Alors que la France traverse une période de ralentissement économique, le gouvernement, placé sous la houlette de François Bayrou, dévoile un plan d’action ambitieux pour 2026. Ce programme, à la fois courageux et controversé, entend redresser la barre en combinant mesures fiscales ciblées et réformes structurelles. Deux décisions marquent particulièrement l’opinion : la suppression de deux jours fériés et l’introduction d’une taxe sur les colis volumineux, principalement en provenance de Chine. Derrière ces mesures se dessine une vision : rééquilibrer la consommation, protéger les commerçants locaux et enrayer la désindustrialisation du pays. Mais quel sera l’impact réel sur les Français, les entreprises et les relations internationales ? À travers témoignages, analyses et perspectives, plongeons dans les enjeux de cette réforme qui pourrait bien redéfinir le visage de l’économie française.
Quelle est la logique derrière la suppression de jours fériés et la taxe sur les colis ?
Le gouvernement justifie ces deux mesures par un constat partagé par de nombreux économistes : la France accumule un retard structurel dans la productivité et la compétitivité. En 2024, le pays a reçu 1,5 milliard de colis, dont près de 800 millions en provenance de l’étranger, principalement de Chine. Des plateformes comme Shein, Temu ou AliExpress ont profondément transformé les habitudes d’achat, poussant les consommateurs vers des produits low-cost, souvent à bas prix mais aussi à faible durabilité. Cette déferlante commerciale fragilise les artisans, les PME et les commerces de proximité, incapables de rivaliser sur le coût.
La taxe sur les colis, estimée à 2 euros par envoi, cible spécifiquement les expéditions de moins de 150 euros, jusqu’ici exonérées sous la directive européenne de 2010. En s’alignant sur une éventuelle proposition de la Commission européenne, la France tente de jouer la carte de la légitimité. Mais c’est aussi une manière de réintroduire de la justice dans la concurrence. « On ne peut pas demander à un maraîcher de Saint-Malo de concurrencer un vendeur anonyme de Guangzhou qui produit à moitié prix et expédie à l’autre bout du monde sans aucune contrainte environnementale », explique Léa Besson, économiste spécialisée dans les circuits courts.
Quant à la suppression de deux jours fériés, elle s’inscrit dans une logique de relance de l’activité économique. En moyenne, chaque jour férié coûte à l’économie française entre 1,5 et 2 milliards d’euros de PIB perdu. Le gouvernement espère ainsi gagner environ 40 heures de travail supplémentaires par an, ce qui pourrait stimuler la production et l’emploi dans les secteurs encore sous-capacité.
Les consommateurs seront-ils les grands perdants ?
La question du pouvoir d’achat est au cœur du débat. Si la taxe vise à protéger l’industrie locale, elle risque d’être répercutée directement sur les prix payés par les consommateurs. « C’est un paradoxe », note Julien Moreau, enseignant en sciences économiques à l’université de Lyon. « On veut soutenir les producteurs locaux, mais on pénalise les ménages les plus sensibles aux prix. »
C’est ce que redoute Camille Faure, mère de deux enfants, habitante de Clermont-Ferrand. « J’achète régulièrement sur Temu des vêtements pour mes enfants, parce que les marques françaises coûtent deux ou trois fois plus cher. Si chaque colis prend 2 euros de plus, ça fait vite 20 euros de frais annuels. Pour moi, c’est pas négligeable. » Pourtant, elle reconnaît que ce modèle ne peut pas durer : « Je sais bien que derrière ces prix, il y a du travail mal payé, du plastique partout, des camions qui polluent. Mais quand on a un budget serré, on n’a pas toujours le choix. »
Le gouvernement mise sur une transition progressive, accompagnée de campagnes d’information et de soutien aux produits labellisés « fabriqué en France ». L’idée n’est pas d’interdire les achats internationaux, mais de les rendre moins attractifs par rapport aux alternatives locales. « Il s’agit de redonner du sens à l’acte d’achat », insiste François Bayrou dans une récente déclaration. « Chaque euro dépensé localement est un euro qui nourrit notre économie, paie des salaires décents et préserve l’environnement. »
Comment les entreprises locales perçoivent-elles cette mesure ?
Pour de nombreux commerçants, la taxe sur les colis est perçue comme une bouée de sauvetage. « Depuis cinq ans, on perd des clients au profit de ces plateformes chinoises. Elles vendent des meubles, des luminaires, des objets déco à des prix impossibles à égaler », témoigne Élodie Renard, gérante d’un magasin de décoration à Bordeaux. « J’ai des fournisseurs français, des artisans, des coûts de transport raisonnables, mais je dois payer des loyers, des charges, des salaires. Eux, ils expédient depuis l’autre bout du monde sans aucune contrainte. »
Elle espère que la taxe permettra de « rétablir une forme d’équité ». « Ce n’est pas une garantie de succès, mais c’est un signal fort. Les gens pourraient commencer à se dire : “Est-ce que je veux payer 2 euros de moins pour un produit qui ne durera pas six mois, ou investir un peu plus dans quelque chose de solide, fait ici ?” »
Le Syndicat des Artisans du Sud-Ouest a salué la mesure, tout en appelant à des aides complémentaires : « La taxe est bienvenue, mais elle ne suffira pas. Il faut aussi faciliter l’accès au crédit, soutenir la formation, et mieux valoriser le “made in France” dans les médias et les écoles. »
Quelles conséquences pour le commerce international ?
