Votre petit-enfant a mal au ventre après l’école ? Les signes qui doivent vous alerter et comment l’aider à en parler

Chaque automne, dans les rues baignées d’une lumière douce et oblique, les grands-parents reprennent leur place discrète mais précieuse : celle de l’accompagnateur du quotidien, du témoin attentif, du confident improvisé. C’est souvent à ce moment-là, entre deux feuilles mortes et un cartable trop lourd, qu’un petit visage se crispe, les yeux baissés : J’ai mal au ventre… . Une phrase banale, qu’on entend des milliers de fois. Pourtant, derrière ce simple bobo , se cache parfois une réalité plus complexe qu’il n’y paraît. Les grands-parents, avec leur regard posé, leur expérience et leur lien affectif unique, sont souvent les premiers à capter ces signaux subtils. Mais comment distinguer un malaise passager d’un appel silencieux ? Et surtout, comment répondre sans brusquer, sans dramatiser, sans pour autant minimiser ?

Pourquoi un enfant dit-il j’ai mal au ventre ?

Le corps parle quand les mots manquent

À l’âge où l’émotion déborde mais que le vocabulaire reste limité, le corps devient un interprète naturel. Pour un enfant entre six et dix ans, une douleur abdominale peut être la traduction physique d’un stress invisible : une peur de l’échec, une dispute non résolue, une impression d’isolement. C’est ce qu’a observé Camille, grand-mère de Lina, huit ans. Un mercredi, elle a refusé d’aller à l’école en pleurant. Elle disait avoir mal au ventre. Je l’ai prise dans mes bras, je lui ai proposé une tisane, et au bout de dix minutes, elle a murmuré : “J’ai peur que les autres se moquent de moi parce que je ne comprends pas la dictée.” Ce n’était pas un problème digestif, c’était de l’anxiété.

Ces douleurs, souvent localisées autour du nombril, sont fréquentes et généralement sans gravité médicale. Pourtant, leur récurrence peut être un indicateur de tensions psychologiques. Les pédiatres parlent de douleurs fonctionnelles : elles n’ont pas de cause organique identifiable, mais elles sont bien réelles. Le corps exprime ce que l’enfant n’arrive pas encore à verbaliser.

Quand le mal de ventre devient un rituel

Si l’enfant se plaint systématiquement le vendredi avant l’EPS, ou chaque lundi matin avant la rentrée, un schéma émerge. Ce n’est plus un hasard. C’est une alerte. Léon, grand-père de Raphaël, a remarqué que son petit-fils, douze ans, se plaignait de douleurs chaque fois qu’il devait passer devant la classe de CM1. J’ai fini par comprendre qu’un élève plus âgé le bousculait dans les couloirs. Il n’osait rien dire à ses parents. C’est en lui proposant de dessiner “ce qui le préoccupait” qu’il a laissé échapper des traits noirs, des silhouettes menaçantes.

Ces douleurs répétitives sont souvent des mécanismes d’évitement. L’enfant cherche une issue, un moyen de sortir d’une situation qui le dépasse. Le mal de ventre devient une porte de sortie sociale, un sésame pour échapper à un moment douloureux — même si, au fond, il n’en a pas conscience.

Le harcèlement ou la pression scolaire : des causes méconnues

En 2025, les rapports sur le climat scolaire montrent une montée des tensions : pression académique accrue, normes sociales plus strictes, cyberharcèlement précoce. Derrière un ventre noué, il peut y avoir un isolement progressif, une peur du jugement, ou un sentiment d’échec. Les grands-parents, à l’écart du système éducatif, peuvent parfois mieux percevoir ces changements subtils que les parents, absorbés par le rythme effréné de la vie quotidienne.

Élodie, enseignante en CE2, confirme : J’ai eu une élève qui venait tous les matins avec une douleur au ventre. On a mis des semaines à comprendre qu’elle redoutait les lectures à voix haute. Elle pensait que les autres se moquaient de son accent. Ce n’est que quand sa grand-mère, qui la gardait après l’école, a évoqué son silence inhabituel, qu’on a pu intervenir.

Comment créer un espace de parole sécurisant ?

Le moment juste : choisir le bon instant pour parler

Le dialogue ne s’improvise pas. Il se cultive. Pour Zoé, grand-mère de quatre petits-enfants, les moments les plus propices sont ceux du quotidien partagé : Quand on fait la compote avec les coings du jardin, quand on marche vers la boulangerie, quand on replie les draps après la lessive. Ce sont des instants où ils ne se sentent pas interrogés, mais accompagnés.

Le malaise ne surgit pas sous la pression. Il émerge dans la douceur. Une tisane, une écharpe mal nouée, un dessin maladroit : autant d’occasions de lancer une conversation sans la forcer. L’essentiel est de ne pas transformer chaque mal de ventre en enquête, mais d’instaurer un climat où l’enfant sait qu’il peut parler, quand il le souhaite.

Les phrases qui apaisent, celles qui ouvrent la porte

Les mots ont un poids. Dire Tu fais semblant, ce n’est pas grave peut couper court à une détresse réelle. À l’inverse, Raconte-moi ce que tu ressens laisse la place à l’expression. Les grands-parents ont un avantage : ils ne sont pas dans la fonction éducative. Leur rôle n’est pas de corriger, mais d’écouter.

Des phrases simples mais puissantes peuvent faire la différence : Ça arrive à beaucoup d’enfants de se sentir mal à l’aise à l’école , Tu peux tout me dire, je ne dirai rien si tu ne veux pas , Ce n’est pas grave d’avoir peur . Ces formulations rassurent sans minimiser. Elles valident l’émotion, ce qui, pour un enfant, est souvent plus important que la solution.

