Si vous voyez ce petit insecte chez vous, agissez vite avant qu’il ne se multiplie

Un soir d’été, alors que la chaleur du jour imprègne encore les murs de la maison, un mouvement furtif traverse le champ de vision d’Élodie dans sa salle de bain. Une silhouette longiligne, aux pattes fines comme des fils de soie, disparaît en un éclair derrière le radiateur. Elle frissonne. Scutigère ? Mille-pattes ? Peu importe le nom, ce n’est pas la première fois qu’elle croise cet hôte indésirable. Depuis la mi-septembre, ces apparitions se multiplient, surtout la nuit, dans les pièces humides. Ce petit être, souvent mal compris, n’est pas là par hasard. Chaque passage est un message codé sur l’état de son intérieur. Et comme beaucoup d’entre nous, Élodie réalise que la présence de ces créatures n’est pas qu’une question de chance — c’est un miroir tendu vers ses habitudes, son logement, sa vie domestique. Décrypter ce signal, c’est retrouver non seulement une maison sereine, mais aussi une forme de bienveillance envers soi-même.

Qu’est-ce que la présence des scutigères révèle sur votre maison ?

Qui sont vraiment les scutigères ? Des squatters ou des sentinelles ?

La scutigère, souvent confondue avec un mille-pattes, n’a pourtant rien de commun avec les myriapodes lents et inoffensifs. Elle appartient à l’ordre des chilopodes, des prédateurs nocturnes dotés d’une agilité surprenante. Son corps allongé, ses antennes filiformes et ses pattes arrière plus longues que le reste lui donnent un aspect presque surnaturel. Pourtant, contrairement aux idées reçues, elle ne pique pas, ne transporte pas de maladies, et ne s’attaque jamais aux humains. Son rôle, dans la nature, est celui d’un régulateur écologique. Elle chasse les insectes nuisibles : araignées, cloportes, mites, moucherons. En somme, c’est une auxiliaire discrète, mais sa venue à l’intérieur d’une maison n’est jamais anodine.

Élodie, architecte d’intérieur à Nantes, s’en est rendu compte lorsqu’elle a repéré une scutigère dans sa cave aménagée. J’ai d’abord paniqué, raconte-t-elle. Puis j’ai cherché à comprendre pourquoi elle était là. Et plus j’observais, plus je me suis dit qu’elle n’était pas l’intruse — c’était moi qui avais créé les conditions.

La scutigère ne s’installe pas par caprice. Elle choisit ses territoires avec une logique implacable : humidité, obscurité, nourriture facile. Sa présence est donc un indicateur biologique, un thermomètre vivant de l’état sanitaire d’un logement. Loin d’être un simple nuisible, c’est un témoin silencieux de déséquilibres invisibles.

Que viennent-elles vraiment chercher chez vous ?

Les scutigères ne sont pas attirées par les humains, mais par un trio d’opportunités : l’humidité, les cachettes et les proies. Chaque élément joue un rôle clé dans leur installation.

L’humidité est leur carburant. Les salles de bain mal ventilées, les sous-sols mal isolés, les arrière-cuisines où l’évier fuit discrètement — autant de zones où la condensation s’accumule, créant un microclimat propice. Lorsque Camille, enseignante à Lyon, a commencé à en voir régulièrement sous son évier, elle a d’abord pensé à un problème d’isolation. Un test avec un hygromètre a révélé un taux d’humidité de 78 % — bien au-dessus du seuil recommandé de 60 %. J’ai compris que ce n’était pas la scutigère le problème, mais l’air que je respirais moi-même , confie-t-elle.

Les cachettes sont tout aussi importantes. Fissures dans les plinthes, joints abîmés, cartons entreposés au sol, machines à laver mal déplacées — chaque recoin oublié devient un territoire de prédilection. Les scutigères, craintives, évitent la lumière et les courants d’air. Elles prospèrent là où l’entretien est négligé, où le ménage ne va pas derrière les apparences .

Enfin, la nourriture. Une population de scutigères implique une population de petites proies. Moucherons dans les pots de plantes, fourmis attirées par des miettes sous le frigo, araignées dans les angles — chaque insecte présent est une ressource pour la chilopode. Ainsi, la scutigère est souvent le symptôme d’une infestation plus large, invisible à l’œil nu.

