Drame chez SFR : 24 milliards de dette et 4 millions de clients perdus, les Français bientôt impactés

Depuis trois étés, la saga SFR ressemble à un télé-roman : portée par les fantasmes de Patrick Drahi, endettée jusqu’aux oreilles, désertée par près de 400 000 clients en dix-huit mois. Aujourd’hui, la barre des 4 millions d’abonnés a été franchie vers le bas et le groupe Altice peine à refourguer l’opérateur. Que menace-t-il vraiment ? Que vont devenir ses clients ? Et comment ce feuilleton va-t-il rebattre les cartes du marché français ? Réponse en scènes.

Pourquoi SFR perd-il ses clients si vite ?

L’histoire commence en juillet 2023. SFR annonce une nouvelle grille tarifaire : +10 % sur de nombreux forfaits et factures fixes, sans plus d’explication qu’un communiqué de cinq lignes. L’effet est immédiat. Dans les réseaux sociaux, les hashtags #SFRarnaque ou #SANSFRAISrester remportent l’adhésion. Chez **Justine Parlier**, 26 ans, hôtesse de caisse à Lyon, la rupture est officielle : « J’ai payé 42,90 € au lieu de 36 € du jour au lendemain. Dix jours plus tard, j’étais chez Free. Ils ont répondu au téléphone en moins de deux minutes. Chez SFR, après trois heures d’attente, j’ai raccroché. »

Les statistiques défilent dans les journaux : 5 % de bug sur les lignes fixes, trois plaintes sur l’InfoFacturation placées sur le bureau du médiateur chaque jour, des délais moyens de réponse du service client qui dépassent 20 minutes, soit quatre fois plus que la moyenne européenne. Le cercle vicieux est en marche : hausse des prix, baisse de la qualité, fuite des abonnés… puis encore hausse des prix pour compenser la perte de revenus.

Combien pèse la dette d’Altice et comment SFR en est-il arrivé là ?

Patrick Drahi, l’homme derrière Altice, a bâti un empire de médias et de câbles en Europe et aux États-Unis en combinant deux armes : l’endettement et la prise de contrôle rapide. Aujourd’hui, la facture tombe : 24 milliards d’euros. Pour comprendre l’ampleur, on vous livre une comparaison brute : c’est à peu près le budget annuel de l’État pour l’éducation nationale en 2022.

Autour d’une table de réunion qu’il a récemment racontée au Figaro, un cadre ancien d’Altice, Sébastien Huchon, explique : « Drahi se nourrissait des rachats à la chaîne. L’idée était d’acheter, de vendre des actifs immobiliers ou des pylônes, puis de refinancer les dettes à court terme. Les taux ont grimpé, le prix de l’immobilier et des tours a coulé, et là le modèle implose. »

La chute des abonnés descend l’escalier encore plus vite : SFR perd 110 millions d’euros de revenus récurrents chaque trimestre. Un peu plus, et le roc devient sable.

Quels sont les acteurs prêts à racheter SFR ?

L’état-major d’Altice écume les couloirs de la Bourse et les salons d’hôtel parisiens depuis six mois. Trois grandes pistes émergent :

Un rapprochement Bouygues Telecom ?

En 2014, SFR et Bouygues avaient déjà signé un accord de partage de réseaux. Sylvain Sauvaget, analyste chez WirelessX, place lui-même une option : « Une fusion permettrait de cracher 5 milliards d’euros de synergies en cinq ans. Pour Bouygues, c’est le rêve de dépasser Orange en nombre d’abonnés. »

Écologie, politique, réseau : tous les casquettes passent. Des négociations officieuses ont d’ores et déjà été menées à La Défense, siège de Bouygues. Détail presque mignon : les équipes commerciales apprennent par cœur la phrase « bienvénue chez la nouvelle SFR ! » juste au cas où.

Des princes étrangers et leurs cadeaux ?

Saudi Telecom et Etisalat, deux télégéants du Golfe, disposent de milliards de liquidités. Elles cherchent un pied en Europe. Arnaud Levas, présent à Dubaï pour une conférence de roaming, affirme : « Ils ne veulent pas tant la France que le tuyau. La fibre de SFR est à 35 millions de prises, cela devient une clé en or pour le 5G et la data centre. »

Un fonds d’investissement ?

KKR, Ardian ou Goldman Sachs Infrastructure aiment racheter, couper, revendre plus cher. Leur plan : capitaliser sur la vente des tours et des crochets de fibre, puis revendre l’opérateur nu en cinq ans. Tactique Usual Suspects pour les amateurs de Wall Street.

