À l’approche de l’automne, quand les feuilles roussissent et que les soirées s’allongent, les maisons prennent des airs de refuge douillet. Pour les grands-parents qui accueillent leurs petits-enfants pendant les vacances de la Toussaint, ces moments sont précieux. Mais entre les rires, les odeurs de soupe chaude et les jeux de société oubliés dans un tiroir, une ombre plane : celle des écrans, omniprésents, qui grignotent peu à peu les instants de calme. Les téléphones sous la couette, les vidéos en boucle, les conversations interminables sur les réseaux sociaux… tout cela perturbe le sommeil, surtout chez les enfants. Pourtant, loin d’être dépassés, les grands-parents peuvent devenir des alliés précieux, presque des gardiens de la paix nocturne. En douceur, sans cris ni règles rigides, ils ont le pouvoir de réinventer les soirées, de transformer les tensions en complicité, et de réapprendre aux plus jeunes l’art de s’endormir paisiblement. Comment ? En redevenant ce qu’ils ont toujours été : des passeurs de moments simples, de souvenirs vivants, de rituels apaisants.
Pourquoi les écrans perturbent-ils autant le sommeil des enfants ?
La lumière bleue, ennemie invisible du sommeil
Le cerveau humain fonctionne au rythme des cycles naturels : jour, lumière, éveil ; nuit, obscurité, repos. Mais les écrans, qu’ils soient de smartphones, tablettes ou téléviseurs, émettent une lumière bleue qui trompe ce système. Elle imite la lumière du soleil, envoyant au cerveau le message que la journée continue. Résultat, la mélatonine, l’hormone du sommeil, se fait attendre. Chez les enfants, dont les rythmes biologiques sont encore en construction, cet effet est amplifié. Le coucher, qui devrait être une transition douce, devient une bataille. Léa, 12 ans, confie : Je sais que je devrais dormir, mais dès que je commence une série, je ne peux plus m’arrêter. Et quand je finis, je suis trop excité pour fermer les yeux. Ce phénomène n’est pas anodin : des études montrent que chaque heure supplémentaire passée devant un écran le soir retarde l’endormissement de plusieurs minutes, parfois jusqu’à quarante-cinq minutes. Sur une semaine, cela équivaut à des nuits entières perdues.
Le cerveau en surstimulation : quand le repos devient impossible
La lumière bleue n’est qu’une partie du problème. Les contenus eux-mêmes – vidéos virales, jeux compétitifs, messages en cascade – activent le système nerveux. L’attention est captée, l’émotion stimulée, et le corps reste en alerte. Pour un enfant, passer d’un jeu où il doit réagir en temps réel à un état de repos est presque contradictoire. Le passage au sommeil devient abrupt, douloureux. Le cas de Tom, 10 ans, est parlant : Quand je joue à mon jeu préféré, j’ai l’impression que mon cœur bat plus vite. Même après, je vois les images dans ma tête. Ce type de surcharge cognitive nuit non seulement à l’endormissement, mais aussi à la qualité du sommeil profond, essentiel pour la croissance et l’apprentissage. Les grands-parents, qui ont vécu l’époque sans écrans, perçoivent souvent cette agitation comme étrange, voire inquiétante. Mais au lieu de rejeter, ils peuvent choisir d’accompagner.
Comment les grands-parents peuvent-ils devenir des alliés du sommeil ?
Un lien privilégié, une influence bienveillante
Les grands-parents occupent une place unique dans la vie des enfants : ni parents, ni autorité directe, ils incarnent souvent la bienveillance, la patience, la légèreté. C’est ce capital affectif qui leur permet d’introduire des changements sans heurts. Contrairement aux parents, souvent perçus comme des contrôleurs, les grands-parents peuvent proposer des alternatives sans que cela ressemble à une punition. Camille, grand-mère de trois petits-enfants, raconte : Quand j’ai suggéré de lire une histoire avant de dormir, au lieu de regarder une vidéo, mon petit-fils a d’abord râlé. Mais le lendemain, il m’a demandé : “Tu peux me relire la fin ?” Depuis, c’est devenu notre truc. Ce lien, fait de confiance et de douceur, est un levier puissant pour instaurer de nouveaux rituels.
Des rituels simples, efficaces, et pleins de sens
Le retour à des habitudes d’avant l’ère numérique n’est pas une régression, mais une respiration. Voici quelques idées testées par des grands-parents inspirés : préparer une infusion à la verveine ou à la camomille, puis la déguster en discutant des événements de la journée ; feuilleter un vieux livre d’images, ou raconter une anecdote de jeunesse ; assembler un puzzle sous une lampe douce, ou écouter un fond musical apaisant. Ces gestes, anodins en apparence, ont un effet profond : ils ralentissent le rythme, recentrent l’attention, et créent un sentiment de sécurité. Pour Émilien, 8 ans, ces moments sont devenus des repères : Chez mamie, on fait un dessin chaque soir. Après, je m’endors plus vite, et j’ai des rêves calmes.
Parler, écouter, plutôt que commander
Imposer une règle sans explication risque de provoquer une résistance. En revanche, dialoguer, c’est ouvrir la porte à l’adhésion. Les grands-parents peuvent expliquer, simplement, pourquoi le sommeil est important, comment les écrans fatiguent les yeux et le cerveau, ou partager leurs propres souvenirs de soirées tranquilles. L’humour peut aussi désamorcer les tensions : Tu sais, à mon époque, on n’avait pas de téléphone, mais on avait des monstres sous le lit. On s’en est débarrassés en lisant des histoires… En associant les enfants à la décision – Qu’est-ce que tu aimerais faire avant de dormir ? –, on transforme la contrainte en choix. Et un choix partagé est bien plus facile à respecter.
