Thomas Dutronc prépare son installation en Corse en 2025, loin du tumulte parisien

Alors que les dernières notes de sa tournée résonnent encore dans les salles françaises, Thomas Dutronc trace un nouveau cap, à contre-courant du tumulte artistique. Ce n’est pas une retraite, mais une avancée : celle d’un homme qui, après des décennies passées sur les routes, choisit de s’installer durablement dans un lieu qui a toujours été bien plus qu’un simple refuge. La Corse, île de lumière, de vent et de racines, s’impose aujourd’hui comme une évidence. Ce désir d’ancrage, nourri par les souvenirs d’enfance, les liens familiaux et une quête de simplicité, prend forme avec une clarté tranquille. Ce n’est pas un exil, c’est un retour à soi.

Pourquoi Thomas Dutronc veut-il changer d’horizon ?

Pour comprendre ce choix, il faut remonter aux étés d’autrefois. Thomas Dutronc n’a pas découvert la Corse par hasard. Elle lui a été transmise, comme un héritage. Son père, Jacques Dutronc, icône de la chanson française, a posé ses valises sur l’île il y a plus de cinquante ans, attiré par une maison achetée par Françoise Hardy, alors compagne de sa vie. Ce lieu, niché entre mer et maquis, est devenu un pilier de la famille. Chaque été, Thomas y retrouvait les odeurs de thym, le bruit des vagues contre les rochers, et surtout, le silence – un silence rare, profond, qui n’effraie pas, mais apaise.

« Quand j’étais gamin, on arrivait en bateau, et dès le débarquement, tout changeait », raconte-t-il dans une interview récente, les yeux plissés comme s’il revoyait la scène. « Plus de circulation, plus de stress. Juste le vent, les chiens qui aboient au loin, et les voisins qui te disent bonjour comme si tu étais parti hier. » Ce rituel est devenu une constante. Pendant des décennies, l’île a été son havre, celui où il rechargeait ses batteries entre deux concerts, deux albums, deux vies presque parallèles : l’artiste en représentation, et l’homme en quête de vérité.

Mais aujourd’hui, le désir d’aller plus loin se fait pressant. « Je ne veux pas juste y passer mes vacances. Je veux y vivre », confie-t-il, sans emphase. Ce n’est pas un coup de tête. C’est le fruit d’une mûrissement lent, d’années d’observation, de ressenti. Il parle d’un « besoin d’air », mais ce mot recouvre bien plus qu’une simple envie de changer de climat. C’est un besoin de respirer autrement, de vivre dans un cadre où les gestes ont du sens, où les paroles comptent, où le temps n’est pas une marchandise.

Qu’est-ce que la Corse représente pour Thomas Dutronc ?

« La Corse, elle se mérite », lance-t-il, presque comme un avertissement. Cette phrase, souvent répétée, n’est pas une formule creuse. Elle traduit une relation exigeante, faite de respect mutuel. L’île ne se donne pas à n’importe qui. Elle choisit ceux qui la comprennent, ceux qui acceptent ses règles tacites : la parole donnée, l’hospitalité sincère, la discrétion. Pour Thomas Dutronc, ces valeurs ne sont pas des vestiges du passé, mais des repères essentiels.

Il se souvient d’un soir d’été, dans un petit village perché. Un voisin, qu’il connaissait à peine, avait frappé à sa porte avec une assiette de figues fraîches. « Il m’a dit : “Tu en as mangé cette année ?” Et c’est tout. Pas de grand discours, juste un geste. » Ce souvenir le fait sourire. « C’est ça, la vraie richesse. Pas le luxe. La générosité simple. »

Cette culture du lien, il la voit disparaître ailleurs. À Paris, où il a grandi et vécu longtemps, tout va trop vite. « On se parle, mais on ne s’écoute plus. On est connectés, mais on est seuls. » En Corse, il retrouve un autre rythme : le lever tôt, les repas partagés, les discussions sans téléphone posé sur la table. « On vit en vrai », résume-t-il.

Un mode de vie en rupture avec le monde moderne

Le monde moderne, dit-il, s’invite parfois – les réseaux, les flux touristiques, les nouveaux venus – mais il ne domine pas. « Ici, on ne se prend pas pour ce qu’on n’est pas. On est ce qu’on est. Et ça, c’est rare. » Il cite des exemples concrets : un artisan qui refait une chaise plutôt que de la jeter, un fermier qui vend ses fromages au coin d’un chemin, sans enseigne, sans site web. « Ils ne font pas ça pour être vus. Ils le font parce que c’est bien. »

Cette sobriété volontaire, cette fidélité à des principes simples, c’est ce qu’il veut désormais pour lui. Pas un rejet du monde, mais un recentrage. « Je ne deviens pas ermite. Je veux juste vivre dans un endroit où les choses ont du poids. Où on ne perd pas son temps à courir après des illusions. »

Comment la tournée a-t-elle influencé sa décision ?

La dernière tournée de Thomas Dutronc a été un moment de grâce, mais aussi d’épuisement. Des mois sur les routes, des nuits blanches, des salles combles, des applaudissements… et pourtant, un vide grandissant. « Je jouais, je donnais, mais je sentais que je m’éloignais de quelque chose d’essentiel. »

Il raconte un soir, à Lyon, après un concert. Il était seul dans sa loge, les oreilles encore pleines de musique, mais le cœur vide. « Je me suis demandé : “À quoi ça sert, tout ça, si je ne suis pas en paix avec moi-même ?” » Ce doute, ce n’était pas un rejet de sa carrière, mais un appel à l’équilibre.

