Alors que la préparation à la retraite devient une préoccupation croissante pour les Français, le Plan d’épargne retraite (PER) s’impose comme une solution plébiscitée. En septembre 2024, près de 11,2 millions de personnes en étaient détentrices, selon le ministère de l’Économie. Au-delà de sa fonction première – constituer un capital pour la fin de carrière –, le PER séduit aussi par ses avantages fiscaux souvent sous-estimés. Flexible, accessible à tous et optimisable selon la situation personnelle, il représente un levier puissant pour réduire sa fiscalité tout en préparant sereinement l’avenir. Décryptage complet, avec des témoignages concrets de bénéficiaires qui ont su tirer parti de cet outil.
Qu’est-ce qu’un PER ?
Le Plan d’épargne retraite, né de la loi Pacte en 2019, a remplacé progressivement les anciens dispositifs d’épargne retraite comme le PERP ou le Madelin. Il existe sous trois formes : le PER individuel, ouvert à tous ; le PER d’entreprise collectif, mis en place par l’employeur ; et le PER d’entreprise obligatoire, désormais généralisé dans de nombreuses entreprises. C’est toutefois le PER individuel qui attire le plus d’épargnants, en particulier les indépendants, les cadres ou les couples souhaitant mutualiser leurs efforts.
Le principe est simple : chaque épargnant verse de l’argent sur son PER au cours de sa vie active. À la retraite, il peut choisir de récupérer cette épargne sous forme de capital, de rente viagère, ou d’un mix des deux. Ce qui distingue le PER des autres placements, c’est sa double dimension : accumulation d’un patrimoine pour demain, et optimisation de la fiscalité dès aujourd’hui.
Camille Lefebvre, 48 ans, architecte indépendante à Lyon, témoigne : “J’ai ouvert mon PER il y a quatre ans, au moment où mes revenus ont dépassé les 80 000 euros annuels. Je cherchais un moyen de réduire mon impôt tout en préparant ma retraite. Depuis, j’y verse régulièrement 7 000 euros par an, et j’ai vu ma facture fiscale baisser de manière significative.”
Comment fonctionne la défiscalisation avec un PER ?
L’un des atouts majeurs du PER réside dans la possibilité de déduire ses versements volontaires du revenu imposable. Concrètement, chaque euro versé sur le PER diminue d’autant la base d’imposition de l’impôt sur le revenu. Cette stratégie est d’autant plus avantageuse que le taux marginal d’imposition (TMI) est élevé.
Par exemple, une personne imposée à 30 % qui verse 10 000 euros sur son PER peut espérer une réduction d’impôt de 3 000 euros, dans la limite du plafond de déduction. Pour les contribuables en tranche à 41 % ou 45 %, l’économie devient encore plus substantielle.
“Je suis cadre dans une multinationale, mon TMI est à 41 %”, explique Thomas Rivière, 52 ans, habitant de Bordeaux. “Chaque année, je verse le maximum déductible sur mon PER. C’est un réflexe automatique, comme un impôt prélevé par anticipation, mais que je récupère sous forme d’épargne. En dix ans, j’ai accumulé plus de 200 000 euros, et j’ai économisé près de 70 000 euros en impôts.”
Quel est le plafond de déduction fiscale du PER ?
La déduction n’est pas illimitée : elle obéit à un plafond annuel, calculé en fonction des revenus ou bénéfices de l’année précédente. Ce plafond varie selon le statut professionnel.
Le plafond pour les salariés
Pour les salariés, le montant déductible correspond au plus élevé entre deux seuils : 10 % des revenus imposables de l’année précédente, dans la limite de 10 % de 8 fois le Plafond Annuel de la Sécurité Sociale (PASS), ou 10 % du PASS de l’année précédente. En 2025, le PASS 2024 étant fixé à 46 368 euros, cela donne un plafond maximal de 37 094 euros et un minimum de 4 637 euros.
“J’ai cru que mon plafond était bloqué à 10 % de mon salaire”, raconte Élodie Mercier, 45 ans, ingénieure à Toulouse. “En réalité, grâce au plafond de 8 PASS, je peux déduire jusqu’à 37 000 euros, alors que mon salaire brut est de 90 000 euros. Cela m’a permis d’accélérer mon épargne sans toucher à mon budget courant.”
Le plafond pour les indépendants
Les travailleurs indépendants bénéficient d’un régime légèrement différent. Leur plafond est le plus élevé entre : 10 % des bénéfices imposables (BIC, BA, BNC), dans la limite de 10 % de 8 PASS, plus 15 % du bénéfice compris entre 1 et 8 PASS, ou 10 % du PASS de l’année en cours. En 2025, cela peut atteindre jusqu’à 87 135 euros.
“En tant que psychologue libérale, mes revenus fluctuent”, souligne Léa Dubois, 41 ans, installée à Montpellier. “L’année où j’ai gagné 120 000 euros, j’ai pu déduire près de 60 000 euros sur mon PER. C’est un vrai levier de gestion patrimoniale, surtout quand on a des années fastes.”
Comment optimiser l’efficacité fiscale du PER ?
Pour tirer pleinement profit du PER, il ne suffit pas de verser de l’argent : il faut le faire intelligemment, en tenant compte des spécificités fiscales et familiales.