Comment instaurer un couvre-feu numérique sans drame ?
Un geste simple, mais puissant
Le couvre-feu numérique consiste à fixer une heure à partir de laquelle tous les écrans sont éteints. Pas de punition, pas de surveillance, mais une règle claire, douce, et régulière. Le secret ? La cohérence. Il ne s’agit pas d’imposer une règle uniquement chez les grands-parents, mais de la vivre avec eux. On éteint ensemble devient un rituel. Margaux, grand-mère de 72 ans, explique : J’ai mis mon téléphone en charge dans la cuisine, loin de la chambre. Mes petits-enfants m’ont imitée. Maintenant, on rigole : “C’est l’heure du couvre-feu des écrans et des grands-parents !” Cette mise en œuvre collective renforce l’adhésion et évite le sentiment d’injustice.
Créer un espace de détente sans écran
Transformer un coin de la maison en zone calme peut faire toute la différence. Un fauteuil confortable, une lampe douce, une couverture moelleuse, et quelques livres ou jeux. L’important est que cet espace soit accueillant, rassurant, et distinct des zones d’activité. On ne va pas là pour s’ennuyer, mais pour se retrouver. Certains grands-parents ont même instauré une boîte à souvenirs : des photos, des lettres, des objets d’époque, qu’ils sortent le soir pour raconter leur jeunesse. Ces moments, riches en émotions, captivent les enfants bien plus que n’importe quelle vidéo.
Les effets visibles : un sommeil réparé, une humeur apaisée
Les bénéfices se font sentir rapidement. En quelques jours, les enfants s’endorment plus facilement, se réveillent de meilleure humeur, et sont moins irritable le lendemain. Les parents, souvent surpris, notent des changements durables. Mais ce n’est pas seulement pour les enfants que cela compte. Les grands-parents eux-mêmes retrouvent une certaine sérénité. Je me suis rendu compte que je passais trop de temps sur mon téléphone, confie Bernard, 68 ans. En coupant avec mes petits-enfants, j’ai aussi gagné en calme. Ce retour aux sources devient une forme de bien-être partagé.
Quels témoignages de changement concret ?
Des soirées transformées par de petits gestes
De nombreux grands-parents ont franchi le pas. Chaque vendredi, Sophie et son petit-fils Clément organisent une soirée jeux : dominos, Scrabble, ou puzzles. On rigole, on discute, on oublie le reste , dit-elle. À Lyon, Jean-Luc a sorti un vieux tourne-disque et des vinyles des années 60. Mes petits-enfants adorent les écouter. Ils disent que la musique “respire” plus que sur Spotify. D’autres ont instauré un journal du soir : chaque enfant dessine ou écrit un moment de sa journée, puis le lit à voix haute. Ces rituels, simples mais réguliers, deviennent des repères affectifs.
Un héritage de calme, transmis avec douceur
En redonnant du temps au silence, à la parole, à la lenteur, les grands-parents transmettent bien plus qu’un bon sommeil : ils transmettent un art de vivre. Ce sont ces moments-là que les enfants retiendront, bien après avoir oublié les noms de leurs jeux vidéo. Comme le dit Élise, 70 ans : Mon petit-fils m’a dit l’autre jour : “Chez toi, on se sent bien, comme si le temps s’arrêtait.” C’était le plus beau compliment.
Et si le vrai super-pouvoir des grands-parents était de réapprendre à vivre lentement ?
Dans un monde où tout va vite, où les notifications ne cessent jamais, les grands-parents incarnent une alternative précieuse : celle du temps partagé, du geste posé, du silence qui soigne. En instaurant des rituels simples, loin des écrans, ils ne font pas seulement gagner des heures de sommeil à leurs petits-enfants. Ils leur offrent des souvenirs, de la sécurité, et une forme de résilience face au tumulte du monde numérique. Leur rôle n’est pas de remplacer les parents, ni de juger les nouvelles habitudes, mais de proposer une autre voie. Une voie où l’on s’endort bercé par une voix, une histoire, ou le bruit de la pluie contre la fenêtre. Une voie où l’on se réveille reposé, et prêt à vivre autrement.
A retenir
Pourquoi les écrans gênent-ils le sommeil des enfants ?
Les écrans émettent une lumière bleue qui retarde la production de mélatonine, l’hormone du sommeil. En outre, les contenus stimulants (jeux, réseaux sociaux, vidéos) maintiennent le cerveau en état d’alerte, rendant difficile la transition vers le repos.
Quel rôle peuvent jouer les grands-parents ?
Grâce à leur lien affectif privilégié, les grands-parents peuvent introduire des rituels apaisants sans imposer de règles strictes. Leur influence bienveillante permet de redonner du sens aux soirées, loin de la surstimulation numérique.
Comment instaurer un couvre-feu numérique sans conflit ?
En expliquant calmement les raisons, en impliquant les enfants dans le choix des activités alternatives, et en vivant la règle avec eux. La régularité et la bienveillance sont plus efficaces que la sévérité.
Quels bénéfices observe-t-on rapidement ?
Des couchers plus sereins, des réveils plus faciles, une humeur plus stable, et plus de moments de complicité. Les effets positifs concernent aussi bien les enfants que les grands-parents eux-mêmes.
Quelles alternatives concrètes aux écrans le soir ?
La lecture d’histoires, les jeux de société, la préparation d’infusions, les discussions, les dessins, ou la découverte de souvenirs familiaux. L’essentiel est de créer un moment calme, partagé, et rassurant.