Un parasol tout neuf, installé sur la plage de Zandvoort aux Pays-Bas, devait offrir ombre et confort à un vacancier en quête de détente. Personne n’aurait pu deviner qu’il allait devenir, l’espace d’un après-midi, le refuge improbable d’un essaim d’abeilles. Ce mardi 12 août, sous une chaleur estivale persistante, une scène d’une rare intensité s’est déroulée, silencieuse mais vibrante d’une vie collective en mouvement. Des milliers d’insectes, groupés sous la toile tendue, formaient une masse compacte, palpitante, comme suspendue entre nature et civilisation. Ce moment, à la fois surprenant et poétique, illustre une réalité méconnue : la migration des abeilles ne suit pas toujours les saisons prévisibles, et leur présence parmi nous peut révéler bien plus qu’un simple incident de vacances.
Pourquoi un essaim d’abeilles s’installe-t-il sous un parasol ?
Le choix d’un abri pour un essaim n’est jamais aléatoire, même s’il peut sembler incongru. Lorsqu’une colonie d’abeilles quitte sa ruche d’origine, elle cherche un lieu temporaire où se regrouper avant de trouver une cavité définitive. Ce lieu doit être protégé, élevé du sol, et offrir une certaine stabilité. Le parasol, avec sa toile tendue et son armature rigide, correspond étonnamment bien à ces critères. Sous la toile, l’ombre fraîche et le pli central forment une sorte de niche, idéale pour un repos collectif.
C’est ce qu’a observé Johan van der Meer, le vacancier à l’origine de la scène. « J’ai senti une vibration sous mes doigts en ajustant le parasol. J’ai levé les yeux, et j’ai vu… une masse noire, vivante, parfaitement silencieuse. Je n’ai pas paniqué, mais j’ai reculé lentement. » Son calme a été salué par les témoins présents. Personne n’a cherché à chasser les abeilles, ni à les photographier de trop près. Une distance respectueuse a été maintenue, évitant tout geste brusque qui aurait pu déclencher une réaction de défense.
L’apiculteur appelé sur place, Bram Klinkenberg, a confirmé que ce type de situation, bien que rare en milieu urbain, n’est pas sans précédent. « Les abeilles sont attirées par la forme et la hauteur. Un parasol peut ressembler, à leurs yeux, à l’entrée d’un arbre creux. Elles ne cherchent pas à s’installer là de façon permanente, mais à se reposer quelques heures, voire quelques jours. »
Comment un apiculteur capture-t-il un essaim sans danger ?
L’intervention de Bram Klinkenberg a été minutieuse, presque chorégraphiée. Armé d’un aspirateur à flux contrôlé, un outil spécialisé utilisé par les professionnels, il a procédé à un prélèvement doux de l’essaim. « L’aspiration doit être suffisamment forte pour capter les abeilles, mais assez douce pour ne pas les blesser. Le but n’est pas de les aspirer toutes en une fois, mais de les guider progressivement vers un contenant ventilé. »
Le dispositif utilisé est conçu pour éviter l’écrasement ou l’étouffement des insectes. Une fois transférées dans la ruchette — une petite ruche mobile —, les abeilles ont pu se réorganiser autour de leur reine, l’élément central de la colonie. « Elles étaient stressées au départ, mais elles se sont calmées dès qu’elles ont senti la structure de la ruchette. Elles reconnaissent l’espace comme un abri viable. »
Le processus a duré près d’une heure. Les baigneurs, curieux mais disciplinés, ont observé depuis une distance de sécurité. L’un d’eux, Inès Lefèvre, une touriste française en vacances avec ses enfants, a raconté : « J’ai d’abord eu peur pour les petits, mais l’apiculteur nous a expliqué que les abeilles n’avaient aucune raison de piquer. Elles sont en migration, elles ne défendent pas de ruche. C’était fascinant de voir comment tout le monde restait calme. »
Pourquoi un essaim apparaît-il si tard dans l’année ?
La majorité des essaimages ont lieu entre avril et juin, lorsque les colonies sont à leur apogée. En août, la population d’abeilles active diminue naturellement, car les besoins de reproduction et de stockage de miel se réduisent. Cependant, des facteurs environnementaux peuvent provoquer un « second souffle » de reproduction.
« Il y a eu une chaleur exceptionnelle cette année », explique Bram Klinkenberg. « Les fleurs ont fleuri plus longtemps, les sources de nectar ont été plus abondantes en fin de saison. Dans certaines régions, cela stimule une dernière vague d’essaimage. »
De plus, les perturbations humaines — comme le déplacement d’une ruche, une invasion de parasites, ou même une forte activité autour d’un nid — peuvent déclencher un départ précipité. « Les abeilles ne partent pas par caprice. Elles quittent leur habitat quand elles jugent qu’il n’est plus viable. »
Un autre facteur est la génétique de la reine. Certaines souches sont plus enclines à produire plusieurs essaims par cycle. « Ce que nous avons vu à Zandvoort pourrait être un essaim secondaire, issu d’une colonie déjà divisée une première fois. C’est rare, mais pas impossible. »
Quels sont les bons réflexes face à un essaim d’abeilles ?
