Livret A en 2025 : Une règle menace vos économies oubliées

Depuis plusieurs années, des millions de Français laissent leur Livret A sommeiller dans une banque sans s’en préoccuper. Pourtant, une réforme récente pourrait transformer cet oubli en véritable casse-tête financier. Alexandre Barbelane, avocat spécialisé en droit bancaire, alerte : « La combinaison de l’indifférence des épargnants et des nouvelles règles légales crée un risque majeur de perte d’épargne. » Cette situation soulève des interrogations légitimes : comment un compte d’épargne sécurisé peut-il disparaître ? Quels gestes simples permettent de le préserver ? Et surtout, pourquoi ce phénomène concerne-t-il désormais davantage de personnes ?

Quel est le risque pour un Livret A inactif ?

Depuis 2016, la loi Eckert encadre la gestion des comptes inactifs. Selon cette disposition, un Livret A peut être transféré à la Caisse des Dépôts si aucun mouvement n’est enregistré pendant dix ans. Le processus est progressif : après cinq ans sans activité, la banque envoie un premier avertissement. Si l’épargnant ne réagit pas dans les cinq années suivantes, le compte est clôturé et les fonds transférés. « J’ai vu des cas où des familles ont perdu des dizaines de milliers d’euros en croyant leur argent en sécurité », témoigne Alexandre Barbelane. Le délai pour récupérer son épargne est de vingt ans après le transfert, mais au-delà, l’argent est définitivement reversé à l’État.

Comment l’inactivité devient-elle une menace ?

L’absence de consultation ou de mouvement suffit à qualifier un compte d’inactif. « Un Livret A génère des intérêts, mais cela ne compte pas comme activité », précise l’avocat. Les raisons de l’oubli sont variées : déménagements, changements de banque, ou simple négligence. Sophie Lefevre, 58 ans, a découvert trop tard que son Livret ouvert dans sa jeunesse avait été transféré. « Je pensais qu’il suffisait de le laisser dormir. Quand j’ai voulu l’utiliser pour un projet familial, il était trop tard », explique-t-elle.

Pourquoi un changement de règles inquiète-t-il ?

Depuis juillet 2023, il est possible d’ouvrir un Livret A dans une banque différente de celle de son compte courant. Une mesure censée faciliter le choix du meilleur taux, mais qui comporte un revers. « Quand le Livret est dissocié du compte principal, on le consulte moins souvent. Cela multiplie les risques d’inactivité », analyse Alexandre Barbelane. Marc Dubois, 42 ans, a vécu cette situation : « J’avais placé mes économies dans un Livret à un autre établissement pour profiter d’un taux attractif. Entre les aléas de la vie, j’ai oublié son existence pendant six ans. » Heureusement, une alerte bancaire l’a averti à temps pour réactiver le compte.

Un paradoxe entre liberté et vigilance

Si cette réforme offre plus de flexibilité, elle exige une gestion proactive de l’épargne. « Les épargnants doivent désormais être plus vigilants qu’auparavant », souligne l’avocat. Les banques, bien que tenues d’envoyer des avertissements, ne peuvent garantir que tous les clients reçoivent ces messages, surtout en cas de changement d’adresse non signalé.

Comment éviter la perte de son épargne ?

Plusieurs gestes simples permettent de préserver son Livret A. La première solution est de réaliser un mouvement mineur, comme un virement ou un retrait, au moins tous les cinq ans. « Une consultation régulière via l’application bancaire suffit aussi à prouver l’activité », précise Alexandre Barbelane. Deuxième conseil : activer les notifications automatiques. « J’ai configuré des rappels trimestriels pour vérifier mes comptes. C’est une assurance contre l’oubli », confie Marc Dubois.

Consolider pour mieux protéger

Pour ceux qui multiplient les comptes, regrouper les épargnes dans un même établissement réduit les risques. « J’ai transféré mes anciens Livrets dans ma banque actuelle. Maintenant, je consulte tout en une fois », raconte Élise Vidal, 35 ans. Enfin, conserver à jour ses coordonnées auprès des banques garantit de recevoir les avertissements en cas de risque.

Quelles sommes sont concernées ?

Les montants oubliés peuvent atteindre des chiffres surprenants. Entre 2016 et 2021, 10 millions de comptes ont été transférés à la Caisse des Dépôts, totalisant 7,18 milliards d’euros. Certains Livrets, ouverts il y a plusieurs décennies, contiennent des centaines de milliers d’euros. « Un client m’a raconté avoir retrouvé un Livret A de son grand-père, ouvert en 1975, avec 80 000 euros capitalisés. Heureusement, il a pu le récupérer avant expiration des vingt ans », explique Alexandre Barbelane. Pourtant, d’autres n’ont pas cette chance, comme Pierre Moreau, 67 ans, dont un compte dormait depuis quarante ans. « Je n’avais plus de contact avec la banque. Quand j’ai cherché à le récupérer, les fonds avaient été versés à l’État. »

A retenir

Qu’est-ce qu’un compte inactif selon la loi ?

Un compte est considéré inactif s’il n’a connu aucun mouvement (dépôt, retrait, consultation) pendant dix ans. La banque doit envoyer un avertissement après cinq ans d’inactivité, puis transférer les fonds à la Caisse des Dépôts après dix ans.

Combien de temps pour récupérer son argent ?

Après le transfert à la Caisse des Dépôts, l’épargnant dispose de vingt ans pour réclamer ses fonds. Au-delà, l’argent est définitivement reversé à l’État.

Peut-on retrouver un compte transféré à la Caisse des Dépôts ?

Oui, grâce au service gratuit www.caisse-des-depots.fr. En fournissant des informations personnelles, on peut identifier les comptes dormants à son nom.

Comment éviter la perte de son Livret A ?

Effectuer un mouvement ou une consultation tous les cinq ans, activer les alertes bancaires, et regrouper les comptes dans un même établissement. Une vigilance annuelle suffit à préserver son épargne.

En conclusion, le Livret A, bien que sécurisé, n’est pas à l’abri des mécanismes légaux liés à l’inactivité. La réforme de 2023 accentue ce risque en dissociant le Livret du compte courant. Pourtant, des gestes simples permettent de le préserver. Comme le rappelle Alexandre Barbelane : « Votre épargne mérite une attention régulière, même minime. Une fois par an, vérifiez vos comptes. C’est la meilleure assurance contre la perte. »