Les espaces intérieurs d’aujourd’hui ne se contentent plus de simples cloisons. Ils cherchent à respirer, à capter la lumière, à offrir des transitions fluides entre les pièces tout en affirmant une identité. La verrière, longtemps incontournable, a su s’imposer comme une signature esthétique dans les intérieurs contemporains. Mais une nouvelle vague de séparations d’espace, plus sensibles aux matières, aux textures et aux lignes organiques, redéfinit progressivement notre manière d’habiter. Ce n’est plus seulement une question de fonction, mais d’atmosphère, de confort visuel et de personnalité. À travers des choix plus audacieux, les architectes d’intérieur et les maîtres d’ouvrage redessinent les limites – ou plutôt, les suggèrent – sans jamais enfermer.
La verrière est-elle encore d’actualité ?
Si la verrière a longtemps dominé le marché des séparations lumineuses, son omniprésence a parfois engendré un certain essoufflement. Trop vue, trop copiée, elle risque de perdre de son impact. Pourtant, loin d’être démodée, elle se réinvente. Aurore Pannier, architecte d’intérieur chez Parisdinterieur, observe une mutation subtile : « On ne se contente plus du cadre noir standard. Aujourd’hui, on joue avec les teintes, les essences de bois, les courbes. Une verrière peut devenir un élément sculptural, presque organique. »
À Paris, dans un appartement rénové par ses soins, elle a installé une verrière courbe en chêne brossé, aux montants teintés en vert olive. « Le client voulait séparer la cuisine ouverte du salon sans rompre la continuité visuelle. Le choix du bois et de la courbure adoucit l’ensemble, et la teinte apporte une touche de nature sans être envahissante. » Le résultat ? Un espace lumineux, fluide, mais parfaitement structuré. La verrière n’est plus un simple élément fonctionnel : elle devient un trait de caractère.
Le verre lui-même évolue. On le choisit fumé pour une ambiance feutrée, dépoli pour une intimité douce, ondulé pour un jeu de lumière subtil, ou coloré pour une touche d’audace. Certains projets, comme celui de Léonie Chambon, une designer marseillaise, mixent plusieurs types de vitrages sur une même structure. « Dans une cuisine-atelier, j’ai combiné du verre transparent en haut et du verre dépoli en bas. Cela permet de voir la lumière entrer, tout en protégeant les zones de stockage. »
Comment sortir des usages classiques de la verrière ?
La force de la verrière réside aussi dans sa capacité à surprendre. Installée là où on ne l’attend pas, elle devient un élément de narration. À Lyon, dans une ancienne imprimerie reconvertie en loft, Julien Ravel a posé une verrière en arc au fond d’un couloir, entre la chambre et la salle de bain. « Le client souhaitait une transition douce, presque poétique. La verrière laisse passer la lumière du matin, et crée un effet de transparence qui donne l’impression que l’espace flotte. »
Dans un dressing, la verrière peut servir de cloison décorative tout en offrant une visibilité sur les rangements. « C’est une idée que j’ai proposée à une cliente à Bordeaux, raconte Aurore Pannier. Elle voulait un dressing ouvert, mais avec une sensation de zone délimitée. La verrière en bois et verre texturé a créé cette frontière douce. Le matin, la lumière traverse et met en valeur les vêtements comme dans une vitrine. »
Même en salle de bain, la verrière trouve sa place. Elle remplace avantageusement les parois opaques, surtout dans les petits espaces. « J’ai travaillé sur un projet à Nantes où la salle de bain était sans fenêtre, mais adjacente à une pièce lumineuse, explique Julien Ravel. Une verrière texturée en haut a permis d’apporter de la clarté sans sacrifier l’intimité. Le résultat est étonnamment apaisant. »
Les briques de verre, un retour en grâce ?
