Je n’aurais jamais imaginé tomber malade à cause de mon chien… Cette phrase, prononcée un soir d’automne par Camille Lefebvre, résonne comme un écho dans bien des foyers français. À 42 ans, cette enseignante lyonnaise, passionnée de randonnée et fière propriétaire de Léo, un berger australien de cinq ans, a vu sa vie basculer après une simple griffure lors d’un jeu dans le jardin. Fièvre persistante, douleurs articulaires, éruption cutanée : les symptômes se sont succédé sans lien apparent, jusqu’au diagnostic médical. Toxoplasmose , a annoncé le médecin. Une infection rare chez l’adulte sain, mais potentiellement grave chez les femmes enceintes ou les personnes fragilisées. Camille, sous traitement, a dû interrompre son travail pendant trois semaines. Je ne reproche rien à Léo, bien sûr. Mais j’aurais aimé savoir.
Pourquoi un animal sain peut-il transmettre une maladie ?
Les chiens, souvent perçus comme des boules de poils affectueuses et inoffensives, peuvent être des porteurs silencieux de pathogènes. Leur mode de vie en interaction constante avec l’environnement – terre, eau, végétation, autres animaux – les expose à des agents infectieux que leur système immunitaire tolère, sans qu’ils en souffrent. C’est ce décalage entre apparence de santé et réalité biologique qui trompe les propriétaires. Le phénomène, scientifiquement appelé zoonose, concerne plus de 70 maladies transmissibles de l’animal à l’humain. En France, où près de 8 millions de chiens partagent l’intimité des foyers, la vigilance s’impose, surtout dans les périodes de transition comme l’automne, où l’humidité et les promenades en forêt multiplient les risques de contamination.
Quelles sont les voies de transmission les plus fréquentes ?
Les contacts les plus anodins peuvent devenir des vecteurs : une caresse suivie d’un repas sans lavage de mains, un bisou sur le museau, une griffure lors d’un jeu, ou encore le nettoyage des déjections sans gants. Les poils, la salive, les griffes et les urines peuvent abriter des bactéries, des parasites ou des champignons. Les enfants, plus proches du sol et moins rigoureux dans les gestes d’hygiène, sont particulièrement exposés. Mais ce sont aussi les personnes âgées ou celles souffrant de pathologies chroniques qui courent le plus grand danger.
Quelles maladies doivent alerter les propriétaires en 2025 ?
Alors que les températures baissent et que les feuilles mortes tapissent les chemins, certaines pathologies resurgissent avec une régularité préoccupante. Connaître les menaces permet de mieux s’en protéger.
La leptospirose : une bactérie insidieuse après les pluies
Transmise par l’urine de rongeurs contaminés, la leptospirose prolifère dans les zones humides. Les chiens qui boivent dans des flaques ou se roulent dans la boue peuvent contracter la bactérie, puis la transmettre à leur entourage. Les symptômes chez l’humain – fièvre soudaine, douleurs musculaires, jaunisse – peuvent mener à des complications rénales ou hépatiques. En 2024, près de 800 cas humains ont été recensés en France, dont plusieurs liés à un contact avec un chien infecté. Raphaël Moreau, vétérinaire à Bordeaux, insiste : La vaccination contre la leptospirose n’est pas obligatoire, mais elle devient essentielle dans les zones urbaines ou périurbaines où les rats sont présents.
La rage : un risque minoré, mais pas éteint
La rage est aujourd’hui quasi inexistante en France métropolitaine, mais des cas d’importation sont régulièrement signalés. En 2023, un chiot rapporté d’un voyage en Afrique du Nord a été diagnostiqué positif, entraînant une alerte sanitaire. Les autorités ont dû tracer tous les contacts humains. La rage, c’est 100 % mortelle une fois les symptômes apparus , rappelle le Dr Élodie Brunet, infectiologue à Marseille. La vaccination obligatoire à l’importation n’est pas un formalisme : c’est une barrière vitale.
La teigne : une infection fongique facile à attraper
Souvent sous-estimée, la teigne est une mycose cutanée transmise par contact direct. Elle se manifeste par des plaques rouges, squameuses, parfois prurigineuses, sur le chien comme sur l’humain. Lorsque Lucie, 6 ans, a ramené une lésion circulaire sur le cuir chevelu, ses parents ont d’abord pensé à une allergie. C’est le vétérinaire qui a fait le lien avec Moka, le labrador familial, qui présentait une petite perte de poils derrière l’oreille. On a traité toute la maison pendant six semaines, désinfecté les coussins, les peluches, les tapis , raconte son père, Antoine. C’est impressionnant de voir à quel point un champignon peut s’installer partout.
La toxocarose : un danger pour les enfants
Cette parasitose, causée par un ver intestinal du chien (Toxocara canis), est particulièrement redoutable chez les jeunes enfants. Les œufs du parasite, présents dans les selles, peuvent survivre plusieurs mois dans le sol. Un enfant qui joue dans un parc contaminé et porte les mains à la bouche peut ingérer les œufs, entraînant des troubles digestifs, des douleurs abdominales, voire des atteintes oculaires. En 2024, une étude de l’Institut Pasteur a révélé que 12 % des parcs urbains à Paris présentaient des traces de Toxocara. Vermifuger régulièrement son chien, c’est aussi protéger les enfants des autres , souligne le Dr Moreau.