Quelques semaines plus tard, il est retourné en Corse. Un mois entier, sans agenda, sans interviews, sans contrainte. Il a marché dans les sentiers de montagne, passé des heures à écouter le vent dans les pins, discuté avec des gens du coin autour d’un verre de vin local. « J’ai dormi profondément. J’ai mangé lentement. J’ai ri pour de bon. » Ce séjour a été un déclic. « Je me suis dit : “C’est ici que je veux être. Pas en visite. En racine.” »

Un changement progressif, pas une rupture brutale

Thomas Dutronc insiste : ce n’est pas une fuite. « Je ne quitte rien. Je vais vers quelque chose. » La tournée s’achève, mais sa musique ne s’arrête pas. Il continuera à écrire, à composer, peut-être même à jouer occasionnellement. Mais le centre de gravité change. Sa maison d’été, longtemps un refuge temporaire, devient un foyer. « Elle n’a pas changé. C’est moi qui ai changé. »

Il décrit ce nouveau quotidien comme une forme de liberté retrouvée. « Je veux me réveiller sans alarme. Prendre mon café en regardant la mer. Travailler quand j’en ai envie, pas parce que le planning l’impose. » Ce rêve, il le partage avec sa compagne, Léa, photographe nature, qui voit dans ce projet une opportunité de renouer avec son amour des paysages sauvages. « Elle m’a dit : “Tu as raison. On a assez couru. Il est temps de s’ancrer.” »

Entre héritage familial et quête personnelle, quel est le sens de ce choix ?

Le lien familial est indéniable. Jacques Dutronc, aujourd’hui âgé, y vit encore. Thomas ne veut pas seulement s’installer dans un lieu, mais dans une continuité. « Mon père a construit sa vie là-bas. Je ne veux pas juste profiter de ce qu’il a fait. Je veux prolonger quelque chose. » Ce n’est pas une imitation, mais un hommage vivant.

Il se souvient d’une conversation avec son père, l’été dernier. Assis sur la terrasse, regardant le soleil se coucher sur la mer, Jacques lui avait dit : « Tu sais, la vraie liberté, ce n’est pas de tout pouvoir faire. C’est de pouvoir choisir ce qu’on veut vraiment. » Thomas n’a pas oublié ces mots. Aujourd’hui, il les incarne.

Ce choix n’est pas non plus une nostalgie. Il ne cherche pas à revivre son enfance. Il veut construire une vie adulte, alignée avec ses valeurs. « Paris m’a appris à me battre, à exister dans le bruit. La Corse m’apprend à exister dans le silence. Et c’est peut-être plus difficile. »

Un retour aux sources, mais pas un repli

Il est conscient que certains verront là un repli, une forme de retraite prématurée. « Je comprends. Mais pour moi, c’est l’inverse. C’est une forme d’engagement. Envers moi-même, envers un mode de vie, envers un territoire. » Il parle même de créer un petit studio d’enregistrement chez lui, pour accueillir des jeunes artistes, des musiciens en recherche. « Je veux que cette maison reste ouverte. Pas un bunker, mais un lieu de passage. »

A retenir

Pourquoi Thomas Dutronc veut-il s’installer en Corse ?

Thomas Dutronc souhaite s’installer durablement en Corse après sa tournée, attiré par un mode de vie plus simple, plus vrai, et profondément ancré dans des valeurs humaines fortes. Ce choix s’appuie sur un attachement familial ancien et des années de retour régulier sur l’île, où il a toujours trouvé apaisement et ressourcement.

Est-ce une rupture avec sa carrière artistique ?

Non. Thomas Dutronc ne quitte pas la musique. Il entend continuer à composer et à jouer, mais à son rythme. Son installation en Corse représente un recentrage, pas une rupture. Il souhaite préserver sa créativité tout en vivant selon un tempo plus lent et plus sincère.

Quelles valeurs la Corse incarne-t-elle à ses yeux ?

Pour Thomas Dutronc, la Corse incarne le respect, la parole donnée, la simplicité et l’accueil authentique. Il admire une culture où les gestes comptent plus que les apparences, où les relations humaines sont sincères et où le lien à la terre et à la communauté reste fort.

Comment sa famille perçoit-elle ce changement ?

Sa compagne, Léa, partage pleinement ce projet, y voyant une opportunité de vivre en harmonie avec la nature et le temps long. Quant à son père, Jacques Dutronc, figure emblématique de l’île depuis des décennies, il incarne un héritage que Thomas entend prolonger, non par nostalgie, mais par choix de vie.

Quel impact cela pourrait-il avoir sur son œuvre future ?

Bien que rien ne soit figé, Thomas Dutronc imagine que ce nouveau cadre influencera sa musique. Le silence, la lumière, les paysages, les rencontres – tout cela nourrit la création. Il espère que ses prochaines chansons porteront l’empreinte de cette sérénité retrouvée, sans renoncer à la vitalité qui l’anime depuis toujours.