Le rôle de l’écoute active : quand le silence parle aussi fort que les mots

Parfois, l’enfant ne dit rien. Mais son silence, son regard fuyant, ses gestes nerveux sont des indices. L’écoute active, c’est aussi savoir capter ces signes. C’est ne pas insister, mais rester présent. C’est dire : Tu n’es pas obligé de parler maintenant. Je suis là quand tu voudras.

Comme le raconte Thomas, grand-père de Léonie, sept ans : Elle restait assise sur le canapé, les jambes repliées, sans rien dire. Je lui ai simplement proposé de dessiner avec moi. Elle a dessiné une petite fille toute seule dans une grande cour. En dessous, elle a écrit : “Personne ne veut jouer avec moi.” Ce dessin, c’était sa voix.

Comment agir en soutien, sans prendre le relais ?

Dialoguer avec les parents : un équilibre délicat

Aborder le sujet avec ses propres enfants, devenus parents, n’est pas toujours simple. Il faut éviter le ton de la critique ou de l’inquiétude excessive. L’approche bienveillante est essentielle. J’ai remarqué que Lina se plaint souvent du ventre le matin. Est-ce que tu vois ça aussi ? Cette formulation ouvre la discussion sans accuser.

Le but n’est pas de remplacer les parents, mais de compléter leur regard. En croisant les observations — celles de l’école, de la famille, du grand-parent — on obtient une vision plus complète. Parfois, une simple réunion avec l’enseignant ou l’infirmière scolaire, à laquelle le grand-parent participe, peut débloquer une situation.

Quand consulter : les signes rouges à ne pas ignorer

Il existe des signes médicaux qui doivent alerter : douleurs nocturnes, vomissements répétés, perte d’appétit, fièvre persistante, sang dans les selles. Dans ces cas, le grand-parent a un rôle crucial : celui de signaler à temps. Il ne s’agit pas de diagnostiquer, mais d’observer et de transmettre.

Comme l’explique le Dr Faure, pédiatre à Lyon : Les grands-parents sont souvent les premiers à repérer des anomalies de comportement ou des symptômes répétitifs. Leur regard, détaché de l’urgence quotidienne, est précieux.

Un tableau simple peut aider à distinguer les bonnes pratiques des erreurs fréquentes :

À faire À éviter
  • Observer calmement la fréquence des symptômes
  • Noter les circonstances (avant l’école, après les repas…)
  • Encourager l’enfant à se confier régulièrement
  • Appeler un professionnel de santé en cas de doute
  • Minimiser ou banaliser la douleur
  • Accuser systématiquement l’école sans vérifier
  • Pousser l’enfant à parler s’il ne veut pas
  • Administrer un médicament sans avis médical

Les petits gestes du quotidien : un soutien concret

Le réconfort ne passe pas toujours par les mots. Une promenade en forêt, un goûter partagé, un moment de lecture sous un plaid : ces rituels simples ont un pouvoir apaisant immense. Ils offrent à l’enfant un espace de sécurité émotionnelle, un contrepoids à la pression scolaire.

Comme le dit Aïcha, grand-mère d’origine marocaine vivant à Toulouse : Quand mon petit-fils revient de l’école avec les épaules basses, je lui prépare du thé à la menthe. On s’assied sur la banquette, on regarde dehors. Parfois, on ne parle pas. Mais il sait que je suis là. Et souvent, c’est là qu’il commence à parler.

La place du grand-parent : un rôle unique et durable

Les grands-parents ne sont ni des parents, ni des éducateurs. Ils sont un tiers de confiance, un repère affectif stable. Leur rôle n’est pas de résoudre tous les problèmes, mais d’offrir un refuge. Un endroit où l’enfant peut se sentir entendu, même s’il ne dit rien.

Et cette place, quand elle est occupée avec bienveillance, laisse des traces durables. Des années plus tard, un adulte se souviendra peut-être de ces après-midi où sa grand-mère lui massait doucement le ventre en disant : Ce n’est pas grave d’avoir mal. On est là.

A retenir

Un mal de ventre peut-il être psychologique chez un enfant ?

Oui, tout à fait. Les douleurs abdominales fonctionnelles sont fréquentes chez les enfants et souvent liées au stress, à l’anxiété ou à des difficultés émotionnelles. Elles sont réelles, même s’il n’y a pas de cause médicale identifiable.

Comment savoir si mon petit-enfant est victime de harcèlement ?

Les signes peuvent être discrets : refus d’aller à l’école, isolement, troubles du sommeil, baisse de rendement scolaire, ou douleurs récurrentes sans cause médicale. Un changement de comportement est souvent le premier indicateur.

Dois-je en parler à mes enfants (les parents) ?

Oui, mais avec tact. Présentez vos observations comme des inquiétudes partagées, pas comme des reproches. Une discussion ouverte, basée sur des faits concrets, permet d’agir ensemble dans l’intérêt de l’enfant.

Quels gestes simples peuvent aider un enfant anxieux ?

Créer des rituels apaisants (promenade, lecture, cuisine), encourager l’expression par le dessin ou le jeu, et offrir une écoute sans jugement. La régularité et la présence rassurante sont souvent plus efficaces que les mots.

Quand faut-il consulter un médecin ?

En cas de douleurs fréquentes ou intenses, de symptômes associés (fièvre, vomissements, perte de poids), ou si le comportement de l’enfant change durablement. Même si le malaise semble psychologique, une évaluation médicale est indispensable pour écarter toute cause organique.