La mutualisation
Les couples mariés ou pacsés peuvent mutualiser leurs plafonds de déduction. Cela signifie que l’un des deux partenaires peut utiliser le plafond non utilisé par l’autre. Cette option, à activer chaque année via la case 6QR sur la déclaration de revenus, est particulièrement utile lorsque l’un des conjoints a des revenus faibles ou n’est pas imposable.
“Mon mari est fonctionnaire, je suis en mi-temps thérapeutique”, témoigne Manon Vasseur, 50 ans, de Nantes. “Mon plafond de déduction est bas. Grâce à la mutualisation, c’est lui qui déduit l’intégralité de nos versements communs. On optimise ainsi notre fiscalité sans changer notre mode de vie.”
Utiliser les plafonds antérieurs de manière optimale
Un point méconnu : le plafond de déduction non utilisé peut être reporté sur les trois années suivantes. Cela permet de “stocker” des droits à déduction en vue d’une année exceptionnelle – une vente immobilière, un bonus important, ou une reprise d’activité après un temps partiel.
“J’ai reporté mon plafond pendant deux ans, puis j’ai fait un gros versement en 2024 après la vente d’un bien”, raconte Julien Morel, 54 ans, entrepreneur à Strasbourg. “J’ai pu déduire plus de 50 000 euros en une seule fois. Sans ce report, j’aurais perdu une partie de mon avantage fiscal.”
Anticiper la fiscalité à la sortie
La stratégie de déduction doit aussi tenir compte de la fiscalité future. Si un épargnant n’est pas imposable aujourd’hui, il peut choisir de ne pas déduire ses versements, afin de bénéficier d’une imposition plus légère à la sortie. À l’inverse, si son TMI actuel est élevé, déduire immédiatement est souvent plus rentable.
“Je suis en fin de carrière, et mon impôt est élevé”, explique Thomas Rivière. “Je déduis tout. Même si la rente sera imposée plus tard, l’économie d’impôt immédiate compense largement ce futur coût.”
Quelle est la fiscalité à la sortie du PER pour les versements déductibles ?
La sortie du PER est un moment clé. Elle détermine la manière dont les fonds seront perçus et imposés. Trois options principales s’offrent à l’épargnant.
La sortie en rente : elle est imposée comme une pension de retraite, avec un abattement de 10 % sur les revenus. Les prélèvements sociaux (9,7 %) s’appliquent également. Cette formule assure une stabilité financière sur le long terme.
La sortie en capital : le capital retiré est imposé au barème progressif de l’impôt sur le revenu. En revanche, la partie correspondant aux intérêts ou plus-values est soumise à un prélèvement forfaitaire unique de 30 % (12,8 % d’impôt + 17,2 % de prélèvements sociaux).
La sortie mixte : elle combine les deux précédentes. Par exemple, retirer 20 % en capital pour financer un projet, et transformer le reste en rente. C’est la solution la plus flexible, adaptée aux besoins variés des retraités.
“À la retraite, j’ai choisi la sortie mixte”, confie Camille Lefebvre. “J’ai pris un petit capital pour rénover ma maison, et le reste en rente. Cela me donne une sécurité, tout en gardant un peu de liquidités.”
Conclusion
Le PER n’est pas qu’un simple placement pour la retraite : c’est un outil stratégique de gestion patrimoniale et fiscale. En permettant des déductions immédiates de l’impôt sur le revenu, tout en offrant une grande souplesse à la sortie, il s’adapte à des profils très variés – salariés, indépendants, couples, pré-retraités. Son efficacité repose toutefois sur une bonne compréhension des plafonds, des mécanismes de report et de mutualisation, ainsi que sur une anticipation claire de la situation future. Comme le montrent les témoignages de Camille, Thomas, Léa ou Julien, le PER, bien maîtrisé, devient un levier puissant pour construire une retraite sereine, tout en allégeant sa charge fiscale dès aujourd’hui.
A retenir
Qui peut ouvrir un PER ?
Tout adulte résidant fiscal en France peut ouvrir un PER individuel, sans condition d’âge ni de revenu. Il est particulièrement adapté aux salariés, indépendants, et couples souhaitant mutualiser leurs efforts d’épargne.
Peut-on retirer l’argent avant la retraite ?
Les fonds sont bloqués jusqu’à la retraite, sauf exceptions (invalidité, surendettement, expiration des droits aux allocations chômage, achat de la résidence principale pour les travailleurs non-salariés). En cas de retrait anticipé, les sommes déduites sont remboursées avec des pénalités fiscales.
Les plus-values du PER sont-elles imposées ?
Oui, mais différemment selon le mode de sortie. En cas de retrait en capital, les gains sont soumis au prélèvement forfaitaire unique de 30 %. En rente, ils sont intégrés dans l’imposition globale, après abattement de 10 %.
Le PER est-il plus avantageux que l’assurance-vie ?
Les deux produits ont des objectifs différents. L’assurance-vie est plus souple pour les retraits, mais le PER offre un avantage fiscal immédiat via la déduction. Pour la préparation à la retraite, le PER est souvent plus pertinent, surtout pour les personnes imposées à des taux élevés.
Peut-on avoir plusieurs PER ?
Oui, il est possible de détenir un PER individuel et un PER d’entreprise. Les plafonds de déduction sont cumulés, mais le total déductible reste soumis aux limites annuelles selon le statut du contribuable.