Limite d’âge pour conduire : le débat européen en 2025 inspire d’autres pays

La question de limiter la conduite à partir d’un certain âge divise les autorités européennes. Alors que l’Italie durcit ses règles pour les conducteurs professionnels de plus de 68 ans, le Portugal adapte ses propres dispositions, et d’autres pays observent ces évolutions avec attention. Derrière ce débat se cache une problématique complexe : concilier sécurité routière, autonomie des seniors et besoins du secteur du transport.

Une question cruciale pour la sécurité routière européenne

« La mobilité des seniors est un enjeu majeur, mais elle doit s’inscrire dans un cadre sécurisé », estime Clara Moreau, coordinatrice du réseau européen des politiques de mobilité. Selon Eurostat, d’ici 2040, un quart des Européens aura plus de 65 ans. Cette transition démographique pousse les gouvernements à revoir leurs stratégies, notamment dans le domaine des transports professionnels. L’Union européenne, consciente de cette urgence, explore des pistes pour encadrer la conduite des aînés sans porter atteinte à leurs libertés.

Comment l’Italie adapte-t-elle ses règles pour les conducteurs professionnels ?

En Italie, la limite des 68 ans pour renouveler un permis poids lourd n’est pas une nouveauté : elle existe depuis 1992. Cependant, la récente pénurie de chauffeurs a relancé les discussions. « Les entreprises de transport subissent un manque cruel de main-d’œuvre qualifiée, surtout en zones rurales », explique Luca Romano, directeur d’une coopérative de logistique dans le Piémont. La réforme italienne cible spécifiquement les catégories C, CE, D et D1, réservées aux véhicules de transport de marchandises ou de passagers.

Un exemple concret

« J’ai passé 35 ans au volant de camions frigorifiques », témoigne Marco Bianchi, 67 ans, originaire de Bologne. « À 68, je devrais arrêter, même si ma santé est excellente. C’est frustrant, mais je comprends les raisons ». Marco souligne les exigences physiques du métier : « La nuit, les réflexes ralentissent, et les heures de conduite sont épuisantes. »

Quelles solutions face à la pénurie de chauffeurs ?

Face à la demande croissante de transporteurs, certaines voix s’élèvent pour proposer des ajustements. « Repousser la limite à 70 ans pourrait offrir un répit temporaire », suggère Sofia Carvalho, économiste spécialisée dans les filières logistiques. Toutefois, cette idée divise. Les partisans de la sécurité routière insistent sur les risques liés à l’âge, comme la baisse de vigilance ou les troubles visuels.

Une dérogation temporaire ?

« La dérogation à 70 ans est une piste, mais elle doit être encadrée », précise Thomas Lefevre, expert en ergonomie des transports. « Des tests médicaux renforcés, des formations continues, et peut-être une réduction des heures de conduite nocturne pour les seniors ». Une approche qui séduit les entreprises, mais inquiète les associations de seniors, comme l’explique Élise Dubois, représentante de l’organisation « Seniors en Mouvement » : « Il ne faut pas confondre l’âge avec la compétence. »

Le Portugal, modèle d’équilibre entre sécurité et autonomie

Le Portugal illustre cette tension entre nécessité sécuritaire et respect des droits individuels. Pour les conducteurs de marchandises (catégories C et CE), la limite est fixée à 70 ans, avec des examens médicaux renforcés dès 65 ans. En revanche, les bus (catégories D et D1) interdisent la conduite professionnelle après 67 ans, indépendamment de l’état de santé. « Cette différenciation reflète le risque accru lorsqu’on transporte des passagers », note Ana Ferreira, médecin experte au ministère des Transports portugais.

Réglementation différenciée selon les véhicules

« Conduire un bus exige une concentration constante, surtout en milieu urbain », souligne Joaquim Santos, ancien chauffeur de Lisbonne, contraint à l’arrêt à 67 ans. « J’étais en pleine forme, mais les règles sont claires. Heureusement, j’ai pu m’orienter vers la formation des jeunes conducteurs. »

Une évolution possible dans d’autres pays européens ?

La Commission européenne étudie des mesures harmonisées, mais sans imposer une interdiction uniforme. « Chaque pays a ses spécificités », rappelle Ingrid Weber, porte-parole de la DG MOVE. « L’objectif est de partager les bonnes pratiques, pas de créer un système unique. » Des études comparatives sont en cours pour évaluer l’impact des règles italiennes et portugaises sur les accidents liés aux conducteurs âgés.

Harmonisation ou diversité des approches ?

« L’Europe doit éviter les décisions brutales », prévient Lars Müller, lobbyiste pour l’industrie automobile. « Une harmonisation excessive pourrait pénaliser des régions dépendant des chauffeurs seniors. » En Allemagne, par exemple, les syndicats du transport s’opposent à toute limite d’âge, préférant des contrôles individualisés. « Ce débat met en lumière la tension entre régulation paneuropéenne et souveraineté nationale », analyse Clara Moreau.

A retenir

Les mesures italiennes s’appliquent-elles aux véhicules personnels ?

Non. En Italie, les restrictions concernent uniquement les permis professionnels (catégories C, CE, D, D1). Les conducteurs de plus de 68 ans peuvent continuer à utiliser leur véhicule personnel, à condition de respecter les critères médicaux standards. Le permis B reste valable sans limite d’âge.

Pourquoi des règles plus strictes pour le transport de passagers ?

Le transport de passagers implique des responsabilités accrus : « La moindre erreur peut avoir des conséquences dramatiques », explique Ana Ferreira. Les tests psychotechniques sont donc plus rigoureux, avec une attention particulière sur la gestion du stress et la réactivité en situation critique.

Quel est l’enjeu pour l’Union européenne ?

L’UE cherche à établir un cadre flexible, permettant aux États membres de s’adapter à leurs réalités locales tout en garantissant un niveau de sécurité élevé. « Il s’agit de préparer la mobilité de demain, où les seniors resteront actifs mais dans des conditions optimales », conclut Clara Moreau.

Conclusion

Le débat sur la limite d’âge pour la conduite professionnelle illustre les défis complexes auxquels l’Europe doit faire face. Entre sécurité, autonomie et besoins économiques, les solutions doivent être nuancées. Les expériences italienne et portugaise offrent des pistes prometteuses, mais leur adaptation à d’autres contextes nécessitera dialogue et pragmatisme. Une chose est claire : les routes de l’avenir devront être conçues pour tous, sans compromettre la sécurité de personne.