Une infirmière stoppe le hoquet en 2 minutes avec un sac en papier et de l’eau

Juliette Lefrançois n’a jamais volontairement frôlé l’hystérie collective. Pourtant, cette infirmière de 47 ans de l’hôpital de Pau a suscité, l’hiver dernier, un regain de curiosité lorsqu’elle a calmé le hoquet d’un patient en le faisant d’abord respirer dans un sac kraft puis boire trois gorgées d’eau. En moins de deux minutes : fini le « hou-hou » qui martyrisait les poumons et la gorge. Depuis, la rumeur parcourt les couloirs : « Va voir Juliette, elle fait une sorte de rituel magique. » Un succès inattendu né d’une intuition grand-maternelle et d’un zeste de ténacité.

Comment est née cette idée étrange ?

Une nuit de décembre, le service de soins intensifs grouillait sous la neige. Un quadragénaire en réanimation après un accident de moto n’arrivait pas à dormir : hoquet toutes les dix secondes depuis treize heures. La morphine l’avait à peine adouci, l’homme geignait, penché sur ses drains thoraciques. « J’avais déjà essayé le sucre, le miel, la rétention de souffle, rien », se souvient Juliette. Dans un élan qu’elle appelle « presque irrationnel », elle agrippe un sac en papier utilisé pour les plateaux repas, le glisse sur ses propres lèvres pour vérifier le diamètre, puis le tend au malade. « Respire doucement. » Une dizaine de cycles plus tard, elle tend une paille plongée dans une carafe d’eau plate. Le diaphragme se fige, reprend son rythme, puis cesse de tressauter. Silence. Les infirmiers applaudissent presque.

Pourquoi ce geste est-il resté discret tant d’années ?

Juliette répète l’expérience à faible échelle, emballe les témoignages dans un dossier parallèle au dossier médical, classé « gestuelle V1 ». Personne n’ose publier : l’équipe craint la moquerie. Un interne propose même de mener « une étude un peu rigolote ». L’échec potentiel l’inquiète : « Si ça se trouve, la prochaine fois ce sera le patient suivant qui me regardera comme une illuminée. » Mais les cas s’accumulent : une étudiante en droit, un maçarbre, un chef pâtissier insomniaque tous calmés en moins de quatre minutes de « combo kraft + eau ». À la demande des médecins adjoints, Juliette rédige une fiche d’information destinée à l’équipe. Rien d’officiel, juste un aide-mémoire lamifié accroché devant le distributeur de gants.

Que se passe-t-il exactement dans le corps ?

L’idée principale, qui repose sur une dose fine d’hypothèse scientifique, est double.
L’effet sac en papier : en reboute-lunettes simples, elle explique « ça réchauffe l’air expiré plein de CO₂, et ce surplus pousse les récepteurs du nerf vague à freiner le spasme ». Cette contrainte artificielle convainc le cerveau qu’il n’est plus question de « danger abdominal ».
L’eau sorbée au calme : avaler un liquide à débit régulier dilate l’œsophage et stimule la motricité gastro-intestinale, raccordant deux zones nerveuses qui, en parfait élève, viennent réajuster le diaphragme. Juliette recommande trois petites gorgées ; pas plus : « On ne veut pas d’un reflux qui réveillerait le petit tyran interne. »

Est-ce que cela marche à chaque fois ?

En huit mois, Juliette a appliqué la méthode à vingt-trois patients adultes. Le taux « d’arrêt » est de 78 %. Les récalcitrants, la majorité, présentaient une cause sous-jacente : reflux sévère, tumorations ou traitements neurologiques. En post-partum, elle a même réussi à calmer un nourrisson de six jours, « le seul qui n’a pas eu droit au sac », rigole-t-elle : elle a imité le rythme de respiration du sac en tenant bébé contre son épaule, puis proposé une bouillie additionnelle. Le hoquet a abandonné après cinquante secondes.

Qui manipule la méthode aujourd’hui ?

Les équipes de réanimation de trois établissements aquitains ont intégré le « protocole Lefrançois » en essai local. Il remplace, dans le cadre d’autorisation orale du patient, les injections de baclofène fortement dosées. L’intervention est bénévole ; aucune facture n’est glissée dans le dossier. Chaque patient reçoit la première gorgée sous la supervision d’un infirmier formé. « Pour éviter ce qui ressemble à un numéro de cirque », précise Juliette.

Le témoignage de Pierre Castagnou, berné puis conquis

« J’étais en observation cardiaque, le cardiologue m’avait banni du café et du champagne. Le hoquet a commencé au troisième jour, juste après ma gamelle de soupe ». Pierre Castagnou, 62 ans, vigneron de Jurançon, a cru « aux bourrichettes de sa grand-mère » avant de capituler. « Juliette arrive avec un sac et m’ordonne : “Vingt inspirations rondes.” Bon, c’est ridicule, j’ai même demandé : “Vous êtes sûre que je ne vais pas m’endormir ?” Trois minutes plus tard, silence radio dans ma cage thoracique. J’ai failli pleurer de soulagement. Depuis, j’en parle clairement comme de “la petite séance magie”. »

Est-ce que tout le monde peut l’utiliser chez soi ?

Juliette délivre une dose minimale de sagesse. « Dès que le hoquet dépasse quarante-huit heures ou quand le patient perd du poids, il faut consulter. » Elle le répète, calmement, comme une prière. Elle propose alors les étapes toutes simples :
1. Prendre un sac sûr — kraft propre, sans poignée en plastique.
2. Respirer dedans calmement, bouche et nez repliés, pendant vingt cycles.
3. Pendant la dernière expiration, placer une paille dans un verre d’eau tiède, enfouir trois gorgées ‑– tempo lunaire » : inspiration, ingestion, expiration.
Aucun appareillage, zéro dépense, mais obligation de rester assis, lombaires droites. Sujets asthmatiques : même principe, sac plus grand pour éviter l’hypercapnie. Seniors confus : succion par petite cuillère.

Quelles limites reconnaît Juliette ?

Elle l’assume :
Fortes douleurs thoraciques ou difficulté à avaler : suspension immédiate.
Personnes ayant eu un AVC récent : risque d’ingestion compliquée.
Pour cause psychogène, un trio motrice sac-eau-paille n’est pas miracle. Laurent Gaudon, patient anxieux depuis que son épouse est partie, walk-man dégoulinant de paroles, en a fait l’amère expérience : le hoquet a disparu… trente secondes, puis a repris de plus belle. La psychothérapie a fini le travail.

Conclusion

Approche sans bruit, gestes à portée de tiroir, succès mesuré mais réel : la petite méthode de Juliette Lefrançois réconcilie efficacité et sécurité. Elle ne remplace pas le médecin, elle fait patienter l’urgence et réduit la dose de médicament. Comme le dit patiemment l’infirmière, « parfois, la médecine passe aussi par une carte kraft plate ». Et lorsqu’un hoquet renaît dans un couloir aseptisé, on sait maintenant où chercher un scoop de CO₂ chaud.

A retenir

Quand faut-il s’inquiéter d’un hoquet qui persiste ?

Dès qu’il dure plus de 48 heures ou qu’il empêche de dormir, boire ou manger, un avis médical devient indispensable.

Peut-on tester la méthode Lefrançois seul , enfant ou personne âgée ?

Autorisée chez l’adulte vigilant. Pour les enfants et seniors, mieux vaut demander l’accord d’un professionnel de santé et observer une surveillance étroite.

Que faire si le hoquet revient juste après l’intervention ?

Recommencer la séquence une fois. Au-dessus de trois échecs, orientation vers un médecin ou un centre anti-douleur hospitalier.