À l’orée de l’automne, alors que les feuilles roussissent et que le verger s’apprête à sombrer dans sa dormance hivernale, une opportunité discrète mais puissante se présente aux jardiniers avertis : celle de multiplier groseilliers et cassissiers sans dépenser un sou. Ce geste simple, presque oublié, s’appelle la bouture. Et chaque année, autour du 22 octobre, une fenêtre idéale s’ouvre, où la nature semble répondre avec une bienveillance particulière à ceux qui savent l’écouter. Plus qu’une technique, c’est un rituel, une alliance entre l’observateur attentif, les cycles lunaires et les ressources du jardin. Entre tradition, écologie et frugalité, la bouture transforme un coin de terre en pépinière vivante, prête à offrir des récoltes futures. À travers des témoignages, des conseils précis et une compréhension fine des saisons, plongeons dans cette pratique qui redonne au verger son caractère magique.
Quelle est l’importance de la lune descendante pour réussir ses boutures en octobre ?
Lorsque Camille Lefebvre, maraîchère bio dans la Drôme, prépare ses boutures chaque automne, elle consulte toujours son calendrier lunaire. La lune descendante, c’est le moment où la sève redescend vers les racines , explique-t-elle en taillant un rameau de cassis. C’est comme si l’arbuste se mettait en mode hibernation, concentrant son énergie en profondeur. Quand on prélève une bouture à ce moment-là, on profite de ce mouvement naturel pour favoriser l’enracinement.
Entre le 12 et le 26 octobre 2025, la lune sera justement en phase descendante, offrant une fenêtre idéale. Cette période, souvent ignorée des jardiniers occasionnels, est pourtant cruciale. Contrairement à la lune montante, qui stimule la pousse des feuilles et des tiges, la descendante encourage le développement souterrain. Ainsi, la bouture, une fois plantée, n’essaie pas de produire de nouvelles feuilles trop vite, mais concentre ses ressources sur la formation de racines solides.
Le climat d’automne en France joue également en faveur de cette pratique. Les pluies fines et régulières hydratent le sol sans le saturer, tandis que les températures douces évitent les chocs thermiques. On observe un ralentissement de la nature , note Étienne Rousseau, jardinier passionné dans le Loiret. Les feuilles tombent, les insectes disparaissent, tout devient calme. C’est ce moment de pause que je choisis pour intervenir.
Comment choisir les bons rameaux sans affaiblir l’arbuste mère ?
Le choix du rameau est une étape déterminante. Trop vieux, il ne bouturera pas. Trop tendre, il risque de pourrir. Il faut viser le juste milieu : un bois de l’année, droit, vigoureux, d’environ 15 à 25 cm de long. Je regarde toujours la couleur , confie Camille. Si le rameau est encore vert mais commence à brunir légèrement, c’est parfait. Il est mature, mais pas mort.
Il est préférable de prélever les tiges sur l’extérieur de la touffe, là où elles reçoivent le plus de lumière et sont donc plus saines. Je ne prends jamais plus de trois boutures sur un même groseillier , précise Étienne. Et j’équilibre les prélèvements autour de la plante, pour ne pas déséquilibrer sa croissance.
La coupe doit être franche, réalisée juste sous un bourgeon, avec un sécateur bien désinfecté. J’utilise du vinaigre blanc pour nettoyer mes outils , ajoute Camille. Pas besoin de produits chimiques, ça marche très bien.
Quel matériel utiliser sans investir ?
La beauté de cette méthode réside dans sa simplicité. Pas besoin d’acheter des pots neufs ou des hormones d’enracinement. J’utilise des bouteilles en plastique que je découpe en deux , raconte Étienne. Le fond devient un mini-pot, et le haut, une cloche. C’est parfait pour protéger les boutures.
Le terreau ? Il peut venir du potager, enrichi d’une poignée de sable pour aérer le mélange. J’ai même utilisé du sable du bac à sable de mes enfants , sourit-il. Et ça a très bien fonctionné.
Un arrosoir, un couteau bien affûté, et parfois un petit tuteur en bois : tout le nécessaire est déjà dans la remise du jardinier. C’est une méthode qui respecte autant le porte-monnaie que la planète , résume Camille.
Quelle est la bonne technique de plantation pour maximiser les chances de réussite ?
Une fois le rameau prélevé, il faut le préparer avec soin. J’enlève les feuilles du bas, mais je laisse celles du sommet si elles sont encore vertes , indique Étienne. Elles vont continuer à photosynthétiser un peu, ce qui aide la bouture à survivre.
La longueur idéale est de 15 à 20 cm, avec deux ou trois yeux (bourgeons) visibles. Je coupe à 1 cm sous un œil et à 1 cm au-dessus du dernier , détaille Camille. Cela évite les zones de pourriture et stimule la croissance.
La plantation elle-même est un geste stratégique. Je plante la bouture en biais, à deux tiers de sa hauteur , explique Étienne. Cela augmente la surface en contact avec le sol, donc les chances de former des racines.
En pleine terre, un trou de 10 à 15 cm suffit. Si le sol est lourd, un peu de sable au fond améliore le drainage. En pot, un mélange de terre du jardin et de sable est idéal. Pas d’engrais, pas de produits chimiques , insiste Camille. La nature sait faire. Il faut juste lui donner les bonnes conditions.
Où installer les boutures quand on manque de place ?
Même sans grand jardin, on peut réussir ses boutures. J’ai installé les miennes en fond de massif, à l’abri du vent , témoigne Étienne. Elles étaient protégées, mais recevaient quand même de la lumière.
Sur un balcon, un petit coin à mi-ombre convient parfaitement. J’ai utilisé des pots en plastique récupérés de plantes achetées en jardinerie , raconte Camille. Je les ai placés contre le mur sud de mon immeuble. L’hiver, ils ont bien tenu.