La mesure risque de provoquer des remous au-delà des frontières. La Chine, principal exportateur de petits colis vers l’Europe, pourrait réagir par des contre-mesures ou des pressions diplomatiques. Déjà, certaines voix à Pékin ont qualifié la proposition de « protectionnisme déguisé ».
En Europe, la France pourrait cependant trouver des alliés. L’Allemagne et l’Italie étudient des mesures similaires, inquiètes de voir leurs industries locales grignotées par des importations massives. « Ce que fait la France pourrait servir de test grandeur nature », analyse Thomas Lefebvre, spécialiste des politiques commerciales à Bruxelles. « Si la taxe fonctionne sans provoquer de crise sociale, d’autres pays pourraient l’imiter. »
Le risque, toutefois, est que les grandes plateformes contournent la mesure en s’implantant directement en Europe, via des entrepôts en Pologne ou en Hongrie. C’est ce qu’a fait Shein en ouvrant un centre logistique à Liège. « La taxe s’applique aux colis expédiés depuis l’étranger, pas à ceux qui sont stockés localement », précise Léa Besson. « Donc, ces géants pourraient simplement déplacer leurs hubs pour éviter la taxe. »
Le gouvernement anticipe ce scénario et travaille sur des clauses d’application élargie, incluant les colis expédiés depuis des entrepôts européens appartenant à des entreprises étrangères. Une piste complexe, mais essentielle pour éviter les effets d’aubaine.
La taxe peut-elle encourager une consommation plus durable ?
Derrière l’objectif économique se profile une ambition écologique. Chaque colis en provenance de Chine parcourt en moyenne 10 000 kilomètres, générant des émissions de CO₂ considérables. En favorisant les circuits courts, la taxe pourrait contribuer à réduire l’empreinte carbone des Français.
« C’est une opportunité de changer de modèle », affirme Clémentine Dubois, coordinatrice d’un réseau de producteurs locaux en Normandie. « On voit déjà une prise de conscience. Les gens achètent plus de légumes de saison, privilégient les vêtements réparables, s’intéressent aux marques éthiques. Mais il faut les accompagner. »
À Nantes, un collectif de jeunes entrepreneurs a lancé « Circuit Court & Co », une plateforme de e-commerce 100 % locale. « On propose des produits similaires à ceux vendus sur AliExpress, mais fabriqués en France ou en Europe. Le prix est souvent 20 à 30 % plus élevé, mais la qualité est meilleure, et on offre un service après-vente. » Leur chiffre d’affaires a augmenté de 140 % en deux ans. « La demande est là. Il faut juste l’aider à se structurer. »
Quels sont les risques d’un tel changement de cap ?
L’un des dangers majeurs est une réaction négative des citoyens. Si la taxe est perçue comme une ponction supplémentaire sur le pouvoir d’achat, elle pourrait alimenter un mécontentement social. « Le gouvernement doit faire preuve de pédagogie », insiste Julien Moreau. « Il faut montrer que cette mesure n’est pas une taxe punitive, mais un levier pour construire une économie plus juste. »
Par ailleurs, le succès de la réforme dépendra de sa mise en œuvre. Une application floue, des délais administratifs, ou une absence de contrôle efficace pourraient vider la mesure de sa substance. « On a vu trop souvent des bonnes idées capoter à cause d’une mauvaise exécution », regrette Élodie Renard.
Enfin, il y a le risque d’isolement. Si la France agit seule, sans coordination européenne, elle pourrait se retrouver en porte-à-faux. « On ne peut pas protéger notre marché si nos voisins restent ouverts », souligne Thomas Lefebvre. « C’est une course contre la montre : il faut convaincre Bruxelles avant que les effets de contournement ne deviennent massifs. »
A retenir
Quels sont les objectifs de la taxe sur les colis volumineux ?
Le gouvernement français souhaite réduire la déferlante d’importations low-cost, notamment chinoises, afin de protéger les entreprises locales, relancer la production nationale et encourager une consommation plus durable. La taxe vise aussi à rétablir une concurrence équitable entre les acteurs du e-commerce.
Qui paiera cette taxe ?
La taxe serait appliquée à l’importation, mais il est probable que les plateformes la répercutent sur les consommateurs. Cependant, le gouvernement espère que cette charge incitera les acheteurs à se tourner vers des alternatives locales, moins coûteuses à long terme en termes sociaux et environnementaux.
La suppression de jours fériés est-elle liée à la taxe ?
Oui, les deux mesures s’inscrivent dans une même stratégie de relance économique. La suppression de deux jours fériés vise à augmenter le temps de travail et la productivité, tandis que la taxe sur les colis vise à rééquilibrer la balance commerciale et soutenir l’industrie nationale.
Les grandes plateformes pourront-elles contourner la taxe ?
Oui, certaines entreprises pourraient déplacer leurs entrepôts en Europe pour éviter la taxe. Le gouvernement envisage donc des mesures complémentaires pour inclure les expéditions depuis des hubs européens appartenant à des entreprises étrangères.
Quel impact environnemental cette mesure pourrait-elle avoir ?
En décourageant les achats internationaux à forte empreinte carbone, la taxe pourrait inciter à une consommation plus locale et durable. Moins de transports longue distance, moins d’emballages jetables, et un soutien aux produits durables : autant d’effets positifs attendus sur l’environnement.