Un oubli courant au jardin pourrait coûter 1500 € d’amende aux Français en 2025

En mai 2024, un décret est paru discrètement au Journal officiel, sans grand écho dans les médias. Pourtant, ses conséquences touchent aujourd’hui des millions de propriétaires en France. Entré en vigueur le 1er janvier 2025, ce texte renforce une obligation ancienne mais souvent négligée : le débroussaillement autour des habitations situées en zone à risque. Ce geste, simple en apparence, s’impose désormais comme un pilier de la prévention incendie, surtout dans un contexte de réchauffement climatique où les épisodes caniculaires et les feux de forêt se multiplient. Derrière cette mesure réglementaire, ce sont des vies, des foyers et des écosystèmes entiers que l’on cherche à protéger.

Qu’est-ce que le débroussaillement, et pourquoi devient-il une priorité nationale ?

Le débroussaillement consiste à réduire la végétation inflammable autour des constructions, afin de créer une zone tampon en cas d’incendie. Cette pratique n’est pas nouvelle, mais elle est désormais encadrée de manière plus stricte. Désormais, tout propriétaire dont le terrain se situe à moins de 200 mètres d’un massif forestier, d’une lande, d’un maquis ou d’une garrigue classé à risque doit obligatoirement débroussaille. L’objectif est clair : limiter la propagation du feu en éliminant les ponts végétaux qui peuvent le faire passer rapidement de la forêt aux habitations.

À Saint-Rémy-de-Provence, Élodie Vasseur, propriétaire d’une maison de village entourée de collines boisées, témoigne : J’ai longtemps pensé que mon terrain était trop petit pour représenter un danger. Mais l’été dernier, un feu a pris à 800 mètres de chez moi. Les pompiers ont dû intervenir toute la nuit. Depuis, je débroussaille deux fois par an, et je surveille chaque branche trop basse. Ce n’est plus une option, c’est une responsabilité.

Quelles sont les sanctions en cas de non-respect de l’obligation ?

Ignorer cette règle expose à des sanctions concrètes. Le décret prévoit une amende de 1 500 €, classée en contravention de 5e classe — le niveau le plus élevé. Cette somme peut être majorée si le non-respect de l’obligation contribue à une situation d’urgence, comme un incendie nécessitant une intervention des secours.

En juillet 2024, dans les Alpes-Maritimes, un propriétaire a vu son terrain devenir un foyer d’extension lors d’un feu de forêt. Malgré plusieurs mises en demeure de la mairie, il n’avait pas procédé au débroussaillement. L’amende a été portée à 2 000 €, et les pompiers ont dû dévier leurs moyens pour protéger sa propriété, compromettant la sécurité d’autres foyers à proximité. Ce genre de situation est insupportable , déplore Lucas Moreau, lieutenant au SDIS 06. On arrive sur un feu déjà incontrôlable à cause de zones non débroussaillées. Chaque mètre compte, et chaque négligence coûte cher.

Comment savoir si mon terrain est concerné par cette obligation ?

La première étape pour tout propriétaire est de déterminer si son bien est soumis à l’obligation. Pour cela, une ressource officielle est désormais incontournable : le site Géorisques. Cette plateforme fournit une cartographie précise des zones à risque d’incendie de forêt. En entrant l’adresse ou en localisant le terrain sur la carte, on obtient une réponse claire : assujetti ou non.

Depuis le 1er janvier 2025, une autre obligation s’ajoute : lors d’une vente ou d’une location, le propriétaire doit informer l’acquéreur ou le locataire des contraintes de débroussaillement. Cette information est intégrée à l’état des risques naturels, miniers et technologiques (ERNMT), un document légal désormais indispensable.

Cela change tout , confie Sophie Lanier, notaire à Nîmes. Avant, beaucoup ignoraient cette obligation. Aujourd’hui, elle est formalisée, visible, et engage la responsabilité du vendeur. On voit déjà une prise de conscience accrue.

Quelles sont les étapes clés pour un débroussaillement conforme à la réglementation ?

Comment délimiter les zones à traiter ?

Le périmètre à débroussailler s’étend sur 50 mètres autour de chaque construction. Pour les chemins d’accès, une bande de 10 mètres de chaque côté doit également être dégagée. Cette zone, souvent appelée espace d’effacement , doit être exempte de végétation dense ou sèche.

J’ai fait l’erreur de ne nettoyer que devant la maison , raconte Marc Ténot, retraité à Béziers. Un agent de la mairie est venu me voir et m’a montré que les côtés et l’arrière étaient tout aussi importants. Depuis, j’ai fait un plan détaillé avec des repères visuels.

Quels végétaux faut-il éliminer en priorité ?

Les herbes hautes, les branchages morts, les buissons denses et les feuilles accumulées sont les principaux vecteurs de propagation du feu. Il faut également veiller à l’élagage des arbres : les branches basses doivent être coupées pour qu’elles soient à au moins 2 mètres du sol, empêchant ainsi au feu de grimper dans la cime.

Les espèces végétales elles-mêmes peuvent poser problème. Le romarin, le thym ou le ciste, bien que typiques du paysage méditerranéen, sont très inflammables. Leur présence doit être limitée, ou compensée par des plantes plus résistantes au feu, comme les lauriers ou les oliviers.