La réaction du vacancier Johan van der Meer est devenue un exemple cité par les associations apicoles locales. « Il a fait exactement ce qu’il fallait : rester calme, ne pas agiter les bras, éloigner les enfants, et appeler un professionnel », souligne Marleen Visser, porte-parole de l’Association néerlandaise d’apiculture. « Beaucoup de gens ont peur des abeilles, mais un essaim en migration est l’un des moments où elles sont les moins agressives. »
Les experts insistent sur trois principes fondamentaux : ne pas pulvériser d’insecticide, ne pas tenter de détruire l’essaim soi-même, et éviter les bruits forts ou les mouvements soudains. « Une abeille pique en dernier recours. Elle meurt après avoir piqué, donc elle n’a aucun intérêt à le faire si elle ne se sent pas menacée. »
En Pays-Bas, comme en France ou en Belgique, des réseaux de « brigades apicoles » sont mobilisables en quelques heures. Ces réseaux regroupent des apiculteurs bénévoles ou professionnels formés à la capture d’essaims. « L’appel a été passé à 14h12, j’étais sur place à 14h45 », précise Bram Klinkenberg. « La rapidité d’intervention est cruciale, surtout sur une plage. Plus l’essaim reste longtemps, plus le risque d’incident augmente. »
Quel avenir pour les abeilles capturées ?
L’essaim de Zandvoort a été transféré vers un rucher privé, situé à une trentaine de kilomètres de la plage. Là, les abeilles ont été installées dans une ruche complète, avec cadres, nourriture de départ et protection contre les prédateurs. « Elles vont maintenant reconstruire leur société. La reine pondra, les ouvrières construiront les alvéoles, et elles chercheront des sources de nectar jusqu’à l’automne. »
Le choix de ne pas les relâcher directement dans la nature est stratégique. « En milieu urbain, un essaim libre a peu de chances de survivre. Il peut être détruit, écrasé, ou exposé aux pesticides. En les plaçant dans un rucher géré, on augmente leur espérance de vie et on contribue à la pollinisation locale. »
Pour Johan van der Meer, l’expérience a changé sa perception des abeilles. « Je pensais que c’était juste des insectes dangereux. Maintenant, je vois qu’elles ont une organisation, une intelligence. J’ai même envisagé de devenir apiculteur amateur. »
Que révèle cet événement sur notre relation à la nature ?
Cette scène, à la fois insolite et paisible, interroge notre rapport au vivant. En plein cœur d’un espace de loisirs, fréquenté par des milliers de personnes, la nature a imposé sa présence sans violence, sans agression. Elle a simplement occupé un espace, comme elle le fait depuis des millénaires.
« Nous vivons dans un monde que nous croyons maîtrisé », observe Marleen Visser. « Mais la nature trouve toujours un chemin. Les abeilles ne demandent pas la permission pour migrer. Elles suivent des lois biologiques, pas des règlements de plage. »
Cet événement rappelle aussi l’importance de la sensibilisation. « Si chaque vacancier savait reconnaître un essaim, connaissait un numéro d’apiculteur local, et comprenait que les abeilles ne sont pas des nuisibles, ces situations se termineraient toujours aussi bien. »
A retenir
Un essaim d’abeilles est-il dangereux ?
Non, un essaim en migration est généralement très docile. Les abeilles n’ont ni couvain ni miel à défendre. Elles sont concentrées sur la protection de la reine et ne piquent que si elles se sentent menacées par un geste brusque ou une intrusion trop proche.
Que faire en cas de découverte d’un essaim ?
Il faut garder ses distances, éloigner les enfants et les animaux, éviter tout geste brusque ou bruit fort, et contacter un apiculteur local. Ne jamais utiliser d’insecticide ou tenter de détruire l’essaim soi-même.
Pourquoi les abeilles choisissent-elles parfois des lieux inhabituels ?
Elles recherchent un abri temporaire en hauteur, protégé des intempéries et des prédateurs. Un parasol, une gouttière, ou même une boîte aux lettres peut leur sembler un bon refuge le temps de décider où s’installer définitivement.
Un essaim peut-il apparaître en fin d’été ?
Oui, bien que rares, des essaimages tardifs peuvent survenir en août ou même septembre, surtout si les conditions climatiques sont favorables (chaleur prolongée, abondance de nectar) ou si la colonie a été dérangée.
Où vont les abeilles après leur capture ?
Elles sont transférées dans une ruche adaptée, souvent dans un rucher géré par un apiculteur. Cela leur permet de survivre, de se reproduire, et de continuer leur rôle essentiel de pollinisatrices.