Le plus important est de protéger les boutures des gelées précoces. Une cloche en plastique, une demi-bouteille, ou même un pot retourné avec un caillou dessous pour aérer , propose Étienne. Le but est de créer un microclimat doux.
Comment accompagner les boutures jusqu’au printemps ?
Une fois en place, les boutures demandent peu d’entretien, mais une attention constante. L’arrosage doit être très modéré , prévient Camille. Le sol doit rester juste humide, jamais mouillé. Sinon, la bouture pourrit.
En cas de sécheresse prolongée, un léger arrosage à la pomme d’arrosoir suffit. Je le fais le matin, quand il n’y a pas de soleil direct , précise Étienne. Comme ça, l’eau pénètre bien sans s’évaporer trop vite.
Un paillis léger, comme des feuilles mortes ou de la paille, peut être posé autour des boutures en pleine terre. Cela isole les racines du froid, tout en laissant respirer le sol , explique Camille. Et en se décomposant, ça nourrit la terre naturellement.
L’hiver passe. Et puis, au printemps, les premiers signes d’espoir apparaissent. J’ai vu des bourgeons gonfler, des petites feuilles pousser , se souvient Étienne. Et quand j’ai tiré légèrement sur une tige, elle a résisté. C’était bon : elle avait pris racine.
Quels sont les signes de réussite d’une bouture ?
La réussite se lit dans les détails. Un rameau qui reste souple, dont les bourgeons s’ouvrent au printemps, est un bon indicateur. Si vous tirez doucement dessus et qu’il ne se déracine pas, c’est qu’il a formé un système racinaire , confirme Camille. C’est un moment magique.
Parfois, les fruits arrivent dès la deuxième année. Mes premières groseilles étaient timides, mais elles étaient là , sourit Étienne. Et l’année suivante, la production a doublé.
Pourquoi ce geste transforme durablement un verger ?
La bouture n’est pas seulement une économie : c’est une stratégie de long terme. Chaque nouvelle plante peut à son tour être bouturée , souligne Camille. En trois ans, j’ai passé de deux à huit cassissiers. Et je n’ai rien acheté.
Ce cycle vertueux permet d’agrandir le verger, de renouveler les sujets vieillissants, ou d’expérimenter de nouvelles variétés en les obtenant par échange. J’ai donné trois boutures à une voisine, et elle m’a offert en retour un pied de framboisier ancien , raconte Étienne. Ce genre d’échange, c’est ce qui fait la richesse du jardinage.
Dans de nombreux villages, ces gestes relancent des traditions oubliées. Des ateliers de bouturage s’organisent, des savoirs se transmettent. On partage plus que des plantes , observe Camille. On partage du temps, de l’attention, une certaine philosophie de la nature.
En évitant l’achat de plants industriels, on réduit les emballages, les transports, l’empreinte carbone. Et on favorise des variétés locales, adaptées au terroir , ajoute Étienne. Ce n’est pas comme les plants standardisés qu’on trouve en jardinerie.
Le partage renforce aussi les liens sociaux. Dans mon quartier, on a créé un groupe de jardiniers solidaires , témoigne Camille. On échange des boutures, des graines, des conseils. C’est devenu une petite communauté vivante.
Conclusion : une magie simple, à portée de main
La bouture de groseilliers et de cassissiers en octobre n’est pas un miracle, mais une intelligence du vivant. Elle demande peu de matériel, un bon sens du timing, et un peu de patience. Autour du 22 octobre, quand la lune descend et que les feuilles tombent, la nature nous tend une main discrète. Il suffit de la saisir.
Ce geste, presque oublié, redonne du sens au jardinage. Il reconnecte à des rythmes anciens, à des pratiques durables, à une forme de frugalité joyeuse. Il transforme un simple coin de terre en lieu de transmission, de générosité, de renouveau. Et chaque printemps, quand les premières feuilles apparaissent sur une bouture de l’année précédente, c’est un petit triomphe : celui de l’attention, de la persévérance, et de la confiance en la nature.
A retenir
Quand est-il idéal de faire des boutures de groseilliers et cassissiers ?
La période idéale se situe autour du 22 octobre, durant la lune descendante, lorsque la sève redescend vers les racines et que les arbustes entrent en dormance. Entre le 12 et le 26 octobre 2025, les conditions sont particulièrement favorables.
Quels rameaux choisir pour une bonne reprise ?
Privilégiez des tiges de l’année, droites, vigoureuses, mesurant entre 15 et 25 cm. Elles doivent être légèrement brunies mais non desséchées, et porter encore quelques feuilles si possible. Prélevez-les sur l’extérieur de la touffe pour ne pas affaiblir l’arbuste mère.
Comment planter une bouture sans matériel coûteux ?
Utilisez un sécateur nettoyé, des pots ou bouteilles en récupération, et un mélange de terre du jardin avec du sable. Plantez la bouture en biais, à deux tiers de sa hauteur, en laissant émerger quelques centimètres. Protégez-la du gel avec une cloche ou un paillis léger.
Peut-on réussir des boutures en pot ou sur un balcon ?
Oui, les boutures peuvent très bien réussir en pot, à condition qu’elles soient à l’abri du vent et des gelées. Un emplacement mi-ombragé avec un bon drainage suffit. Arrosez modérément et surveillez les signes de reprise au printemps.
Quels sont les bénéfices à long terme de cette pratique ?
La bouture permet d’agrandir son verger gratuitement, de renouveler les sujets âgés, et de favoriser la biodiversité locale. Elle encourage aussi les échanges entre jardiniers, renforçant les liens sociaux et la transmission de savoirs.