Un mur en feu sans flammes : cette grimpante époustouflante envahit les jardins en 2025

Il existe des plantes qui se contentent de tenir leur place, discrètes, élégantes, en retrait. Et puis il y a celles qui entrent en scène comme un orchestre de cuivres au milieu d’un silence : flamboyantes, impérieuses, impossibles à ignorer. La bignone de Virginie, ou *Campsis radicans*, en fait partie. Ce n’est pas une simple grimpante : c’est une performance végétale, une cascade de fleurs ardentes qui jaillit des murs, des grillages, des troncs, comme si la nature elle-même décidait de célébrer l’été en grand spectacle. Depuis des décennies, elle séduit les jardiniers audacieux, ceux qui ne veulent pas seulement cultiver des fleurs, mais raconter une histoire avec leur jardin.

Qu’est-ce que la bignone de Virginie, et pourquoi fait-elle autant d’effet ?

La bignone de Virginie, dont le nom botanique est *Campsis radicans*, est une liane originaire du sud-est des États-Unis. Elle appartient à la famille des Bignoniacées, une lignée de plantes souvent spectaculaires, comme le jacaranda ou le catalpa. Mais la Campsis, elle, a une particularité : elle ne grimpe pas en s’enroulant. Elle s’accroche. Grâce à des racines adventives qui forment de véritables crampons, elle escalade les surfaces verticales sans soutien, sans tuteur, sans aide. C’est une alpiniste du végétal, autonome et tenace.

Élodie Ravel, paysagiste à Aix-en-Provence, l’a installée sur le mur sud de sa propriété il y a dix ans. « Au départ, j’avais peur qu’elle soit trop envahissante, confie-t-elle. Mais j’ai vite compris qu’elle n’était pas agressive, juste ambitieuse. Elle a atteint les 5 mètres en trois ans, et maintenant, chaque été, elle transforme mon mur en une fresque de feu. »

Cette image de « fresque de feu » n’est pas exagérée. Les fleurs, en forme de trompettes, mesurent entre 5 et 8 cm de long, et s’ouvrent en bouquets serrés de couleur rouge orangé, parfois bicolores. Certaines variétés, comme le cultivar ‘Flava’, offrent même un jaune soufre lumineux, presque électrique. Le spectacle dure de juillet à septembre, sans interruption, sans caprice.

Comment la bignone de Virginie résiste-t-elle aux saisons difficiles ?

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, cette plante flamboyante n’est pas fragile. Elle est rustique, capable de supporter des températures jusqu’à -15 °C selon les conditions. Elle redémarre chaque printemps avec une vigueur impressionnante, poussant de nouvelles tiges qui portent déjà les promesses de la floraison à venir.

« J’ai planté ma bignone après un hiver particulièrement rude, raconte Julien Moreau, retraité et passionné de jardinage à Dijon. Tout le monde me disait qu’elle ne survivrait pas. Et pourtant, dès avril, elle a envoyé de nouvelles pousses. À la fin de l’été, elle était en fleurs comme si rien ne s’était passé. »

Ce résilience s’explique par son mode de croissance. En fin d’hiver, il suffit de tailler les tiges de l’année précédente au-dessus du deuxième ou troisième bourgeon. Cette taille de rajeunissement stimule la production de nouvelles pousses florifères. Le sol n’a pas besoin d’être parfait : riche, bien drainé, c’est l’idéal, mais elle tolère le calcaire et les sols moins généreux. L’essentiel ? Un ensoleillement maximal.

Où et comment installer la bignone de Virginie pour un effet maximum ?

Le mur sud d’une maison est son terrain de prédilection. Là, elle capte chaque rayon de soleil, chaque degré de chaleur, et répond par une floraison plus abondante. Mais elle peut aussi grimper sur un vieux tronc d’arbre mort, un poteau de pergola, ou un grillage métallique. Dans ce cas, elle ne se contente pas de décorer : elle isole, cache, transforme.

À Bordeaux, Camille Thibault a choisi de la planter au pied d’un grillage qui sépare son jardin de celui de ses voisins. « Avant, c’était un mur froid, un peu triste. Maintenant, c’est une frontière vivante, vibrante. Les passants s’arrêtent parfois pour prendre des photos. Et moi, chaque matin, je suis accueillie par cette explosion de couleur. »

En massif, la bignone de Virginie peut jouer un rôle d’arrière-scène majestueuse. Plantée derrière des vivaces plus sobres — comme des sauges bleues ou des agastaches —, elle crée des contrastes saisissants. Associée à des feuillages argentés, comme l’armoise ou la lavande, elle paraît encore plus lumineuse. « C’est un peu comme accorder des instruments, explique Élodie Ravel. Le bleu calme le rouge, l’argent fait ressortir l’orange. La bignone devient alors une actrice parmi d’autres, mais toujours la plus remarquée. »

La bignone de Virginie attire-t-elle les insectes ?