Quels signaux votre maison vous envoie-t-elle à travers ces insectes ?

Un diagnostic écologique en temps réel

La scutigère est un bio-indicateur. Sa présence répétée signale souvent un déséquilibre profond : ventilation insuffisante, ponts thermiques, accumulation de déchets organiques. Dans les logements anciens, ces signaux sont particulièrement parlants. Les fenêtres mal calfeutrées, les murs froids, les sols en pierre humide — autant de facteurs qui, combinés, créent un habitat idéal.

À Bordeaux, Théo, restaurateur de meubles anciens, a constaté une recrudescence de scutigères dans son atelier, installé dans une ancienne remise. J’ai tout d’abord cru que c’était à cause du bois stocké. Mais en inspectant mieux, j’ai trouvé une fuite au niveau d’un tuyau d’évacuation. L’eau s’infiltrait sous le plancher. Depuis que j’ai réparé, plus une seule bestiole.

Le lien est clair : chaque scutigère observée est une invitation à auditer son logement. Une inspection minutieuse des joints, des éviers, des angles de murs, des entrées d’air, peut révéler des failles invisibles, mais coûteuses à long terme — tant pour la santé que pour la structure du bâtiment.

Les pièces les plus vulnérables : où chercher ?

Les zones à risque sont bien identifiées. Les salles de bain, surtout celles sans VMC ou fenêtre, accumulent la vapeur d’eau. Les cuisines, si les miettes ne sont pas nettoyées régulièrement, attirent les insectes proies. Les caves, souvent humides et mal aérées, deviennent des zones de reproduction. Les garages, encombrés de cartons, de vélos ou de matériel de jardin, offrent des abris parfaits.

À Lille, Inès, mère de deux enfants, a remarqué que les scutigères apparaissaient surtout après la rentrée scolaire. C’est à ce moment-là qu’on remet les cartons d’affaires d’été au garage, qu’on stocke les chaussures de jardin, qu’on laisse trainer des outils mouillés. En réorganisant l’espace, en surélevant les cartons et en installant un déshumidificateur, elle a vu la population chuter drastiquement.

Quelles habitudes quotidiennes favorisent leur présence ?

Les erreurs domestiques qui les invitent

Parfois, c’est sans le vouloir qu’on transforme son logement en paradis pour scutigères. Laisser la fenêtre de la salle de bain fermée après une douche, ne pas sortir les poubelles assez souvent, oublier de nettoyer sous les meubles — autant de micro-erreurs qui s’accumulent.

Julien, ingénieur à Toulouse, reconnaît : Je pensais que l’aspirateur suffisait. Mais j’ai compris que je passais toujours au même endroit, sans jamais bouger la machine à laver ou le meuble sous l’évier. C’est là que tout se passe.

Autre erreur fréquente : le stockage de végétation près des murs. Les plantes en pot, si elles ne sont pas entretenues, accumulent de la terre humide. Les herbes hautes collées aux façades créent des passages discrets vers l’intérieur. Même les vieux journaux ou les piles de linge sale peuvent devenir des zones d’accueil.

Comment vos gestes du quotidien influencent-ils l’équilibre de la maison ?

Chaque geste compte. Aérer seulement le matin, alors que la nuit est chaude, empêche l’air de circuler. Éteindre la VMC pour faire des économies, c’est favoriser l’humidité. Laisser traîner une assiette sale dans l’évier, c’est attirer les moucherons — donc les chasseurs.

Le paradoxe, c’est que certaines personnes très soigneuses, comme Élodie, peuvent tout de même être touchées. Je nettoie tous les jours, mais je ne pensais pas à l’humidité résiduelle. C’est là que réside le piège : la propreté visible ne suffit pas. Il faut agir sur les causes profondes — ventilation, étanchéité, circulation de l’air.

Comment les chasser naturellement et durablement ?

Rendre la maison hostile : stratégie de base

La première étape est de retirer les conditions favorables. Aérer régulièrement, même brièvement, permet de briser l’accumulation d’humidité. Déplacer les meubles, nettoyer les joints, boucher les fissures avec un mastic adapté — autant d’actions simples mais efficaces.

