Alors que les retraités font face à des mesures d’austérité annoncées pour 2026, une proposition de loi déposée en juillet 2024 offre une alternative inédite : intégrer l’engagement associatif dans le calcul des droits à la retraite. Derrière ce projet, une volonté de récompenser des années de bénévolat souvent invisibles dans les systèmes de protection sociale. Mais comment cette idée pourrait-elle transformer la vie de ceux qui ont consacré du temps à des causes collectives ?
Comment valoriser les années de bénévolat dans les droits à la retraite ?
La proposition de loi, initiée par des députés du groupe Socialistes et apparentés, propose d’assimiler certaines périodes de bénévolat à des cotisations retraite. Après dix années d’engagement associatif, un bénévole pourrait obtenir trois trimestres supplémentaires, et un trimestre supplémentaire serait ajouté pour chaque période de cinq années suivantes. Ce mécanisme s’inspire du modèle existant pour les sapeurs-pompiers volontaires, qui bénéficient déjà de trimestres retraite pour leur engagement. « C’est une reconnaissance de l’utilité sociale du bénévolat », explique Sophie Lambert, 58 ans, bénévole depuis 15 ans à une association d’aide aux réfugiés. « J’ai souvent dû réduire mes heures professionnelles pour m’occuper de dossiers urgents. Cette mesure compenserait en partie ces sacrifices. »
Qui pourrait bénéficier de cette majoration de pension ?
Le texte prévoit également une majoration de la pension pour les personnes ayant combiné carrière professionnelle et bénévolat significatif. Cette disposition cible notamment les individus qui ont ralenti leur progression professionnelle pour s’investir dans des associations. « J’ai accepté un mi-temps en entreprise pour m’occuper d’un atelier de soutien scolaire », raconte Marc Dubois, 62 ans, ancien professeur de mathématiques. « Mon salaire a baissé, mais j’ai contribué à aider des dizaines d’enfants. Aujourd’hui, ma retraite serait plus faible que celle de collègues ayant poursuivi un temps plein. Cette majoration réparerait cette injustice. »
Quel impact sur le statut des bénévoles ?
L’un des aspects novateurs du projet est la création d’un statut de « bénévole responsable ». Ce titre honorifique, attribué par les assemblées générales des associations, valoriserait l’engagement durable et régulier. « Cela pourrait inciter davantage de personnes à s’impliquer », estime Léa Moreau, coordinatrice d’une association de quartier à Bordeaux. « Depuis que nous avons instauré des attestations de bénévolat, le nombre de candidatures a augmenté de 30 %. Un statut officiel renforcerait cet effet. » Cependant, les détracteurs soulignent les risques de subjectivité dans l’attribution de ce statut, ce qui pourrait créer des inégalités entre bénévoles.
Quels obstacles législatifs cette proposition doit-elle surmonter ?
Le processus d’adoption de cette loi s’annonce complexe. Les débats parlementaires pourraient s’attarder sur le coût estimé de la mesure, estimé à plusieurs centaines de millions d’euros par an. « Le gouvernement actuel privilégie les économies budgétaires », rappelle le sénateur Émile Rousseau, opposé à la réforme. « Comment justifier cette dépense alors que les retraites actuelles sont gelées ? » En parallèle, des interrogations sur la faisabilité technique persistent : comment vérifier la régularité et la qualité de l’engagement bénévole ? Des outils numériques de traçabilité sont évoqués, mais leur mise en place nécessiterait un délai.
Quels changements pour les futurs retraités ?
Si la loi est adoptée, les bénévoles pourraient voir leurs droits retraite augmenter significativement. « Cela créerait un cercle vertueux », affirme Juliette Nguyen, économiste spécialisée dans les politiques sociales. « En valorisant le bénévolat, on encourage des comportements citoyens tout en renforçant le tissu associatif. » Pour les associations, cette mesure pourrait stabiliser leurs équipes bénévoles, souvent confrontées à un turn-over élevé. « Avec plus de sécurité pour l’avenir, les bénévoles s’investiraient davantage », note Thomas Bertrand, directeur d’une association d’aide aux personnes âgées.
Quelles réactions suscite cette initiative ?
Le projet divise les acteurs du secteur associatif. Si certains le saluent comme une « avancée historique », d’autres craignent un détournement de l’esprit du bénévolat. « L’aide aux autres ne devrait pas être motivée par un calcul retraite », tempère Claire Fournier, bénévole dans une association environnementale. « Mais je comprends que des années de travail non rémunéré soient reconnues. » Les syndicats de retraités, quant à eux, jugent la mesure « insuffisante » pour compenser les mesures d’austérité annoncées. « C’est un geste symbolique, mais il faudrait revaloriser l’ensemble des pensions », déclare Roger Lefevre, porte-parole de l’Union des retraités de France.
Conclusion : Une réforme ambitieuse mais incertaine
La proposition de loi sur le bénévolat retraite incarne un défi sociétal majeur : comment intégrer les contributions non monétaires dans les systèmes de protection sociale. Si elle parvient à surmonter les obstacles budgétaires et techniques, elle pourrait redéfinir la relation entre engagement citoyen et droits sociaux. Mais son adoption dépendra des arbitrages politiques dans un contexte économique tendu.
A retenir
Qui pourrait accumuler des trimestres retraite via le bénévolat ?
Tout bénévole ayant effectué au moins dix années d’engagement régulier et significatif, avec un système de bonus progressif (trois trimestres pour les dix premières années, un trimestre supplémentaire tous les cinq ans).
Comment être reconnu « bénévole responsable » ?
Le statut serait attribué par les associations via leurs assemblées générales, sur la base de critères d’assiduité, d’implication et d’impact social.
Quel serait le coût de cette réforme ?
Estimé à plusieurs centaines de millions d’euros annuels, selon les premières simulations, ce qui en fait un sujet de débat pour les parlementaires.
Quels bénéfices concrets pour les associations ?
Une stabilisation des équipes bénévoles et une attractivité accrue de l’engagement associatif, notamment auprès des actifs soucieux de leur avenir retraite.