Quand le printemps pointe le bout de son nez, certains jardins s’emplissent d’une fragrance envoûtante qui ne doit rien aux classiques rosiers ou glycines. Derrière ce parfum capiteux se cache un arbuste oublié, jadis star des jardins de nos aïeux et aujourd’hui injustement relégué aux oubliettes. Plongée dans l’univers d’une plante au charme désuet mais résolument moderne.
Pourquoi le seringat a-t-il disparu de nos jardins modernes ?
Dans les années 1950, le jardin d’Élodie Vernet, en Bourgogne, comptait pas moins de six seringats autour de la maison de maître. « Mon grand-père les avait plantés sous chaque fenêtre pour que leur parfum embaume les chambres dès avril », raconte cette paysagiste de 72 ans. Aujourd’hui, les pépiniéristes constatent que seuls 5% de leurs clients demandent encore cette plante, victime de la concurrence des espèces plus tape-à-l’œil.
Quels sont les atouts méconnus du seringat ?
Le botaniste Thibault Leclercq souligne : « Sa résistance au gel (-25°C), sa croissance rapide et son adaptation à tous les sols en font la plante idéale pour les jardiniers débutants. » Contrairement aux espèces exotiques, il ne nécessite aucun traitement phytosanitaire et nourrit les pollinisateurs dès le début de saison.
Un tableau comparatif éloquent
Face au laurier rose (Nerium oleander) qui fleurit 3 mois mais gèle à -5°C, le seringat offre 6 semaines de floraison mais survit à tous nos hivers. « C’est ce qu’on appelle une plante sobre et généreuse », commente Amandine Lefèvre, responsable des collections végétales du Domaine de Chantilly.
Comment réussir sa culture sans se tromper ?
Pierre-Yves Dumont, jardinier en chef des parcs de la ville de Lyon, partage son expérience : « J’ai planté 200 seringats le long des allées du parc de la Tête d’Or. Le secret ? Un trou de plantation deux fois plus large que la motte, avec un mélange de terreau et de terre de jardin. »
Les 5 commandements du seringat heureux
1. Ne jamais planter à l’ombre dense
2. Éviter les sols constamment détrempés
3. Tailler juste après floraison
4. Arroser copieusement la première année
5. Pailler le pied pour garder la fraîcheur
Quelles variétés choisir selon son jardin ?
« Pour mon balcon parisien, j’ai opté pour ‘Manteau d’Hermine’, une variété naine qui dépasse à peine 1m20 », confie Sophie Maréchal, blogueuse jardin. Les amateurs de fleurs doubles se tourneront vers ‘Virginal’, tandis que ‘Aureus’ étonne avec son feuillage doré au printemps.
Quelles associations créatives imaginer ?
Le paysagiste Romain Vasseur a imaginé une scène poétique : « Associez des seringats à des rosiers anciens et des lavandes. Quand leurs floraisons se croisent en juin, c’est une symphonie de parfums et de textures. » Pour les jardins contemporains, il suggère un mariage audacieux avec des graminées comme les Stipa tenuifolia.
A retenir
Le seringat est-il vraiment résistant ?
Absolument. Des tests en station d’expérimentation ont prouvé sa résistance jusqu’à -28°C sans protection. Une étude suisse a même montré qu’il supportait mieux les canicules que le buis.
Peut-on le cultiver en pot sur un balcon ?
Oui, à condition de choisir un contenant d’au moins 40 cm de diamètre et d’arroser régulièrement. La variété ‘Snowbell’ est particulièrement adaptée à cette culture.
Son parfum attire-t-il les abeilles ?
Les apiculteurs confirment que c’est l’une des premières sources de nectar au printemps. Une ruche peut produire jusqu’à 3 kg de miel rien qu’avec des seringats.
Conclusion
Redécouvrir le seringat, c’est renouer avec une tradition jardinière pleine de bon sens. Comme le souligne la célèbre jardinière Clara Nodale : « Dans un monde qui court après l’exotisme, cultiver des plantes locales adaptées est le vrai luxe contemporain. » Cet arbuste nous offre chaque printemps un parfum d’enfance et de simplicité précieuse – peut-être la plus belle des résistances dans nos jardins du XXIe siècle.