Le potimarron, l’allié anti-gaspi fondant pour Halloween

À l’approche de la Toussaint, quand le brouillard matinal s’accroche aux branches dénudées et que les marchés sentent bon la cannelle et la terre humide, l’automne s’installe avec ses rituels. Parmi eux, la courge. Elle trône sur les étals, ronde, orangée, parfois bosselée, parfois élancée, comme un rappel vivant de la générosité de la saison. Mais derrière cette apparence rustique, elle cache une vérité bien plus précieuse : elle est un trésor complet, une ressource que l’on peut exploiter de la racine à la graine, en passant par chaque fibre de sa chair. Ce n’est pas seulement un légume : c’est un manifeste du zéro déchet, une invitation à ralentir, à transformer, à créer. Et cette année, une simple décision peut tout changer : celle de tout récupérer. Pas pour faire l’effort, mais pour s’offrir une cuisine plus savoureuse, une maison plus chaleureuse, et des souvenirs plus riches.

La courge, un légume oublié qui mérite sa revanche

Longtemps reléguée au rang de simple décor d’Halloween ou de plat de circonstance, la courge est en réalité l’un des légumes les plus complets de notre alimentation. Elle pousse dans les potagers français avec une discrétion tranquille, mais ses atouts sont nombreux : riche en fibres, en vitamine A, douce en bouche, elle s’adapte à toutes les envies. Pourtant, chaque automne, une part importante de sa masse est jetée — peau, pépins, filaments — par habitude, par ignorance, ou par manque de temps. Or, ce que l’on croit être des déchets sont en réalité des trésors en attente d’exploitation.

Clara, maraîchère à Saint-Rémy-de-Provence, raconte : Quand j’étais petite, ma grand-mère récupérait tout. Les graines étaient grillées avec du thym, les épluchures finissaient dans le bouillon de soupe, et la peau de citrouille servait de photophore. Aujourd’hui, j’essaie de transmettre ça à mes enfants. La courge, ce n’est pas un légume qu’on consomme. C’est un cycle.

En France, près de 30 % des courges achetées finissent à la poubelle, souvent sous prétexte qu’elles sont trop grandes, trop difficiles à découper, ou qu’elles ne se conservent pas assez longtemps. Pourtant, en apprenant à la manipuler intelligemment, on peut non seulement éviter ce gaspillage, mais aussi enrichir son quotidien. Acheter une courge entière, plutôt qu’une portion prédécoupée sous plastique, c’est déjà un premier pas vers une consommation plus responsable — et plus savoureuse.

Comment découper une courge sans en perdre une miette ?

Le grand défi, souvent, c’est la découpe. La courge peut sembler intimidante, surtout les grosses citrouilles ou les butternuts coriaces. Mais avec les bons outils — un couteau bien aiguisé, une cuillère à glace, un économe — et une méthode claire, tout devient simple. L’astuce ? Travailler en deux temps. D’abord, couper la courge en deux dans le sens de la longueur. Ensuite, vider les pépins et les filaments à l’aide d’une cuillère. Cette étape, souvent faite à la va-vite, est en réalité cruciale : c’est là que commence la récupération.

Il faut placer deux récipients à côté de la planche à découper : un pour la chair, un autre pour les graines et les fibres. Cela évite le chaos, garde la cuisine propre, et permet de ne rien oublier. Le geste peut sembler anodin, mais il change tout. Il instaure une routine de valorisation, où chaque élément a sa place. Et pour les plus pressés, on peut même congeler la chair en morceaux pour une utilisation ultérieure — soupe, gratin, purée, ragoût — sans perdre en qualité.

Lucien, retraité à Clermont-Ferrand, raconte : Avant, je laissais ma fille couper la courge. Moi, je me contentais de la regarder. Puis un jour, je me suis dit : pourquoi ne pas apprendre ? J’ai acheté un bon couteau, j’ai regardé une vidéo, et maintenant, c’est moi qui prépare tout. Mes petits-enfants adorent quand je leur montre comment transformer une citrouille en repas complet.

La chair de courge, une alliée inattendue en cuisine

La chair de courge est un terrain de jeu pour les cuisiniers, amateurs ou confirmés. Douce, légèrement sucrée, elle s’associe aussi bien avec des saveurs salées que sucrées. En soupe, elle fond littéralement, offrant une texture veloutée sans ajout de crème. En gratin, elle remplace avantageusement les pommes de terre, avec un apport calorique moindre et un goût plus complexe.

Une recette simple, accessible à tous, permet de faire découvrir cette polyvalence : la soupe de courge aux pommes de terre et au muscat. En voici les ingrédients : 800 g de courge (butternut, potimarron ou autre), un oignon, deux pommes de terre, une cuillère à soupe d’huile d’olive, 50 cl d’eau ou de bouillon, deux cuillères à soupe de crème végétale, une pincée de muscade, sel et poivre. Après avoir fait revenir l’oignon, on ajoute les légumes coupés en morceaux, on couvre d’eau, on laisse mijoter 20 à 25 minutes, puis on mixe. Le résultat ? Une soupe onctueuse, réconfortante, parfaite pour les soirées fraîches.

Mais la courge ne se limite pas aux plats salés. Elle peut devenir un dessert d’exception. Une tarte à la courge, légèrement épicée à la cannelle et au gingembre, rivalise avec les classiques tarte aux pommes ou carrot cake. Et pour les plus audacieux, une mousse de courge au chocolat noir, subtile et surprenante, ravit les palais les plus exigeants.

