comment valoriser la recherche publique sans la sacrifier aux intérêts privés ? Comment assurer la souveraineté stratégique d’un pays tout en protégeant ses chercheurs et son environnement ?
Elle montre aussi que les jeunes scientifiques, souvent idéalistes, sont mal préparés aux réalités du monde économique. « J’aurais dû déposer un brevet, ou au moins parler à un juriste avant de publier », reconnaît Julien. Aujourd’hui, il travaille avec une ONG sur la gouvernance des ressources naturelles, et milite pour une réforme du système.
Enfin, cette affaire a réveillé une conscience collective. Les terres rares ne sont plus un sujet technique réservé aux spécialistes : elles sont devenues un enjeu de justice, d’éthique et de démocratie. Comme le souligne Élise Nguyen : « Derrière chaque aimant, il y a un sol, une découverte, et des personnes. Il est temps de les rendre visibles. »
A retenir
Qu’a découvert exactement Julien Moreau ?
Julien Moreau a identifié un gisement riche en terres rares — notamment en néodyme, dysprosium et yttrium — dans la région de Thionville, en Lorraine. Ces éléments sont cruciaux pour les technologies de pointe, comme les éoliennes, les batteries et l’électronique. L’estimation économique du site s’élève à environ 110 millions d’euros.
Pourquoi n’a-t-il pas été rémunéré pour sa découverte ?
Le Code minier français ne prévoit pas de récompense automatique pour les découvreurs de gisements. Une fois les données publiées, elles deviennent accessibles à toute entreprise agréée, qui peut exercer un droit de préemption. Julien Moreau, en tant qu’étudiant, n’avait ni les moyens ni le statut pour revendiquer des droits d’exploitation.
L’extraction des terres rares est-elle écologique ?
L’extraction des terres rares est souvent polluante, avec des risques de contamination des sols et des eaux due aux produits chimiques utilisés. Cependant, des technologies plus propres sont en développement. Dans le cas du gisement lorrain, des associations et des experts exigent des garanties strictes pour éviter tout impact environnemental durable.
Peut-on espérer une réforme du droit minier en France ?
Oui. L’affaire Moreau a relancé le débat sur la modernisation du Code minier. Plusieurs propositions de loi visent à introduire un droit de compensation pour les découvreurs, à renforcer la transparence des procédures et à mieux encadrer l’exploitation des ressources stratégiques. Un groupe de travail parlementaire est actuellement chargé d’étudier ces pistes.
Quel avenir pour Julien Moreau ?
Julien a décidé de poursuivre sa carrière dans la géologie, mais en se consacrant désormais à la gouvernance des ressources naturelles. Il collabore avec des ONG et des institutions européennes pour promouvoir une approche plus équitable et durable de l’extraction minière. Son expérience, bien qu’amère, est devenue une force pour militer en faveur du changement.