Comment vivre en sécurité sans sacrifier l’affection ?
Il ne s’agit pas de transformer son chien en source de suspicion, mais d’adopter des gestes simples et efficaces pour prévenir les risques. L’équilibre entre intimité et prudence est possible.
Quelles mesures d’hygiène quotidienne adopter ?
Les gestes barrières ne sont pas réservés aux hôpitaux. Après avoir caressé son chien, surtout s’il vient de sortir, il est crucial de se laver les mains. Les enfants doivent être éduqués à cette routine. Après une balade humide, essuyer soigneusement les pattes du chien avec un chiffon dédié réduit la propagation de germes. De même, nettoyer régulièrement les paniers, jouets et zones de couchage limite les accumulations de parasites. On ne cherche pas la stérilité, mais la maîtrise , explique Raphaël Moreau. Un chien propre, c’est un foyer plus sain.
Quelles préventions vétérinaires sont indispensables ?
Le calendrier de santé du chien doit inclure plusieurs actions clés :
- La vermifugation quatre fois par an, voire plus en cas de risque élevé (jardin, contact avec d’autres animaux).
- La vaccination annuelle contre la leptospirose, la rage, et les autres maladies recommandées selon la région.
- Le traitement antiparasitaire externe (contre puces, tiques, moustiques) toute l’année, mais surtout en automne et au printemps.
- Des visites régulières chez le vétérinaire, notamment en cas de changement de comportement ou de symptômes bénins.
Comment protéger les personnes vulnérables ?
Dans un foyer où vit une personne âgée, un nouveau-né, une femme enceinte ou un malade chronique, les précautions doivent être renforcées. Le contact direct avec les déjections doit être évité. L’utilisation de gants pour le nettoyage des zones souillées est obligatoire. Les baisers sur le museau ou les léchouilles sur les mains doivent être découragés. Je conseille à mes patients immunodéprimés de ne pas laisser leur chien dormir sur le lit , précise le Dr Brunet. Ce n’est pas une punition, c’est une protection.
Et si des symptômes apparaissent ?
Face à une éruption cutanée, une fièvre inexpliquée, des troubles digestifs ou une fatigue inhabituelle, il est essentiel de penser au lien possible avec l’animal. Trop souvent, les médecins et les patients négligent cette piste. J’ai mis trois semaines à faire le lien entre ma mycose et le chien de mon fils , témoigne Amina, 38 ans, infirmière à Toulouse. J’avais consulté deux dermatologues avant que l’un d’eux me demande si j’avais un animal.
La communication entre vétérinaire et médecin est cruciale. En cas de doute, il faut consulter les deux professionnels. Un prélèvement cutané, une analyse de selles ou un bilan sanguin peut confirmer ou écarter une zoonose. Le traitement, souvent simple, évite alors des complications graves.
Conclusion : une relation équilibrée, fondée sur la connaissance
Le chien n’est pas un danger, mais un partenaire de vie qui exige une certaine responsabilité. En 2025, la santé animale et humaine est de plus en plus interconnectée. Les propriétaires doivent sortir de l’illusion que tout va bien parce qu’on ne voit rien . Les agents infectieux sont invisibles, mais leurs effets peuvent être durables. En adoptant des gestes simples, en suivant les recommandations vétérinaires et en restant attentif aux signaux d’alerte, il est tout à fait possible de vivre en harmonie avec son compagnon à quatre pattes, sans compromettre la santé de la famille.
A retenir
Qu’est-ce qu’une zoonose ?
Une zoonose est une maladie transmissible d’un animal à l’humain. Elle peut être causée par des bactéries, des virus, des parasites ou des champignons. Les chiens, en raison de leur contact étroit avec l’environnement et les humains, peuvent en être des vecteurs, même s’ils ne montrent aucun symptôme.
Quels sont les signes d’une infection transmise par un chien ?
Les symptômes varient selon la maladie, mais peuvent inclure des éruptions cutanées, des fièvres inexpliquées, des douleurs articulaires, des troubles digestifs ou une fatigue intense. En cas de doute, il est important d’informer son médecin de la présence d’un animal de compagnie.
Doit-on arrêter de câliner son chien ?
Non. L’affection partagée avec un chien fait partie des bienfaits de sa présence. Cependant, il est recommandé d’éviter les léchouilles sur le visage, de se laver les mains après les contacts, et de ne pas laisser l’animal lécher des plaies ou des muqueuses.
Les chiens de compagnie doivent-ils être vaccinés contre toutes les maladies ?
Non, mais certaines vaccinations sont fortement recommandées, comme celle contre la leptospirose ou la rage. Le calendrier vaccinal doit être établi en concertation avec le vétérinaire, en fonction du mode de vie du chien et des risques locaux.
Les personnes âgées ou fragiles doivent-elles éviter d’avoir un chien ?
Non, au contraire, un chien peut améliorer la qualité de vie. Cependant, des mesures de précaution renforcées doivent être prises : suivi vétérinaire rigoureux, hygiène stricte, et évitement des contacts à risque avec les déjections ou la salive.