Les épluchures, un bouillon d’or en cuisine

Les épluchures de courge, souvent jetées sans un regard, sont une mine d’or pour les amateurs de bouillons maison. Propres, bien rincées, elles peuvent être conservées dans un sac au congélateur jusqu’à récolte suffisante. Puis, un jour de pluie, on les fait frémir dans une grande casserole avec des oignons, des carottes, du céleri et quelques herbes. Le résultat ? Un bouillon doré, parfumé, profond, qui donne du caractère à toutes les soupes, riz ou légumineuses.

Camille, cuisinière passionnée à Bordeaux, témoigne : J’ai commencé à garder les épluchures par curiosité. Puis j’ai fait mon premier bouillon. Depuis, je n’achète plus de cubes. Ce n’est pas seulement meilleur, c’est aussi une manière de dire merci au légume.

Ce geste, simple et gratuit, transforme la cuisine en un lieu d’alchimie. Rien ne se perd. Tout se transforme. Et chaque repas devient un hommage à la saison.

Les graines de courge, une gourmandise qui se mérite

Les graines de courge, extraites de leur gangue filandreuse, sont l’un des meilleurs en-cas naturels. Riches en magnésium, en protéines végétales et en bonnes graisses, elles se grillent facilement. Après un rinçage minutieux et un séchage complet, on les mélange à un filet d’huile d’olive et à des épices : paprika, curcuma, herbes de Provence, ou même un peu de cannelle et de sucre pour une version sucrée. En 15 à 20 minutes à 180 °C, elles deviennent croustillantes, dorées, irrésistibles.

Elles peuvent accompagner un apéritif, parsemer une salade, ou simplement se déguster à la poignée, comme une friandise saine. Et pour les jardiniers, les plus belles graines, bien séchées, peuvent être conservées pour être replantées au printemps suivant. Un geste qui ferme la boucle : la courge d’aujourd’hui nourrit celle de demain.

Mes petits-enfants adorent les graines grillées , confie Élise, grand-mère à Rennes. On les fait ensemble, dans la cuisine. On discute, on rit, on goûte. Et puis, quelques mois plus tard, on replante les graines dans le jardin. C’est un rituel qui les marque. Ils comprennent que la nature ne jette rien.

Transformer la courge en décoration durable

À l’approche d’Halloween, les citrouilles sculptées envahissent les portes d’entrée. Mais trop souvent, elles sont jetées après quelques jours, parfois sans même avoir été utilisées en cuisine. Pourtant, une autre voie est possible : celle de la décoration éphémère mais utile.

En sculptant la courge sans percer le fond, on peut la conserver plus longtemps. À l’intérieur, on place une bougie LED ou une guirlande lumineuse, pour éviter tout risque d’incendie. La lumière filtre à travers les entailles, créant une ambiance chaleureuse et sécurisée. Et une fois la fête passée, la chair est récupérée pour une soupe, les graines pour un apéritif, la peau pour un photophore réutilisable.

On peut aussi détournir d’autres objets : bocaux repeints en orange, boîtes de conserve décorées, feuilles séchées disposées en couronne. L’important n’est pas la perfection, mais l’intention. Une décoration faite main, zéro déchet, raconte une histoire. Elle dit qu’on a pris le temps, qu’on a respecté le légume, qu’on a joué avec les saisons.

Une cuisine qui devient un atelier de sens

En adoptant cette approche, on ne change pas seulement ses habitudes alimentaires. On transforme sa relation au quotidien. Chaque geste — rincer les graines, éplucher la courge, conserver les peaux — devient un acte conscient. On ralentit. On observe. On valorise.

Et petit à petit, la cuisine devient un lieu d’apprentissage, de transmission, d’imagination. Les enfants regardent, participent, retiennent. Les repas ne sont plus seulement des pauses, mais des moments partagés, riches de gestes simples et profonds.

Comme le dit Julien, père de deux enfants à Grenoble : Depuis qu’on fait tout avec la courge, mes enfants posent des questions. Pourquoi on garde les épluchures ? Comment on fait pousser une citrouille ? C’est devenu un jeu. Et moi, je me sens plus connecté à ce que je mange.

A retenir

Peut-on vraiment tout utiliser dans une courge ?

Oui, absolument. La chair est idéale pour les soupes, purées, gratins ou desserts. Les épluchures peuvent être utilisées pour faire un bouillon maison. Les graines, une fois grillées, deviennent un en-cas savoureux et nutritif. Même la peau sculptée peut servir de photophore décoratif. Rien ne se perd.

Comment conserver les graines de courge pour les replanter ?

Il faut sélectionner les plus grosses graines, les rincer soigneusement, puis les faire sécher à l’air libre pendant plusieurs jours, à l’abri de l’humidité. Une fois sèches, elles peuvent être stockées dans une boîte hermétique, au frais et au sec, jusqu’au printemps.

Les épluchures de courge sont-elles comestibles ?

Non, elles sont généralement trop coriaces pour être consommées directement. En revanche, elles sont excellentes pour enrichir un bouillon maison, où elles libèrent leurs arômes et nutriments durant la cuisson. Après filtration, elles sont retirées.

Peut-on congeler la chair de courge ?

Oui, parfaitement. Il suffit de la couper en morceaux, de la blanchir rapidement ou de la cuire à la vapeur, puis de la congeler en portions. Elle se conserve ainsi plusieurs mois et peut être utilisée directement dans des soupes ou gratins.

Quelle est la meilleure manière de décorer une courge sans gaspillage ?

Scier la courge en deux, vider les graines, puis sculpter la partie supérieure sans percer le fond. Utiliser une bougie LED à l’intérieur. Après la décoration, récupérer la chair pour la cuisine et les graines pour les griller ou les semer. La peau peut être réutilisée comme contenant décoratif l’année suivante.