Un déshumidificateur peut faire des miracles dans les pièces à risque. Camille, à Lyon, en a installé un dans sa buanderie. En deux semaines, le taux d’humidité est passé à 55 %. Et les scutigères ont disparu.

Nettoyer sous les appareils, derrière les radiateurs, autour des tuyaux, devient une priorité. La saleté invisible est souvent la plus dangereuse.

Des solutions naturelles, sans produits chimiques

Il est inutile de recourir à des insecticides agressifs. La terre de diatomée, un minéral naturel, est un excellent répulsif. Pulvérisée en fine couche dans les angles, elle dessèche les exosquelettes des insectes sans nuire aux humains. Attention toutefois : elle doit être placée hors de portée des enfants et des animaux.

Les huiles essentielles, comme celles de citronnelle, d’eucalyptus ou de lavande, agissent comme barrières olfactives. Quelques gouttes sur un coton placé près des entrées suffisent à dissuader les passages. Théo en utilise dans son atelier, mélangées à de l’eau dans un spray. L’odeur est agréable, et les insectes ne viennent plus.

Pour les cas isolés, la méthode la plus douce est de capturer la scutigère avec un verre et un carton, puis de la relâcher à l’extérieur. C’est une vie, après tout , note Inès. Ce geste, bienveillant, préserve la biodiversité tout en réaffirmant les limites de l’espace domestique.

Quels bénéfices après leur départ ?

Une maison plus saine, un bien-être retrouvé

Une fois les scutigères éloignées, les effets se font sentir rapidement. L’air paraît plus léger, les odeurs de moisi disparaissent, les autres insectes s’évanouissent. Moins d’humidité, c’est aussi moins de moisissures, donc un gain pour la santé respiratoire. Moins de déperdition thermique, donc des économies d’énergie.

Élodie constate : Depuis que j’aère mieux et que j’ai installé des joints d’étanchéité, je dors mieux. Je sens que l’air est plus pur.

La chasse aux scutigères devient alors un acte de soin. Elle n’est pas seulement une lutte contre un insecte, mais une réappropriation de son espace, une attention portée à son intérieur comme à soi-même.

Comment éviter leur retour à long terme ?

La prévention repose sur une routine simple mais constante. Aérer quotidiennement, même 10 minutes. Nettoyer les recoins oubliés. Boucher les fissures dès qu’elles apparaissent. Surveiller les signes d’humidité : taches sur les murs, odeurs de renfermé, condensation sur les fenêtres.

Un nettoyage approfondi à la rentrée, après l’été, est particulièrement utile. C’est à ce moment-là que les conditions d’automne — chaleur diurne, fraîcheur nocturne — favorisent la condensation. Prévenir, c’est mieux que guérir.

A retenir

La scutigère est-elle dangereuse pour l’homme ?

Non. La scutigère ne pique presque jamais, et sa morsure, extrêmement rare, est bénigne. Elle ne contamine pas la nourriture ni les surfaces. Son rôle est celui d’un chasseur d’insectes nuisibles.

Pourquoi voit-on plus de scutigères en automne ?

À l’approche de l’automne, les températures extérieures baissent. Les scutigères cherchent des lieux plus chauds et humides — souvent l’intérieur des maisons. De plus, la condensation augmente dans les pièces mal ventilées, créant des conditions idéales.

Faut-il utiliser des insecticides ?

Non, ce n’est ni nécessaire ni recommandé. Les solutions naturelles — ventilation, nettoyage, terre de diatomée, huiles essentielles — sont tout aussi efficaces et bien moins toxiques pour l’environnement domestique.

Comment savoir si la scutigère est partie pour de bon ?

L’absence d’apparition pendant plusieurs semaines, combinée à une baisse du taux d’humidité et à la disparition d’autres petits insectes (moucherons, fourmis), est un bon indicateur. Un logement propre, aéré et bien entretenu ne les attire plus.

Peut-on cohabiter avec les scutigères ?

Techniquement, oui — elles ne nuisent pas directement. Mais leur présence révèle des déséquilibres dans le logement. Les éliminer, c’est surtout agir sur ces déséquilibres, pour une maison plus saine et plus confortable.