Comment maintenir un entretien régulier ?

Le débroussaillement n’est pas une opération ponctuelle. Il exige un entretien constant, surtout avant la saison estivale. L’idéal est d’intervenir deux à trois fois par an : au printemps, après la pousse, et à l’automne, après la chute des feuilles.

Je fais un tour complet de mon terrain chaque mois d’avril , explique Aïcha Benali, habitante de Fréjus. Je coupe, je ramasse, et je brûle les déchets verts dans les jours autorisés. C’est un peu fastidieux, mais je pense à mes enfants. Je veux qu’ils soient en sécurité ici.

Quels sont les bénéfices du débroussaillement au-delà de la simple conformité ?

Le débroussaillement n’est pas qu’un devoir légal : c’est un investissement en sécurité, en qualité de vie et en préservation du territoire.

Protéger son habitation, c’est d’abord éviter que le feu ne l’atteigne. Une étude du ministère de l’Intérieur montre que les maisons entourées d’un espace débroussaillé ont 70 % moins de chances d’être touchées lors d’un incendie de forêt. Ce n’est pas anodin.

La sécurité des occupants est aussi renforcée. Moins de végétation inflammable signifie un temps d’évacuation plus long et une meilleure visibilité pour les secours. En 2023, à Ganges, un couple âgé a pu être évacué à temps grâce à un chemin d’accès dégagé, alors que les flammes approchaient à moins de 100 mètres.

Enfin, le débroussaillement participe à la préservation de l’environnement. En limitant la propagation des feux, on protège la biodiversité locale, les sols et les ressources en eau. Chaque hectare sauvé, c’est une forêt qui pourra continuer à capter du carbone , rappelle Julien Ferrand, écologue au CNRS. Ce geste individuel a un impact collectif.

Où trouver de l’aide pour se mettre en conformité ?

Plusieurs acteurs peuvent accompagner les propriétaires dans cette démarche.

Les mairies jouent un rôle central. Elles informent sur les obligations locales, parfois plus strictes que la réglementation nationale, et peuvent organiser des journées de sensibilisation. Certaines proposent même des aides financières ou des broyeurs en prêt.

Les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) sont également une ressource précieuse. Ils dispensent des formations gratuites, réalisent des diagnostics sur site et publient des guides pratiques. À Toulouse, le SDIS 31 a lancé un programme de conseillers feu formés pour visiter les propriétés à risque élevé.

Enfin, faire appel à un professionnel du paysage peut être un bon choix, surtout pour les grands terrains. Ces experts connaissent les normes, utilisent du matériel adapté et proposent des solutions esthétiques et durables. J’ai engagé un paysagiste pour restructurer mon jardin , raconte Thierry Lefort, à Grasse. Il a remplacé les plantes trop sèches par des espèces résistantes au feu, et tout est harmonieux. Je suis en règle, et j’aime encore plus mon extérieur.

Un geste simple, mais vital pour l’avenir

Le débroussaillement n’est pas un caprice administratif. C’est une réponse concrète à un danger réel. Avec l’augmentation des températures et la sécheresse prolongée, la France connaît désormais une saison des feux qui s’étend de mai à octobre, voire au-delà. Chaque propriété non entretenue devient un risque potentiel pour l’ensemble d’un territoire.

En 2023, près de 50 000 hectares ont brûlé en France métropolitaine. Des milliers de personnes ont dû être évacuées. Ces chiffres ne sont pas anodins. Ils appellent à une prise de conscience collective, portée par des actions individuelles.

Le décret de 2024, discret à sa parution, s’impose aujourd’hui comme un levier essentiel de prévention. Il ne s’agit pas seulement d’éviter une amende de 1 500 €, mais de faire preuve de civisme. Protéger son chez-soi, c’est aussi protéger ses voisins, ses pompiers, et la nature qui nous entoure.

A retenir

Le débroussaillement est-il obligatoire partout en France ?

Non, cette obligation concerne uniquement les propriétés situées à moins de 200 mètres d’un massif ou d’une formation végétale classée à risque d’incendie. La carte Géorisques permet de vérifier précisément si un terrain est concerné.

Quelle est la distance exacte à respecter autour de la maison ?

Un périmètre de 50 mètres autour de chaque construction doit être débroussaillé. En outre, les chemins d’accès doivent être dégagés sur 10 mètres de chaque côté.

Dois-je informer mon locataire ou mon acheteur ?

Oui, depuis le 1er janvier 2025, cette information est obligatoire et doit figurer dans l’état des risques naturels, miniers et technologiques (ERNMT) remis lors de la vente ou de la location.

Peut-on être aidé financièrement pour le débroussaillement ?

Certaines communes ou intercommunalités proposent des aides ou des équipements en prêt (broyeurs, débroussailleuses). Il est conseillé de se renseigner auprès de la mairie ou du SDIS local.

Que faire des déchets végétaux après le débroussaillement ?

Les déchets doivent être évacués ou broyés selon les règles locales. Le brûlage à l’air libre est souvent interdit ou strictement encadré. Le compostage ou le dépôt en déchetterie sont des alternatives recommandées.