Longtemps stigmatisées pour leur association aux années 80, les briques de verre font un retour remarqué. Mais cette fois, c’est avec une approche plus mature, plus raffinée. « On ne les utilise plus en grandes surfaces uniformes, précise Léonie Chambon. On les intègre ponctuellement, comme des éléments de scénographie. »
À Montpellier, dans une cuisine ouverte sur le salon, elle a installé un panneau de briques de verre entre le plan de travail et la table à manger. « L’idée était de créer une séparation visuelle, mais pas acoustique. La lumière du jour traverse les briques, diffuse, et donne une ambiance presque aquatique. Le matériau joue avec les reflets, les ombres, et change selon l’heure. »
Les briques de verre s’adaptent particulièrement bien aux pièces humides. Résistantes à l’humidité, faciles à nettoyer, elles sont idéales en salle de bain. « J’ai conçu un projet à Strasbourg où la douche était entourée de briques de verre translucides, raconte Aurore Pannier. L’espace reste lumineux, mais le regard ne pénètre pas directement. C’est une intimité douce, qui respire. »
Leur modularité permet aussi des compositions sur mesure. On peut créer un soubassement haut de 1,20 mètre, laissant l’espace libre au-dessus, ou monter un mur complet. « Le jeu est dans l’assemblage, ajoute Julien Ravel. J’ai vu des installations en diagonale, en damier, ou avec des briques de tailles différentes. C’est un matériau qui accepte la créativité. »
Le claustra, une alternative graphique et chaleureuse
Moins transparent que la verrière, moins dense que le mur, le claustra incarne une troisième voie. Il structure sans cloisonner, filtre sans isoler. « C’est un élément de transition, pas de rupture », souligne Léonie Chambon. En terre cuite, en bois, en métal ou en béton, il apporte du relief, de la texture, et une présence sculpturale.
À Toulouse, dans un appartement traversant, Julien Ravel a installé un claustra en bois de chêne massif entre le salon et l’entrée. « Le client voulait marquer l’entrée sans créer un mur. Le claustra dessine une zone tampon, tout en permettant à la lumière de circuler latéralement. » Les motifs, inspirés de l’art déco, créent des jeux d’ombres au fil de la journée. « C’est vivant. Le matériau vieillit bien, et l’effet est toujours renouvelé. »
Le claustra en terre cuite, souvent utilisé en extérieur, gagne du terrain à l’intérieur. « Il apporte une chaleur minérale, une porosité visuelle », décrit Aurore Pannier. Elle l’a intégré dans un projet à Aix-en-Provence, où un claustra ajouré sépare un petit bureau d’un salon lumineux. « Le bruit passe, c’est vrai, mais le regard est arrêté. Cela crée une zone de travail définie, sans enfermement. Et la matière ajoute une dimension tactile, presque méditative. »
Comment choisir la bonne séparation d’espace ?
Le choix entre verrière, brique de verre ou claustra ne se fait pas au hasard. Il dépend d’un équilibre entre fonction, esthétique et contraintes techniques. « Tout commence par un questionnement sur l’usage », insiste Aurore Pannier. Une cuisine ouverte ? Une verrière est idéale. Une salle de bain sans fenêtre ? Les briques de verre offrent clarté et intimité. Un espace de travail dans le salon ? Le claustra peut structurer sans isoler.
L’acoustique est un facteur clé. « La verrière et les briques de verre ne filtrent pas les bruits, rappelle Julien Ravel. Si vous avez besoin de silence, il faut prévoir un double vitrage ou une isolation complémentaire. Le claustra, lui, laisse tout passer. »
Le budget entre aussi en ligne de compte. Une verrière sur mesure en bois et verre texturé peut coûter entre 1 500 et 4 000 euros, selon les dimensions et les finitions. Les briques de verre, posées en panneau, oscillent entre 200 et 500 euros le mètre carré. Le claustra, selon le matériau, varie de 300 à 1 200 euros le mètre linéaire. « Ce n’est pas seulement une dépense, c’est un investissement dans le confort et la valeur du bien », ajoute Léonie Chambon.
A retenir
Quelle solution choisir pour une séparation lumineuse ?
La verrière reste la solution la plus efficace pour préserver la circulation de la lumière tout en délimitant un espace. Modernisée avec des matériaux chaleureux ou des formes courbes, elle s’intègre harmonieusement dans les intérieurs contemporains.
Les briques de verre sont-elles adaptées aux pièces humides ?
Oui, les briques de verre sont particulièrement adaptées aux salles de bains ou cuisines, car elles résistent à l’humidité, aux chocs et s’entretiennent facilement. Elles diffusent la lumière tout en préservant une certaine intimité.
Le claustra isole-t-il du bruit ?
Non, le claustra ne constitue pas une isolation acoustique. Il agit principalement comme un filtre visuel et un élément de structuration spatiale. Il convient donc mieux aux espaces où la circulation sonore n’est pas un problème majeur.
Peut-on personnaliser ces séparations ?
Absolument. Que ce soit par le choix des matériaux, des teintes, des motifs ou des formes, ces éléments peuvent être sur mesure. Ils deviennent alors des pièces uniques, intégrées au récit de l’intérieur.
Quel est l’impact sur la perception de l’espace ?
Ces séparations légères augmentent la sensation de volume. En laissant passer la lumière et en évitant les murs pleins, elles créent des espaces plus aérés, plus fluides, tout en maintenant une organisation claire des fonctions.