Jusqu’où l’Autorité de la concurrence peut-elle bloquer la vente ?

En entrant à L’Autorité de la concurrence, vous traversez une immense bannière : « Protéger le consommateur, maintenir l’innovation. » La présidente, **Bénédicte Lengel**, déclare devant la presse : « Toute concentration, même utile, doit garantir des prix stables et une pluralité d’acteurs. » En français courant : si Bouygues avale SFR, la France tombera à trois gros opérateurs unis, les hausses de prix possibles. Le parquet peut donc, selon la jurisprudence, imposer des cessions d’antennes, des tarifs plafonds ou même un refus de traité.

Pour les achats étrangers, Bruxelles se réveille. La Commission européenne examine la dimension européenne et la sécurité des infrastructures. En d’autres temps, ce serait ouvert. Mais en 2024, la guerre en Ukraine a rappelé que le réseau est une question souveraine.

Comment les abonnés seront-ils impactés ?

Ce n’est pas seulement une opération financière, c’est votre téléphone, box et facture qui vont bouger.

Fera-t-il meilleur service si Bouygues reprend ?

Chez **Claire Valin**, infirmière à Bordeaux, la question est déjà posée : « Je suis restée 16 ans chez SFR par paresse. Si je lis que Bouygues reconditionne nos lignes et assure aux bas salaires une remise de 20 %, j’hésiterai moins. » Le modèle fusion-fusion pourrait éliminer les lignes redondantes, 1 000 points d’appel au client et 15 % des boutiques. Mais logiquement, les offres seraient plus simples.

Des cessions ou des ruptures de contrat ?

Les clauses de continuité dans tout contrat de télécom font passer le nouvel opérateur au même plan. Vos engagements restent, vos illimités resteront. Seule opération risquée : si un fonds décide de « couper la graisse », des boutiques rurales pourraient fermer. Mais selon les juristes, le contrat doit rester homogène.

L’arrivée de nouveaux forfaits à la clé ?

Historiquement, chaque changement d’acteur provoque une avalanche d’offres agressives. Cassandre Daudet, consultante en marketing digital, le rappelle : « Quand Numericable avait fusionné avec SFR, on a vu surgir l’offre SFR/RED avec 30 % de moins. La suite sera sans doute similaire. » Ça commence par des Sms : « Restez, on vous offre 1 To. »

Et si SFR disparaissait purement et simplement ?

Hypothèse noire : échec de toutes ventes dans les douze mois. En amont, des liquidateurs vendraient les armes : tours 5G, fibre, marques, portefeuilles de clients. La bataille ne serait plus d’offrir un forfait, mais de récupérer 4 millions de numéros le plus vite possible.

Le 13 janvier 2024, à Lille, une réunion d’urgence a eu lieu entre Free et Orange. Dans un square fermé, Raymond Eloy, directeur achats d’Orange, aurait dit : « On pourrait récupérer 1,2 million de clients à Lille et Paris sans ouvrir une seule boutique. Vingt-trois mois de chiffre d’affaires en 4 semaines. » Le marché deviendrait à deux et demi géants (Free + Orange), avec des prix probablement plus hauts.

Conclusion

Historiquement, chaque grande crise du télécom français a offert moins de joueurs, mais plus de concurrence faciale. Aujourd’hui, SFR est la pomme de discorde d’une centaine de conseils d’administration et d’investisseurs. Pour vous, citoyen-contrat-amarié, l’issue se joue dans vos prochaines factures, vos relances marketing et la qualité de votre réseau 5G.

A retenir

Est-ce que je dois changer d’opérateur dès maintenant ?

Non. Aucun changement n’est encore officiel et vos garanties restent inchangées. Faites toutefois une comparaison des offres concurrentes en septembre : si un rachat est annoncé, vous pourrez éventuellement négocier votre sortie gratuite.

Serai-je obligé d’accepter de nouvelles conditions si SFR est vendu ?

Seulement si vous le souhaitez. Le Code des postes et communications électroniques impose un délai de 4 mois pendant lequel vous pouvez rompre sans frais si votre tarif ou service change.

Les prix vont-ils augmenter ou baisser ?

Selon les projections, une fusion avec Bouygues ou un fonds stabiliserait les tarifs en régions urbaines mais pourrait provoquer moins de promotions en zone rurale. En cas de liquidité pure, une brusque envolée est possible.

Qui pourrait être le racheteur le plus rapide ?

Bouygues Telecom présente l’opération la plus élaborée ; le pari dépend du feu vert de la justice et de Bruxelles.