Oui, et c’est l’un de ses atouts majeurs. Les fleurs en trompette, riches en nectar, sont une invitation ouverte aux pollinisateurs. Bourdons, abeilles, papillons — notamment les papillons de jour comme l’Argus bleu ou le Paon du jour — viennent butiner avec enthousiasme. Ce n’est pas seulement un spectacle pour les humains : c’est un écosystème en activité.

« J’ai remarqué que les papillons viennent plus tôt cette année, observe Camille Thibault. Et ils restent longtemps. C’est comme si la bignone était devenue un point de rendez-vous. »

Cette capacité à attirer la faune est d’autant plus précieuse que les jardins modernes tendent à devenir des espaces trop ordonnés, trop stériles. La bignone, elle, rappelle que la nature aime le désordre, la profusion, la vie en abondance.

Existe-t-il des variétés plus compactes pour les petits jardins ?

Bien que la bignone de Virginie puisse atteindre 6 à 10 mètres, certaines variétés ont été sélectionnées pour rester plus modestes. C’est le cas des cultivars ‘Summer Jazz Fire’ (rouge) et ‘Summer Jazz Gold’ (jaune orangé), qui ne dépassent pas 3 mètres. Ils sont parfaits pour les terrasses, les petits murs, ou les clôtures de balcon.

« J’ai un minuscule jardin sur cour à Lyon, raconte Léa Bonnet, jeune architecte d’intérieur. J’ai opté pour ‘Summer Jazz Gold’. Elle grimpe sur un treillis en fer forgé, et chaque été, elle illumine tout l’espace. Elle est moins puissante que la version sauvage, mais elle a le même charme. Et elle ne me prend pas toute la lumière ! »

Ces variétés sont toutefois un peu plus sensibles au froid, avec une rusticité limitée à -7 °C. Elles conviennent donc mieux aux régions douces ou aux emplacements abrités.

La bignone de Virginie est-elle envahissante ?

C’est une question que se posent souvent les jardiniers. La réponse est nuancée. La Campsis radicans est vigoureuse, oui. Elle pousse vite, elle s’étend, elle peut envahir un espace si on ne la surveille pas. Mais elle n’est pas envahissante au sens où l’est, par exemple, le lierre ou la renouée du Japon.

« Je la compare à un chien de grande taille, sourit Julien Moreau. Il a besoin d’espace, d’exercice, mais il est docile si on lui fixe des limites. Moi, je taille chaque hiver, et je guette les rejets à la base. En une dizaine de minutes, tout est sous contrôle. »

Le secret ? Une taille régulière, une surveillance discrète, et surtout, l’acceptation qu’elle ait un caractère. Elle n’est pas faite pour les jardins minimalistes ou trop rigides. Elle aime les espaces où elle peut s’exprimer, où elle est attendue, où elle est désirée.

Quelle place la bignone de Virginie occupe-t-elle dans l’imaginaire des jardins ?

Il y a des plantes utilitaires, des plantes discrètes, des plantes techniques. Et puis il y a celles qui évoquent une émotion, un souvenir, un lieu. La bignone de Virginie appartient à cette dernière catégorie. Elle rappelle les jardins de Provence, les façades italiennes, les villas du sud des États-Unis. Elle évoque la chaleur, la lumière, la passion.

Le témoignage de Sidonie Gabrielle Colette, cité dans le texte d’origine, résonne encore aujourd’hui : « Imaginer de loin, qu’un bignonier sonne ici de toutes ses trompettes rouges… ainsi recommencent en juillet les paisibles miracles d’un jardin de Provence. » C’est bien cela : la bignone n’est pas seulement une plante. C’est un poème. Un opéra végétal.

Élodie Ravel conclut : « Quand je la regarde en pleine floraison, je ne pense pas en termes de jardinage. Je pense en termes de beauté. Elle ne se contente pas de pousser. Elle raconte quelque chose. »

A retenir

Quelle est la différence entre bignone et Campsis ?

Le terme « bignone » est souvent utilisé comme nom commun pour désigner les plantes du genre *Campsis*, notamment *Campsis radicans* et *Campsis grandiflora*. Cependant, il existe aussi un genre *Bignonia*, différent, dont l’espèce *Bignonia capreolata* est parfois cultivée en France. En pratique, dans le langage courant, « bignone » fait presque toujours référence à la Campsis.

La bignone de Virginie est-elle toxique ?

Non, elle n’est pas considérée comme toxique pour les humains ou les animaux domestiques. Toutefois, comme pour toute plante, il est déconseillé d’en consommer les parties.

Faut-il la palisser ?

Non, la bignone de Virginie grimpe seule grâce à ses racines adventives. Elle n’a pas besoin de tuteur ni de palissage. Il suffit de l’orienter légèrement au départ, puis elle s’agrippe d’elle-même.

Quand faut-il la tailler ?

La meilleure période est la fin de l’hiver, avant la reprise de la végétation. On taille les tiges de l’année précédente au-dessus du deuxième ou troisième bourgeon pour favoriser une floraison abondante.

Peut-elle pousser à l’ombre ?

Non, elle a besoin d’un ensoleillement maximal pour bien fleurir. À l’ombre, elle pousse mais produit peu ou pas de fleurs.